78 search results for "Lyonel Trouillot"

Lettre ouverte à la Linguistic Society of America

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

M. John Baugh
President
Linguistic Society of America
Washington University in St. Louis
Professor Emeritus of Education and Linguistics, Stanford University
Montréal, le 1er décembre 2022.

OBJET / Complément d’informations factuelles sur l’appui public du linguiste Michel DeGraff au cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste en Haïti.

PERSPECTIVE ANALYTIQUE / AVANT D’ACCORDER UNE QUELCONQUE « DISTINCTION » OU UN COMPLAISANT « FELLOWSHIP » AU LINGUISTE MICHEL DEGRAFF, LA LINGUISTIC SOCIETY OF AMERICA DOIT IMPÉRATIVEMENT EXAMINER SA CRÉDIBILITÉ SCIENTIFIQUE ET CITOYENNE.

M. le Président,

J’accuse réception de votre courriel du 10 octobre 2022 et je vous en remercie hautement. Permettez-moi de soumettre à votre appréciation, en versions anglaise et française, les deux rappels suivants assortis d’un complément d’informations factuelles sur l’appui public du linguiste Michel DeGraff au cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste en Haïti.

  1. RAPPEL / INVALIDITÉ SCIENTIFIQUE DU « GLOSSARY OF STEM TERMS FROM THE MIT – HAITI INITIATIVE »

La communauté des linguistes haïtiens a appris avec étonnement que la Linguistics Society of America s’apprête à attribuer à Michel Degraff, le 6 janvier 2023, le statut de « Fellow » (« Michel DeGraff named Fellow of the Linguistics Society of America », Bulletin du MIT School of Humanities, Arts and Social Sciences, octobre 2022).

→   Lire Plus

L’École haïtienne sous la loupe du philosophe Patrice Dalencour, ancien ministre de l’éducation nationale

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue—

Dans un texte retentissant et qui porte haut un questionnement de fond sur les errements linguistiques du ministère de l’Éducation nationale d’Haïti, « Réforme éducative ou coup d’État linguistique ? » (Le National, 5 mai 2022), Patrice Dalencour invitait à une réflexion analytique exigeante. Auparavant, il avait livré une dense réflexion sur plusieurs goulots d’étranglement du système éducatif haïtien dans l’article « Le diable se cache dans les détails… » (revue Haïti Perspectives, cahier thématique « L’École fondamentale haïtienne », vol. 5, no 1, printemps 2016). Plus récemment et suite à la demande, formulée par l’actuel Exécutif haïtien issu du cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste, d’une intervention militaire internationale en Haïti, il a soumis au débat public une réflexion citoyenne sous le titre évocateur « La vingt-sixième heure » (Le National, 15 novembre 2022). Enseignant de carrière, Patrice Dalencour est licencié en sciences de l’éducation et détenteur d’un doctorat en philosophie de l’Université de Toulouse-le Mirail (France). Il a enseigné la philosophie au Lycée Anténor Firmin, à l’École normale supérieure de l’Université d’État d’Haïti et dans divers établissements privés de la capitale.

→   Lire Plus

Le naufrage prévisible de « l’unilatéralisme créole » en Haïti 

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologuel—

Est-il nécessaire aujourd’hui en Haïti de contribuer au débat public sur la « question linguistique haïtienne » en général et sur certaines de ses zones conflictuelles en particulier ? Si oui, à quelles conditions et selon quelles modalités faut-il le faire afin qu’il soit porteur de changements véritables ? Pour que le débat d’idées soit un débat objectif, documenté et argumenté, il est nécessaire d’en situer le contexte et les idées exprimées, d’identifier les documents pertinents, de les lire avec attention et d’exercer son esprit critique-analytique avec clarté. Le débat d’idées objectif, argumenté et documenté s’oppose au « voye monte » comme au « chire pit », et le libre exercice de l’esprit critique-analytique est au fondement de l’enrichissement du débat d’idées. Ainsi, l’épineuse « question linguistique haïtienne » est depuis plusieurs années un lieu de débats au sein duquel s’expriment, souvent avec passion, des non-linguistes qu’il faut pourtant écouter avec attention. En dépit du fait qu’un relatif consensus s’est installé en Haïti quant à l’impérieuse nécessité de l’usage du créole dans la transmission des connaissances dans tous les apprentissages scolaires, d’importantes différences d’analyse et de points de vue se manifestent parmi les linguistes, parmi les enseignants et plus largement parmi les locuteurs créolophones.

