— Par Yves-Léopold Monthieux —
Qui ne se souvient de la Semaine sainte telle qu’elle fut pratiquée, notamment le jeudi saint, le vendredi saint et le samedi gloria ? Les cloches des églises faisaient relâche jusqu’au samedi tandis que les croix, statues et images étaient voilées. Pour remplacer les cloches les enfants de chœur se répandaient dans les rues en faisant crisser des crécelles, sorte de moulinet en bois qui s’appelait rara en Martinique. Ce mot provient peut-être du mot ara qui est une variété de perroquet de l’Amérique tropicale. D’où l’expression courante à l’époque « parler comme un rara ». On retrouve le mot ara à Haïti pour désigner une musique mystique jouée, notamment, au cours de la Semaine sainte, ce qui peut être considéré comme un point commun avec la Martinique. Une autre pratique, le « battre Judas », consistait pour les fidèles de la paroisse à circuler dans les rues en frappant sur des boîtes vides symbolisant Judas, l’apôtre qui a trahi Jésus. Des jeunes dévoyés profitaient parfois pour se livrer à des exactions comme des lancers de pierres sur les maisons. En cette fin de semaine des 20, 21, 22 et 23 avril 1848, le phénomène prit un tour particulier.