Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre…
Déclarer le créole comme langue officielle, au côté du français on le rappelle, serait un acte d’indépendance, un acte machiavélique avec un plan monté par Serge Letchimy pour nous mener à l’indépendance.
Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre…
Depuis quand parler notre créole fait de nous des indépendantistes ? Qu’est-ce qui gêne à ce point dans l’idée que nous puissions être à la fois français et assumer notre identité propre martiniquaise ?
Le créole : on l’entend dans nos marchés, dans nos maisons, dans nos fêtes de famille, dans nos rues, dans nos institutions. On le trouve dans nos écoles, à l’université, dans les livres. C’est d’ailleurs un signe distinctif : qui n’a pas souri en voyageant en entendant un « sa ou fè » permettant instantanément de reconnaître son frère ou sa sœur martiniquais.e. Un moment de joie interne qui dit à quel point le créole nous lie chacune et chacun.
Une langue maîtrisée par 90% de la population
On rappelle que 90% de notre population maîtrise le créole martiniquais selon l’Insee. 71% des Martiniquais parlent créole dans leur vie quotidienne, que ce soit chez eux, au travail ou entre amis. La pratique du créole, fortement ancrée chez nos aînés, reste importante chez nos jeunes (85% des 15-39 ans le maîtrisent et 72% le parlent au quotidien). Elle a des filiations internationales avec les créoles d’autres pays.
Notre créole n’est pas une langue morte ou en voie de disparition : c’est une langue bien vivante. Sé ta nou menm ! Nou ka viv épiy tou lé jou, tou li tan, pou tout bagay.
Notre créole martiniquais est un bijou. Ce n’est pas une arme qu’on brandirait contre nos frères, contrairement à ce que laissent penser toutes les attaques qu’on peut lire ces derniers jours.
Le débat est donc : quelle place souhaitons-nous donner au créole ? Nous, élus de la majorité, au côté de Serge Letchimy, rejoints par de nombreux autres élus, avons soutenu et voté unanimement la délibération reconnaissant le créole comme une des deux langues officielles de Martinique, au côté du français.
Un combat identitaire
Nous en sommes fiers, car c’est un combat pour notre identité. Pour ce que nous sommes.
Il y a des combats pour des causes qui restent, qui sont ancrées. Goumen pou kréyol sé goumen pou sa nou yé, ba fondok-nou ! Nous disons que nous pouvons être français, européens, mais en même temps caribéens et fiers de nos racines historiques. Qu’est-ce que cela nous retire ? RIEN. Qu’est-ce que cela nous rapporte ? Un pas de plus dans le combat pour la dignité de l’homme et de la femme martiniquais.e. En cela, nous poursuivons le travail de Césaire. Aimé Césaire qui, d’ailleurs, contrairement à ce que disent certains qui ont soudain la mémoire courte, affirmait en 1990 dans une interview que le créole était « la langue martiniquaise, la vraie langue martiniquaise », et poursuivait : « il va falloir revenir à ce fait premier que nous sommes mélangés ».
« Il est urgent d’oser se connaître soi-même, d’oser s’avouer ce qu’on est » disait Suzanne Césaire.
Urgent. Car oui, le fait de mener de front cette lutte pour la reconnaissance de ce que nous sommes, de tous ces éléments qui font notre identité singulière dans le monde, les arracher à une République restée trop conservatrice sur tous ces sujets, c’est l’urgence de bousculer les idées reçues et les institutions qui voudraient que nous soyons assimilés à une unité qui efface les particularismes, les identités plurielles. La France est multiculturelle, il est temps qu’elle s’en rende compte.
Alors, que cherchent ceux qui opposent ce combat à celui des causes du quotidien des Martiniquais ?
À faire croire que nous serions dans l’idéologie et dans la déconnexion par rapport au quotidien des Martiniquais.
Là encore, qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre…
Des grandes réformes
Qui a accéléré le chantier de l’eau en réglant Séguineau ? Qui a initié la gratuité des livres scolaires au lycée au moment où les familles se battent contre la vie chère ? Qui a mis en œuvre un outil unique de lutte contre les sargasses en moins d’un an avec l’État et réussi à décrocher leur ramassage en mer ? Qui a obtenu des moyens complémentaires pour le territoire face à l’insécurité ? Qui a mis 1 500 jeunes en activité par les jobs vacances ? Qui a créé la Maison du Retour avec des aides jusqu’à 24 000€ pour permettre à nos jeunes de rentrer massivement ? Qui a redonné l’aide sociale de proximité aux communes quand elle leur avait été retirée de force par l’ancienne majorité ? Qui a obtenu deux ports francs et une zone franche ? Qui a mis en œuvre une programmation d’une cinquantaine d’évènements culturels sur tout le territoire pour plus de 700 000€ depuis l’élection à la tête de la CTM ? Qui se bat pour obtenir les moyens pour la reconstruction de nos hôpitaux ?
Ceux qui font croire que la CTM n’est pas au rendez-vous du quotidien essaient de leurrer le peuple. Et c’est leur tactique : lorsqu’un système est mis en cause pour sa « pwofitasion », comment réagit-il ? En essayant de faire peur et de décrédibiliser ceux qui portent des grandes réformes à la tête d’un pays qu’ils ont rendu malade et dont ils sont aujourd’hui les principaux bénéficiaires.
À nous de ne pas tomber dans leur panneau encore une fois et d’affirmer haut et fort que nous sommes fiers d’être Martiniquaises et Martiniquais, au sein d’une République où on nous regarde comme des égaux et non comme des inférieurs !
Alors, oui, oui, encore et encore oui à la reconnaissance officielle de notre créole.
Premiers signataires : Lucien Saliber, président de l’Assemblée de Martinique, Maurice Antiste, sénateur de Martinique Marie-Thérèse Casimirius, conseillère exécutive en charge de la culture et langue créole, art et patrimoine, éducation et formation David Zobda, conseiller exécutif en charge de l’aménagement, du développement durable, des transports et de la transition énergétique Michelle Monrose, présidente de la commission culture, art et patrimoine Jean-Claude Duverger, 1er vice-président de l’Assemblée de Martinique, secrétaire de la commission culture, art et patrimoine de l’Assemblée de Martinique
jeudi 14 septembre 2023