→   Lire Plus

« La dot de Sara / Yon eritaj pou Sara » de Marie-Célie Agnant

Parution au Canada de la version bilingue du roman de Marie-Célie Agnant, « La dot de Sara / Yon eritaj pou Sara »

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Entrevue exclusive avec la romancière Marie-Célie Agnant à l’occasion de la parution à Montréal, le 23 juin 2022, de l’édition bilingue du roman « La dot de Sara / Yon eritaj pou Sara ». Annonce spéciale aux lecteurs d’Haïti : en vertu d’une collaboration exceptionnelle, la version bilingue de « La dot de Sara / Yon eritaj pou Sara » sera sous peu disponible en Haïti en coédition entre Les Martiales et Legs Éditions.

Mise en contexte, par Robert Berrouët-Oriol / La parution à Montréal, le 23 juin 2022, de la version bilingue du roman « La dot de Sara / Yon eritaj pou Sara » de la romancière Marie-Célie Agnant est un événement littéraire de premier plan tant pour la littérature québécoise que pour la littérature haïtienne contemporaine. Il n’est pas fortuit que ce roman paraisse en édition bilingue à Montréal : cette ville, dont la population est majoritairement francophone et qui abrite des locuteurs issus de plus d’une cinquantaine de communautés ethnoculturelles différentes, a été au cours des années soixante celle de la rencontre fertile entre l’avant-garde poétique québécoise (Gaston Miron, Paul Chamberlan, Nicole Brossard, etc.)

→   Lire Plus

Du 26 au 28 mai 2022, c’est mai poésie dans l’île d’Aimé Césaire !

Un festival d’un genre majeur en Martinique du côté de la commune de Saint-Esprit organisé par l’association Balisaille. Cet évènement articulé autour du thème « ‘’Parler poésie’’ a bénéficié du soutien de la DAC martinique, de la ville du Saint-Esprit qui a su faire de ce festival une activité phare de la commune à l’approche de sa fête patronale, et de la ville de Fort-de-France qui a mis à notre disposition la maison d’Aimé Césaire pour accueillir notre soirée du 27 mai 2022, en hommage à Jacques Stephen Alexis », a fait savoir le président de l’association, Daniel Boyer-Faustin tout en insistant que ce thème est tiré d’un texte inédit du grand poète Monchoachi.

Lire aussi : Widad Amra :  » Connaitre deux pays, deux histoires, c’est aller à l’universel »

Il a indiqué que cette grande fête de la poésie accueillera des auteurs de renommée internationale. Parmi eux, Joby Bernabé, Francis Combes, Raphaël Confiant, Patricia Latour, Lyonel Trouillot.

Qui sera l’invité d’honneur pour déployer les ailes de la poésie en ces instants ?

« La poétesse Widad Amra est notre invitée d’honneur, une manière pour nous de saluer le courage et l’audace de cette femme qui a tenu, parallèlement à son activité d’enseignante, à parler la poésie ».

→   Lire Plus

L’état des lieux de la didactique du créole dans l’École haïtienne, une synthèse (1979 – 2022)

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Dans une étude d’une grande amplitude analytique, « La didactique du créole en Haïti : difficultés et axes d’intervention », le linguiste haïtien Wilner Dorlus dresse un état des lieux similaire pour l’essentiel aux observations de terrain formulées quelques années plus tard par d’autres linguistes, notamment Renauld Govain (2013, 2014, 2021), Fortenel Thélusma (2018, 2021), Guerlande Bien-Aimé (2021), Bartholy Pierre Louis (2015), ainsi que Benjamin Hebblethwaite et Michael Weber (2012). L’étude de Wilner Dorlus a été élaborée en vue de sa participation aux Journées d’études sur la graphie et la didactique du créole organisées en 2008 par le CRILLASH (Centre de recherches interdisciplinaires en lettres, langues, arts et sciences humaines) de l’Université des Antilles en Martinique, et elle a été reproduite en 2020, avec l’aimable autorisation de l’auteur, sur le site www.berrouet-oriol.com. Professeur de communication créole au Lycée Anténor Firmin et enseignant-chercheur à l’Université d’État d’Haïti, Wilner Dorlus examine avec pertinence (1) « le contexte dans lequel a émergé [le créole] comme discipline dans l’enseignement haïtien » ; (2) « la façon dont l’enseignement de la discipline en question est défini par le curriculum de l’École fondamentale » ; (3) « le discours didactique à travers lequel passe cet enseignement, sans négliger l’imbroglio terminologique que reflète (…) « le champ conceptuel de la grammaire du créole en Haïti », alimenté par tous ceux-là qui, pour une raison ou pour une autre, s’estiment bien placés pour marquer de leur empreinte le domaine de la réflexion sur le créole ».

