Le Palais de la Porte Dorée :
L’Établissement public du Palais de la Porte Dorée réunit aujourd’hui le Musée national de l’Histoire de l’Immigration et l’Aquarium tropical. C’est un lieu d’échanges, fort d’une programmation culturelle et scientifique interdisciplinaire, croisant beaux-arts et histoire, sciences et société, mais aussi patrimoine et arts vivants. En 2019, il a accueilli jusqu’à 525 594 visiteurs, et se situe désormais au 25e rang des monuments et musées les plus visités de France. Pap Ndiaye, qui en a été nommé Directeur général, prendra officiellement ses fonctions le 1er mars 2021. Il succèdera, pour un mandat de trois ans, à Hélène Orain. À la tête de l’établissement depuis 2015, celle-ci est arrivée au terme de ses deux mandats.
Connu parfois sous son ancien nom de “Musée national des Arts d’Afrique et d’Océanie”, le bâtiment du musée a été construit pour l’Exposition coloniale de 1931. D’abord “Musée des Colonies” – avec sa dédicace « À la France colonisatrice et civilisatrice » –, il changera plusieurs fois de nom : “Musée de la France d’Outre-mer” en 1935, “Musée des Arts africains et océaniens” en 1960 et “Musée national des Arts d’Afrique et d’Océanie” de 1990 à 2003, année au cours de laquelle il ferme ses portes. Il rouvre au public en 2007 et adopte cinq ans plus tard le nom de “Musée de l’histoire de l’immigration”. Selon ses statuts, il a pour mission de « poser un regard nouveau sur l’histoire de France, en montrant l’apport des immigrés dans le développement économique, les évolutions sociales et la vie culturelle du pays ». De nombreuses actions originales, telles un Grand Festival contre le Racisme, attiraient, avant la pandémie, un public de plus en plus nombreux.
Un nouveau Président
Avec l’appui de la Présidente du Conseil d’administration de l’établissement, Mercedes Erra, et celui du Président du Conseil d’orientation, François Heran, Pap Ndiaye mettra son expérience au service de cet établissement, original et fédérateur. Pour ce premier mandat, de nombreuses tâches l’attendent, entre autres le renforcement du rayonnement national et international du Palais de la Porte Dorée ; la préservation du patrimoine de l’établissement dans le cadre des travaux en cours ; la refonte du parcours permanent du Musée national de l’Histoire de l’Immigration ; à l’Aquarium tropical, dont les travaux de rénovation se terminent, le développement de projets ambitieux autour des enjeux du développement durable, et du défi climatique. Le Ministère de la Culture, qui a annoncé sa nomination, définit ainsi son rôle futur : « Il impulsera de nouveaux projets scientifiques et culturels avec des institutions muséales internationales, situées en particulier dans les régions du monde d’où sont issus les migrants depuis le XIXe siècle, mais aussi le développement de liens nouveaux avec les organismes français et étrangers, notamment associatifs… Par des actions en faveur du développement des publics et en plaçant l’éducation artistique et culturelle au centre de ses préoccupations, Pap Ndiaye poursuivra l’engagement de l’établissement pour sensibiliser la société française au rôle de l’immigration dans la construction de la France. »
Pap Ndiaye est né le 25 octobre 1965 en France à Antony, de père sénégalais et de mère française. Il est le frère aîné de la romancière Marie Ndiaye, Prix Goncourt 2009 pour Trois Femmes puissantes, et qui a préfacé l’ouvrage de Pap, La Condition noire : essai sur une minorité française. Professeur des Universités à Sciences Po Paris, agrégé et Docteur en histoire, ancien Directeur du département d’histoire de l’Institut d’études politiques (IEP), il est spécialiste de l’histoire sociale des États-Unis, particulièrement de celle qui concerne les minorités. Homme de savoirs et de convictions, il n’hésite pas à s’engager dans la vie publique de son pays, ni à prendre position sur des sujets actuels, aussi brûlants soient-ils. C’est ainsi qu’il déclarait, dans une entrevue au journal Le Monde, en 2019 : « Même s’il est évident que la “race” n’existe pas d’un point de vue biologique, force est de constater qu’elle n’a pas disparu dans les mentalités : elle a survécu en tant que catégorie imaginaire historiquement construite, avec de puissants effets sociaux. Même si l’intention est louable, abolir la “race” dans les sciences sociales ou la Constitution ne fera pas disparaître les discriminations fondées sur elle. L’usage de la catégorie raciale n’implique pas un engagement ontologique douteux du législateur ou du chercheur sur l’existence des “races”, mais l’utilisation pragmatique d’une catégorie située pour décrire des phénomènes discriminatoires. »
Pap Ndiaye a été aussi le conseiller scientifique de l’exposition Le modèle noir, qui s’est tenue en 2019 au Musée d’Orsay, sur la représentation des Noir·e·s dans les arts visuels. Plus récemment, il a présenté, avec Constance Rivière, Secrétaire générale du Défenseur des droits, un rapport sur la diversité à l’Opéra de Paris². Celui qui se définit comme un pur produit de méritocratie républicaine a été « un compagnon de route » du Conseil représentatif des associations noires, une fédération d’associations françaises qui milite pour la défense des populations noires de France.
