— Par Térèz Léotin —
Il était une fois un petit pays dans lequel vivaient près de 400.000 habitants. Dans ce petit pays de presque 400.000 habitants, il était une population qui essayait de se tenir par la main. Nous disons bien « essayait » car dans ce petit pays de près de 400.000 habitants, il y en avait d’autres qui comme partout ailleurs du reste, luttaient rien que pour que le drap ne recouvre qu’eux seuls.
Faisant des mains, faisant des pieds, il en était qui se battaient farouchement pour mépriser tous ceux- là et, résistant, voulaient garder le cap de l’honneur, celui de la liberté d’être, envers et contre tous.
Il était donc ce petit pays, celui des femmes connues et aussi des autres moins connues. Il était ce petit pays dans lequel la femme serait soi-disant, le « potomitan » vénéré. Cependant pour peu que certaines aient horreur de tricher avec l’âge, pour peu qu’elles aient choisi de laisser quelques fils blancs envahir ou garnir leur chevelure, il était celui tout récent de l’appellation à tout va, dans laquelle elles deviennent la « mamie » de chacun, la « mamie » de tout le monde.
Cette appellation, disent ceux qui l’utilisent, serait employée, par « respect ». Il n’empêche que, si pour certains c’est leur marque d’affection qu’ils expriment, elle reste toutefois tachée d’un irrespect involontaire, car ces mots si « gentiment respectueux » comme on le répète fort souvent, ne font que rappeler, que les dénommées mamies ne seraient pas « autre chose » que des « vieillardes ». Et même si c’est le cas, depuis quand et pourquoi ? Le mot « madame » serait-il soudainement devenu obsolète, comme le mot « mademoiselle », ou serait-il équivalent à de l’incorrection ?
Il était ce pays où, en vous montrant que vous aviez dépassé la limite du respect dû normalement aux personnes âgées, l’on vous donne du « tu », du « toi », du « mamie », et du « mémé ».
Comment ne pas confirmer qu’il est bien vrai que l’âge ne donne pas à tous les mêmes avantages ? Ni physiques, ni sociaux. Comment expliquer que l’animateur-vedette de télé Michel Drucker né le 12 septembre 1942 sévit encore sur les antennes de son pays, alors qu’en revanche sa consœur, journaliste-vedette, Claire Chazal née le 01 décembre 1956 a dû évacuer des Vingt heures de TF1, depuis le 13 septembre 2015 ? Deux vedettes, deux mesures. D’un côté un homme et de l’autre une femme. Les démons du sexisme, les fervents acteurs du « jeunisme» sont bien présents.
Ce pays nôtre, serait-il devenu depuis peu, celui où la femme âgée, la personne âgée, autrement dit le patriarche, l’« ancêtre» n’aurait sa place qu’au ban de la société ? Voudrait-on inconsciemment, et bien entendu sans malice, les placer au rang des inutiles, les réduire presque, et ce sans s’en rendre compte bien sûr, à moins que rien. Lorsqu’il n’y a plus de respect pour qui que ce soit, ni pour quoi que ce soit, faudrait-il encore s’étonner d’une décadence assurée de notre société ?
Pourquoi, alors que vous avez un malade, et que vous appelez les Urgences, la première question est-elle : quel âge a-t-il ? C’est que de votre réponse va se dégager la nécessité ou non de l’intervention sanitaire prioritaire. Il est vrai que ceci est valable sans distinction de sexe.
Ce qui m’effraie, disait Martin Luther King, ce n’est pas tant l’oppression des méchants, c’est l’indifférence des bons.
Posons-nous, oui posons-nous la question : Où allons-nous ?
Térèz Léotin