→   Lire Plus

Balisaille : parler la poésie

Mai.Poésie / Festival d’un genre majeur 26-28 mai 2022 au Saint-Esprit

 Liminaire

Aimé CÉSAIRE : ce nom seul suffirait à faire de la Martinique une terre de poésie. Le rayonnement planétaire, la puissance du verbe, la magnificence des images de l’auteur du « Cahier d’un retour au pays natal », en font l’un des plus grands poètes du vingtième siècle. Cependant, paradoxalement, pendant que le roman, le théâtre, voire le conte ou le slam tiennent le haut du pavé, la poésie y paraît délaissée.

MONCHOACHI, en dépit de la force tellurique de sa poésie, n’est pas connu au-delà de certains cercles d’initié.e.s, et n’en demande pas davantage puisque volontairement il s’est retiré sur les hauteurs du Vauclin, d’où il ne serait sorti pour se montrer en public que deux fois en dix ans.

S’il ne s’agit nullement de dire que, comme l’auteur de « Lémistè », la poésie se fait rare au pays de Césaire, il est néanmoins évident que d’un point de vue strictement institutionnel celle-ci a encore à faire sa place dans le paysage culturel de l’île.

→   Lire Plus

La pré-sélection du jury du Prix international de l’invention poétique et de la traduction en langue.s créole.s

À l’appel à textes de la première édition de BALISAILLE—Prix international de l’invention poétique et de la traduction en langue(s) créole(s) — près d’ une cinquantaine de textes ont été soumis, dont les deux tiers ont été produits en langue française.

Cette première salve de productions en provenance de nos territoires majoritairement créoles, créolisés ou créolophones démontre la prolixité de nos imaginaires, laissant poindre une apparente dominance du français. Pourtant, les géographies des impétrant.e.s interrogeraient ce déséquilibre, avec une majorité de poèmes en provenance d’Haïti. Cela n’enlève rien à la qualité de ce concours dont la récompense sera la publication du recueil de la ou du gagnant.e. Une tâche qui requiert rigueur, attention et équité.

Au-delà des considérations paritaires de genre et d’origine géographique, le critère de sélection primordial demeurait la qualité de l’inventivité poétique, du lyrisme des auteur.rice.s considéré.e.s.

Les travaux des membres du jury ont été entamés sous ces auspices et, après une première délibération le dimanche 8 mai 2022 en réunion virtuelle, une pré-sélection de trois textes finalistes ont été distingués dans chacune des catégories:(textes en langue française et textes en langue(s) créole(s).

→   Lire Plus

Ayatollahs du créole : la « duperie argumentative » est un procédé toxique dans le débat sur la question linguistique haïtienne

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

« duper » (verbe transitif )

  • Faire prendre à quelqu’un le faux pour le vrai ; tromper, abuser, mystifier / Ses escroqueries ont dupé bien des naïfs. [Dictionnaire Le Larousse]

Débattre du créole dans la société haïtienne est-il un droit, une nécessité, un tabou ou une croisade passionnelle, me demande un correspondant dans un récent courriel ? J’entreprends de lui répondre aujourd’hui par l’exploration de quelques pistes de réflexion et en lien avec le sujet des échanges qui ont eu lieu il y a quelques jours entre deux linguistes haïtiens. Il arrive souvent que les débats sur le créole, et plus largement sur la question linguistique haïtienne, empruntent la voie de propos passionnels et subjectifs émis la plupart du temps par des non-linguistes et parfois par quelques rares linguistes lorsqu’ils cèdent aux sirènes borgnes de l’idéologie. Dans tous les cas de figure, dans un pays où la libre parole et le débat public ont été violemment confisqués par la dictature trentenaire des Duvalier, oser penser, s’attacher à élaborer une pensée analytique et critique est déjà un parti-pris citoyen au creux du vouloir-vivre ensemble dans un futur État de droit.

