— Par Michele Bigot —
Obliques
Texte et mise en scène : Christophe Moyer
Cie Sens Ascensionnels,
Festival d’Avignon off juillet 2014, l’Entrepôt
Sur le devant de la scène, une série d’objets non utilitaires et difficilement identifiables, montés en circuit destiné à faire circuler un flux. En fond de plateau, un présentoir qui sera le centre du spectacle, tout à la fois support de théâtre de marionnettes, plateau de jeu, espace à bascule propre à représenter le monde des obliques. Les obliques sont un peuple menacé d’effondrement par glissement général de leur sol ; ils habitent un monde en perte d’équilibre, qui penche. Sur le socle du présentoir, un tableau noir couvert de dessins d’enfants : des yeux, des poissons. Ce support figurera alternativement la terre inclinée des obliques, et « la merveille », le lac menacé d’assèchement et ses habitants , poissons et autres créatures aquatiques en voie de disparition. Sur la droite de la scène un tableau de classe qui servira de support à la narration. Les acteurs dessineront l’univers qu’ils évoquent au fur et à mesure du récit, dessinant ainsi les étapes de la dégradation du monde des obliques. Sur ce même tableau seront projetés des dessins animés donnant vie à l’évocation. Le bruitage réalisé par les comédiens accompagne les dessins animés et leur donne vie. Enfin , sur la gauche, une coque de bateau échoué, dont le mât est surmonté d’une grappe de ballons, appelés à figurer les nuages. Le mât porte un écriteau avec cette mention : « une histoire, on ne sait pas comment ça commence ». Il est certain, en revanche qu’on comprend vite comment elle va se terminer !
Voilà toutes les ressources dont la mise en scène va tirer habilement parti, renouvelant les modes d’expression : dessin, vidéo, marionnettes viennent conforter le jeu des trois comédiens, qui miment le désarroi des obliques, leur recherche frénétiques de remèdes au déclin par un jeu d’acteur très physique, contorsionnant les corps à coup de cabrioles, pirouettes et autres sauts. Le jeu des acteurs relève de la tradition du mime, du clown et du théâtre de farce.
L’ensemble forme un spectacle comique, propre à amuser tous les âges. Il est souvent convaincant, parfois très drôle et brillant, voire virtuose dans ses trouvailles d’écriture scénique. On regrette juste que le texte n’ait pas su éviter quelques facilités et jeux de mots épais. Mais cette comédie est aussi une sorte de conte philosophique des temps modernes : fantaisie écologique, prophétisant sur le mode de la catastrophe la perte de l’humanité par épuisement des ressources de la terre et disparition de l’élément vital : l’eau.
Michèle Bigot
Avignon le 16/07/2014