—Par Catherine Calvet —
Patrick Chamoiseau vient de publier un ouvrage poétique et passionné, Frères migrants (Seuil, mai 2017), véritable manifeste poétique pour tous ceux qui sont refoulés aux frontières ou qui errent de centres de rétention en bidonvilles. Ce livre s’inscrit dans un large faisceau d’initiatives venant de la société civile, depuis la «Constituante migrante» (symposium-performance organisé en janvier à Beaubourg par la plateforme «le Peuple qui manque») jusqu’à l’adaptation récente au théâtre par Marcel Bozonnet du Couloir des exilés de l’anthropologue Michel Agier.
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Pourquoi choisir la poésie comme moyen de protestation contre la fermeture des frontières ?
Parce que c’est tout ce que je sais faire ! Ceci étant, il faut distinguer «poésie» et «poétique». La «poésie» est la pratique d’un langage inouï, la fréquentation d’un indicible, dans une langue. La «poétique» est une vision du monde, et de l’homme dans le monde, sur la base de ce qui fait l’irréductible humain quand on a enlevé toutes les aptitudes liées aux nécessités immédiates, à la survie et aux pures rationalisations. Une poésie suppose toujours une vision du monde ; une poétique peut, en revanche, se pratiquer sans formalisation poétique.