→   Lire Plus

L’aménagement linguistique en Haïti au regard de la Constitution de 1987 : regard actualisé sur les acquis et les défis

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Le 29 mars 2022 a marqué le trente-cinquième anniversaire de la promulgation de la Constitution haïtienne de 1987 et cette date charnière, dans l’actuel contexte politique de démembrement des institutions républicaines au pays, invite à la réflexion. D’une part, le référendum constitutionnel du 29 mars 1987 représente, aux yeux de nombreux juristes et institutions de la société civile, la plus significative manifestation de la souveraineté populaire depuis l’Indépendance de 1804. Par un vote largement majoritaire, il a doté Haïti d’une Charte fondamentale qui consigne les bases juridiques de la sortie d’Haïti de la longue nuit de la dictature duvaliériste et il a fourni au pays le cadre institutionnel du vivre ensemble au sein d’une République solidaire devant être gouvernée selon les règles de l’État de droit. D’autre part, en rupture avec la Constitution de 1918 votée durant l’occupation du pays par les États-Unis d’Amérique, en rupture, surtout, avec la Constitution tontonmakout de 1964 –qui a institué la « présidence à vie » de François Duvalier–, la Constitution de 1987, rédigée et votée en créole et en français, pose pour la première fois dans l’histoire contemporaine d’Haïti le principe fondamental de l’égalité des citoyens devant la loi, vise à garantir les droits fondamentaux des citoyens et à organiser la séparation des pouvoirs en vue d’assurer l’efficience de l’État de droit.

→   Lire Plus

L’aménagement du créole dans l’École haïtienne : entre surdité, mal-voyance et déni de réalité

Le ministre de facto de l’Éducation Nesmy Manigat et l’aménagement du créole dans l’École haïtienne : entre surdité, mal-voyance et déni de réalité

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Au défilé des drames quotidiens qui endeuillent aujourd’hui la société haïtienne (insécurité généralisée, enlèvements contre rançon, impunité, etc.), l’installation surréaliste d’un « nouveau » gouvernement par le premier Ministre de facto Ariel Henry, le 24 novembre 2021, a vu le retour de Nesmy Manigat à la direction du ministère de l’Éducation nationale. Auparavant, de 2014 à 2016, Nesmy Manigat avait occupé le même poste dans le gouvernement des « bandits légaux » de Michel Martelly (2011 – 2016), président-clown misogyne qui proclame ouvertement son affiliation au duvaliérisme au sein du PHTK, le « Parti haïtien tèt kale », sorte de cartel politico-mafieux au pouvoir depuis dix ans en Haïti. Michel Martelly avait été « téléporté » à la présidence d’Haïti, de manière frauduleuse, par les soins empressés de la Fondation Clinton (voir le dossier du « Center for Economic and Policy Research » de Washington : « Clinton E-Mails Point to US Intervention in 2010 Haïti Elections » / « Ce que révèlent les emails de Clinton sur l’élection de Martelly en 2010 », 7 septembre 2016).

→   Lire Plus

De Ricardo Seitenfus à Helen La Lime, l’aveuglante et impériale manufacture du « consentement » politique en Haïti

—Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue

Ces derniers mois, la détérioration accélérée de la situation sécuritaire et politique en Haïti a mis en lumière le jeu macabre des contradictions et des intérêts communs de ses différents protagonistes, les acteurs nationaux et étrangers, ces derniers étant regroupés au sein d’une bienveillante et hyperactive coterie internationale dénommée « Core Group » (qui comprend les ambassadeurs d’Allemagne, du Brésil, du Canada, d’Espagne, des États-Unis d’Amérique, de France, de l’Union européenne, du Représentant spécial de l’Organisation des États Américains et de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies). À l’opposé des justes revendications de la population portées par la société civile, le cartel politico-mafieux connu sous le nom de PHTK (Parti haïtien tèt kale ouvertement néo-duvaliériste) cristallise et organise depuis dix ans, avec l’aval décomplexé du « Core Group », une gouvernance du pays caractérisée par la dilapidation des fonds publics et des fonds du programme PetroCaribe (3,8 milliards de dollars), le blanchiment d’argent à grande échelle, l’extinction programmée des droits citoyens, la décapitation des institutions de l’État, la violente répression des protestations citoyennes publiques par l’instrumentalisation des corps répressifs de la Police nationale, la tolération et/ou la complicité de l’Éxécutif dans les assassinats ciblés et les massacres dans les quartiers populaires, la banalisation de la corruption et du népotisme installés à tous les étages de l’édifice social.

→   Lire Plus

Étonnants Voyageurs, un festival original en direct de Saint-Malo, France

– par Janine Bailly –

Les 22, 23 et 24 mai, une Trentième Édition 2021 forcément en ligne, et sans Michel Le Bris !