Un évènement programmé : « Ce qui s’oublie et ce qui reste »
Au Musée national de l’Histoire de l’immigration, une exposition mise en place, et qui prend pour thème “la transmission”, se tiendra du 9 mars au 11 juillet 2021. Intitulée Ce qui s’oublie et ce qui reste, elle est issue de la collaboration étroite entre le musée et le MACAAL, le Musée d’Art Contemporain African Al Maaden, situé à Marrakech. Et ce, dans le cadre de la Saison Africa 2020¹. Le but de l’événement est de mettre en avant la notion de transmission, à travers des œuvres créées par 18 artistes africains, tels Amina Agueznay, Sammy Baloji, Badr El Hammai ou encore Anuar Khalifi. Ils sont originaires du Maroc, de Madagascar, du Bénin, d’Afrique du Sud, du Sénégal, de Madagascar, de la République démocratique du Congo, d’Algérie, mais aussi de France ou d’Allemagne. Et tous de réfléchir à la quête du sens qu’il faut donner à la « transmission », dans notre monde ultra-connecté. Que faire de ses souvenirs personnels, comment transmettre une mémoire aux générations futures, comment préserver traditions et rituels ?
Des récits intimes à une perspective historique large, l’exposition associe héritages et circulations, aborde les questions de frontières et de migrations, de liens entre générations, d’histoire et de mémoire, de part et d’autre de la Méditerranée et au sein du continent africain… À rebours des représentations colorées d’une supposée production artistique africaine, elle entreprend de tordre les clichés d’une identité visuelle associée au continent. Loin de construire un ensemble uniforme, les récits visuels des artistes se révèlent dans toutes leurs spécificités, toutes leurs facettes, et leur complexité.
Des questions essentielles se poseront lors de cette exposition multi-culturelle, où l’on pourra retrouver peintures, tissages, sculptures, installations, vidéos, mais aussi performances artistiques. Des œuvres dont certaines ont été commandées spécialement pour cet évènement, qui oscille entre continuité et points de rupture, tradition et modernisme, intime et immensité. Sans doute l’une des expositions les plus originales et émouvantes du printemps prochain.
- Face à la crise sanitaire et à l’évolution de l’épidémie du Covid-19 en France et sur le continent africain, la “Saison Africa2020”, prévue au second semestre 2020 sur tout le territoire français, a dû être reportée. Forte de l’investissement sans faille de ses partenaires publics et privés, elle a commencé en décembre dernier et suivra son cours jusqu’en juillet 2021. À distance, par téléphone, visioconférences et e-mails, toute l’équipe de la “Saison Africa2020” reste mobilisée et en contact permanent avec les opérateurs de cette Saison hors normes. Nous remercions chaleureusement tous nos partenaires en France et sur le continent africain pour leur engagement, leur détermination à bousculer leurs agendas et leurs messages amicaux. Prenez soin de vous. Prenons soin les uns des autres.
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Favoriser la diversité dans ses rangs. C’est la direction que souhaite désormais prendre l’Opéra de Paris, a annoncé son directeur, Alexander Neef. Ce dernier s’est exprimé suite à la remise d’un rapport sur la diversité, élaboré par Pap Ndiaye et Constance Rivière. Un rapport demandé par le directeur lui-même dès son arrivée en poste en septembre dernier, au moment où des salariés publiaient un manifeste intitulé “De la question raciale à l’Opéra national de Paris” pour dénoncer certaines pratiques au sein de l’institution.
Janine Bailly, Fort-de-France, le 16 février 2021.