Je me souviens… Il fut, en des temps plus heureux, des Pentecôte(s) où descendait sur nos fronts, non la blanche colombe de la Bible, mais l’esprit de la littérature. Alors déferlait sur Saint-Malo, à peine contenue par l’antique ceinture granitique de ses remparts, la vague des lecteurs, amoureux des livres du « tout-monde », corsaires à l’affût de trésors dormant entre les pages, pirates chasseurs d’autographes, flibustiers dénicheurs d’inédites perles rares au creux secret de l’huître… Je me souviens… les courants convergents des visiteurs déferlant de toute la Bretagne et d’ailleurs vers le Palais du Grand Large ; la ville vaisseau littéraire à prendre à l’abordage, l’ancien repaire investi pendant trois jours, espace clos et pourtant ouvert sur le monde, bulle de sérénité où la vie se déroulait d’autre et belle façon ; le ressac des mots, les paroles entendues des écrivains, que l’on buvait sans que jamais ne soit étanchée notre soif, et dans l’odeur salée qui montait du large, l’écho des aventures et des voyages, périples autour du monde, mais encore plongée au cœur de la pensée et dans les hauts-fonds de l’âme humaine ; les milliers de pages à réveiller, auxquelles donner vie par une  lecture à venir, que l’on pressentait heureuse et riche, et dont la seule idée tenait déjà d’une indicible satisfaction ; le choix difficile puisque de cette bibliothèque marine, universelle, aux alizés ouverte, on ne pourrait hélas tout acquérir !

→   Lire Plus

L’aménagement du créole en Haïti et la réforme Bernard de 1979 : le bilan exhaustif reste à faire

— Par Robert Berrouët-Oriol, Linguiste-terminologue —

Dans l’article publié par Le National le 8 janvier 2020, « Le défi de l’aménagement du créole dans le système éducatif haïtien », nous avons mis en lumière des données factuelles sur l’introduction du créole aux côtés du français dans le champ éducatif et, à l’appui de notre propos, nous avons fait appel à des références documentaires utiles à l’intellection de la réflexion offerte en partage. Le présent article élargit l’éclairage analytique de cette question de fond au regard, cette fois-ci, de la première grande réforme du système éducatif haïtien connue sous l’appellation de réforme Bernard de 1979 et dont le bilan exhaustif interpelle.

La réflexion sur le statut, le rôle et la place du créole dans le système éducatif haïtien, souventes fois fragmentaire et inaboutie, n’est pas nouvelle en Haïti. Comme le rappelle à juste titre le linguiste Renauld Govain dans son article intitulé « Le créole haïtien : de langue d’alphabétisation des adultes à langue d’enseignement » (researchgate.net, 11 avril 2018), « En 1898 déjà, Georges Sylvain [déclarait] que « le jour où (…) le créole aura droit de cité dans nos écoles primaires, rurales et urbaines, le problème de l’organisation de notre enseignement populaire sera près d’être résolu ».

→   Lire Plus

Haïti: Lettre ouverte à la Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie

Madame Louise Mushikiwabo,

Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie,

Madame la secrétaire générale,

Nous, écrivains de langue française, représentants des cinq continents de la francophonie, préoccupés par la situation haïtienne caractérisée par la mise en place d’une dictature, le président de facto Jovenel Moïse se maintenant au pouvoir par la force au-delà de son mandat constitutionnel expiré le 7 février 2021, vous demandons de ne fournir aucun appui à un pouvoir décrié et rejeté par le pouvoir judiciaire haïtien, les églises catholique et protestante, la confédération des barreaux haïtiens, les organismes de défense des droits humains, l’association nationale des magistrats haïtiens, l’opposition politique organisée, nombre d’associations de la société civile, des personnalités haïtiennes appartenant à différents domaines d’activité.

Nous comprendrions mal que l’institution que vous dirigez, dont l’existence n’est fondée que sur l’exigence de solidarité réelle avec les communautés et pays de langue française, s’engage avec un pouvoir illégitime qui multiplie les exactions, les décrets et autres mesures liberticides. Vous n’êtes pas sans savoir que le pouvoir utilise des gangs lourdement armés par lui, comme force répressive aux actions meurtrières dans les quartiers populaires.

→   Lire Plus

Un régime autoritaire soutenu par le crime s’installe en Haïti

— Par François Bonnet —

Massacres, kidnappings, assassinats d’opposants : Haïti sombre sous les coups d’une alliance entre le pouvoir et les bandes criminelles. Washington vient de sanctionner deux proches du président Jovenel Moïse qui construit un appareil répressif à sa main. Les institutions du pays sont à l’arrêt et les manifestations se multiplient.

Les États-Unis, faiseurs de roi et principal acteur politique en Haïti, se sont enfin décidés à bouger. Depuis 2016, Washington soutenait contre vents et marées le président Jovenel Moïse et son clan, malgré l’effondrement du pays. Cette fois, l’avertissement est sévère. Le 10 décembre, le département américain du trésor a annoncé prendre des sanctions contre trois personnages clés, deux officiels du régime et un chef de gang. Tombant sous le coup du Magnitski Act, leurs avoirs aux États-Unis sont gelés et ils sont interdits de visas.

C’est une décision importante car elle frappe au cœur de ce qu’est devenue la présidence de Jovenel Moïse : une alliance d’un pouvoir autoritaire avec les gangs criminels pour terroriser la population et éteindre les mobilisations sociales qui n’ont pas cessé depuis plus de deux ans (lire notre reportage).

→   Lire Plus

L’aménagement simultané du créole et du français en Haïti

Une perspective constitutionnelle et rassembleuse

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Depuis la parution en 2011 du livre de référence « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions » (Berrouët-Oriol et al., Cidihca et Éditions de l’Université d’État d’Haïti), la perspective de l’aménagement simultané du créole et du français, les deux langues de notre patrimoine linguistique national, est largement soutenue par nos interlocuteurs, y compris par des enseignants de disciplines diverses oeuvrant dans le système éducatif national ainsi que par nombre de défenseurs non sectaires du créole. Toutefois, nos fréquents échanges avec des interlocuteurs d’horizons divers ont montré, au fil des ans, que la question centrale de l’aménagement linguistique au pays est diversement comprise et qu’elle mérite un constant éclairage, un plaidoyer rassembleur réitéré pour mieux en situer les enjeux et le rôle central que l’État et la société civile sont appelés à jouer dans ce domaine. Il faut donc en amont prendre toute la mesure que l’aménagement linguistique, qui doit être mis en œuvre au périmètre des droits linguistiques de l’ensemble des locuteurs en Haïti, concerne à la fois les individus qui en seront les bénéficiaires (défenseurs des droits humains, juristes, agriculteurs, entrepreneurs, journalistes, enseignants, politologues, magistrats, etc.)

→   Lire Plus

Entrevue avec Yanick Lahens, co-lauréate du prestigieux Prix Carbet de la Caraïbe et du Tout-Monde 2020

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue—

À l’occasion de l’attribution à Paris, le 24 octobre 2020, du prestigieux Prix Carbet de la Caraïbe et du Tout-Monde 2020 à la romancière et essayiste Yanick Lahens, le linguiste-terminologue Robert Berrouët-Oriol, collaborateur régulier du journal Le National, s’est entretenu avec l’auteure de « Bain de Lune » (Prix Fémina 2014). Cette année, fait inhabituel, il s’agit d’un prix conjoint, le jury du prestigieux Prix Carbet de la Caraïbe et du Tout-Monde 2020 ayant récompensé trois auteurs, Élie Stephenson (Guyane), Yanick Lahens (Haïti) et Alfred Alexandre (Martinique). Yanick Lahens est la première titulaire de la Chaire Mondes francophones créée par le Collège de France avec l’Agence universitaire de la Francophonie, l’AUF. Elle a prononcé le 21 mars 2019 sa conférence inaugurale qu’on peut retrouver sur le site du Collège de France. L’enseignement de Yanick Lahens au Collège de France est consigné dans le livre « Littérature haïtienne : urgence(s) d’écrire, rêve(s) d’habiter » (Éditions Collège de France / Fayard, 2019). Le linguiste Hugues Saint-Fort a fait une remarquable recension de ce livre dans l’édition du 20 octobre 2020 du journal Le National.

→   Lire Plus

Théâtre : la mairie de Paris au secours du « Lavoir Moderne Parisien »

Frankétienne : « Le théâtre est un espoir de lumières pour les peuples que l’on maintient dans les ténèbres. »
Emmanuel Vilsaint : « Nous n’oublierons jamais que le théâtre est célébration de vie avant toute autre chose. »

Ancien lavoir de la fin du 19ème siècle, Le Lavoir Moderne Parisien est devenu un théâtre en 1986 et reste à ce jour l’unique théâtre du quartier populaire de la Goutte-d’Or, dans le XVIIIe arrondissement de Paris. Depuis sa création, il a été un lieu de culture et de rencontres artistiques pluri-disciplinaires, avec une orientation fortement marquée vers les jeunes auteurs. Ses murs ont accueilli de nombreux talents, tels Joël Pommerat, Valère Novarina, Koffi Kwahulé, Hubert Koundé, Maïmouna Gueye, Mathieu Boogaerts, Abd Al Malik, Youssou N’Dour, Alain Mabanckou, Les têtes raides… 

Le Lavoir Moderne Parisien est un lieu dédié à la création contemporaine, résolument ancré sur son quartier. Son pari est de faire confiance aux jeunes compagnies, de promouvoir et de produire des formes et des écritures nouvelles. C’est un petit théâtre actif, mais qui vit « dans la tourmente depuis années ».

→   Lire Plus

La Constitution haïtienne de 1987 et la problématique de l’équivalence partielle entre les versions française et créole de l’article 5

—Par Robert Berrouët-Oriol, Linguiste-terminologue —

La recherche documentaire ayant précédé la rédaction de deux de nos derniers articles –« Aménagement et « didactisation » du créole dans le système éducatif haïtien : pistes de réflexion » (Le National, 24 janvier 2020), et « Le traitement lexicographique du créole dans le « Diksyonè kreyòl Vilsen », (Le National, 23 juin 2020)–, nous a valu de réexaminer les articles de la Constitution haïtienne de 1987 ayant un rapport avec l’aménagement du créole et du français en Haïti, en particulier les articles 5 et 40. L’article 5 se lit comme suit (en français) : « Tous les Haïtiens sont unis par une langue commune : le créole. Le créole et le français sont les langues officielles de la République » ; (en créole) : « Sèl lang ki simante tout Ayisyen ansanm, se lang kreyòl. Kreyòl ak franse, se lang ofisyèl Repiblik d Ayiti. » À la lecture de ces deux versions, le lecteur peut donc noter que la créole comprend un segment, « Sèl lang ki simante tout Ayisyen ansanm, se lang kreyòl », qui ne figure pas dans la version française originale à partir de laquelle elle a été traduite.

→   Lire Plus

Unilatéralisme créole ou aménagement simultané du français et du créole en Haïti ?

Par Robert Berrouët-Oriol, Linguiste-terminologue —

Un choix de société et un choix politique

Au moment où nous rédigeons cet article, la pandémie du Covid 19 continue de se répandre à travers le monde avec son cortège mortifère de décès et de personnes infectées. Cette pandémie inédite oblige les États à prendre des mesures de protection des populations et le confinement préventif est de rigueur dans de nombreux pays. Le Covid 19 est déjà présent en Haïti et plusieurs spécialistes de santé publique estiment qu’il y fera de nombreuses victimes en raison principalement des lourdes défaillances des structures sanitaires du pays. Les écoles et universités sont fermées ainsi que divers centres d’apprentissage technique, tandis que des associations de journalistes souhaitent un confinement général, d’au moins 14 jours, face à la pandémie de Covid-19 au pays (AlterPresse, 1er avril 2020). En Haïti, cette situation génère de l’anxiété, de la peur, et elle n’est guère propice à la réflexion sur des sujets de société aussi prégnants que l’éducation, les droits humains et la liberté de parole. Faut-il dès lors se laisser emporter par une certaine paralysie et s’interdire de réfléchir, individuellement et collectivement, aux solutions à apporter aux nombreuses urgences du pays ?

→   Lire Plus

Partenariat créole/français – L’enseignement en langue maternelle créole  et l’apprentissage précoce de la langue seconde en Haïti : pistes de réflexion

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

L’accession du créole au statut de langue enseignée et langue d’enseignement remonte à la réforme Bernard de 1979. En effet, « Joseph C. Bernard dans sa réforme de l’éducation a fait publier une loi sur le créole à la Chambre législative le 18 septembre 1979. Et à côté du français, il devient, pour la première fois dans l’histoire de l’enseignement d’Haïti, langue outil et langue objet » (Fortenel Thélusma, « Pratique du créole et du français en Haïti : entre un monolinguisme persistant et un bilinguisme compliqué », 2019, à paraître). Ambitieuse dans son objectif majeur, la réforme Bernard de 1979 accordait donc, grande nouveauté dans l’apprentissage des connaissances au pays, un statut nouveau et une place centrale à l’enseignement dans/de la langue maternelle des apprenants unilingues créolophones. Cette ambitieuse réforme n’a pas été généralisée ni menée à son terme, et dès ses débuts elle a été torpillée par les grands commis de la dictature duvaliériste comme en témoigne le sociologue Guy Alexandre dans son article « La politique éducative du jean-claudisme, chronique de l’échec « organisé » d’un projet de réforme » paru dans « Le prix du jean-claudisme – Arbitraire, parodie, désocialisation », livre publié en 2013 sous la direction de Pierre Buteau et Lyonel Trouillot aux Éditions C3.

→   Lire Plus

Partenariat créole/français – Plaidoyer pour un bilinguisme de l’équité des droits linguistiques en Haïti

— Par Robert Berrouët-Oriol, Linguiste-terminologue —

L’épineuse question linguistique en Haïti, telle qu’analysée par l’éminent linguiste et enseignant Pradel Pompilus dans « Le problème linguistique haïtien » (Éditions Fardin, Port-au-Prince, 1985), continue de préoccuper un grand nombre de personnes en Haïti, au premier chef des enseignants, des chercheurs et des administrateurs du système éducatif. Les données de ce « problème linguistique » ne sont pas toujours bien établies pour certains, et les perspectives et enjeux défendus par plusieurs ne bénéficient pas nécessairement de l’éclairage des sciences du langage. Par exemple, l’Académie du créole haïtien, l’AKA, s’est révélée incapable depuis sa création prématurée en 2014 de dépasser le slogan « bay kreyòl la jarèt », horizon réducteur et idéologie unilinguiste frileuse conforme à la réalité que l’AKA ne dispose d’aucun mandat d’aménagement simultané de nos deux langues officielles, le créole et le français (voir là-dessus notre article « Maigre bilan de l’Académie du créole haïtien (2014-2019) : les leçons d’une dérive prévisible », Le National, 5 avril 2019). Aussi, interroger le « problème linguistique haïtien » revient également aujourd’hui à examiner la perspective d’un novateur partenariat entre le créole et le français pour mieux comprendre la vision et les exigences d’un futur bilinguisme de l’équité des droits linguistiques en Haïti.

→   Lire Plus

Le créole, « seule langue officielle d’Haïti » : retour sur l’illusion chimérique de Gérard-Marie Tardieu

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue

La parution en 2018, en Haïti, du livre de Gérard-Marie Tardieu, « Yon sèl lang ofisyèl » (Éditions Kopivit laksyon sosyal) n’a pas soulevé grand intérêt chez les créolistes, les enseignants et les linguistes. Hormis un article du Nouvelliste paru le 30 mai 2018, « Yon sèl lang ofisyèl pou dechouke mantalite nou », ceux qui ont à cœur la défense du créole ne semblent pas avoir pris au sérieux la croisade de Gérard-Marie Tardieu visant à faire du créole la « seule langue officielle » d’Haïti à l’exclusion du français. Et comme pour conjurer le silence, pourtant salutaire, qui a suivi la parution de « Yon sèl lang ofisyèl » (« Une seule langue officielle »), le quotidien Le National, daté du 26 septembre 2019, vient de lui faire l’amabilité d’un entretien sous le titre « Gérard-Marie Tardieu : « kreyòl la ofisyèl sou papye sèlman».

Paru dans Le National  du 7 juin 2018, notre article « Le créole, « seule langue officielle » d’Haïti : mirage ou vaine utopie ? » met en lumière un aveuglement volontaire et têtu chez ceux des bilingues haïtiens éduqués en français qui nient avec légèreté le caractère bilingue de notre patrimoine linguistique biséculaire.

→   Lire Plus

Ernest Pignon-Ernest : « Mes interventions visent à faire ressurgir l’histoire d’un lieu »

— Par Gérald Rossi —

Depuis les années 1970, Ernest Pignon-Ernest court les rues du monde. Le plasticien y colle ses dessins grandeur nature de personnages, toujours en s’inscrivant dans une démarche historique ou sociale. Un numéro de « Passage des arts » lui est consacré. Rencontre.

On vous présente souvent comme le « père » du street art, cette action artistique qui s’exprime dans les rues et que vous avez débutée un peu avant les années 1970. Quelle définition, aujourd’hui, en donnez-vous ?

Dans un de ses derniers ouvrages, le philosophe Régis Debray a eu cette phrase : « Les gens du “street art” font de la rue une galerie, Ernest en fait une œuvre d’art. » J’en suis touché, mais, moi qui doute toujours, je suis aussi un peu insatisfait. Il y a là pour certains un effet de mode. On entend parfois parler de « la plus grande galerie du monde ». Alors que moi, j’aborde d’abord la rue d’un point de vue plastique, avec la couleur des murs, leur texture, et ce qui ne se voit pas ou plus, c’est-à-dire la mémoire des lieux.

→   Lire Plus