— Par Patrick Roger —
A l’approche de la dernière consultation, qui devra avoir lieu au plus tard en septembre 2022, l’exécutif a élaboré un document rigoureux. Celui-ci doit servir de base de travail aux discussions qui démarrent mercredi 26 mai à Paris, jusqu’au 3 juin, avec les principaux dirigeants calédoniens.
Lors des deux premières consultations sur l’accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté, l’Etat s’était contenté d’envisager de façon très formelle les scénarios découlant des résultats du vote. Cette fois, à l’approche de la dernière échéance, qui devra avoir lieu au plus tard en septembre 2022, le gouvernement a élaboré un document rigoureux sur les conséquences du oui et du non, qui doit servir de base de travail aux discussions qui démarrent mercredi 26 mai à Paris, jusqu’au 3 juin, avec les principaux dirigeants calédoniens.
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Dans ce document confidentiel de 44 pages, dont Le Monde a pris connaissance, pas moins de 33 pages sont consacrées aux conséquences du oui ; ce qui n’est pas étonnant puisque ce scénario est celui qui ouvre le plus d’inconnues et de domaines à anticiper. A chaque volet abordé correspond une série de questions à éclairer, auxquelles les acteurs locaux sont appelés à apporter leurs contributions.
Il examine tout d’abord les conséquences juridiques. Il rappelle que la France, conformément à ses engagements, reconnaîtra le nouvel Etat et que s’ouvrira une période de transition, dont la durée sera à fixer par la négociation. « L’accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté impliquera pour ce territoire la fin du bénéfice des traités internationaux conclus par la France. » Il pourra librement en conclure de nouveaux, y compris « un accord d’association avec un autre Etat, dont la France ». Questions posées : « Dans l’hypothèse de l’indépendance, le nouvel Etat cherchera-t-il à conclure un ou des traités de partenariat ou d’association ? Si oui, avec quel(s) pays ? »
Les ressortissants du nouvel Etat perdraient les avantages de la citoyenneté européenne, tels que la libre circulation dans l’espace Schengen. « A quelles conditions le nouvel Etat pourrait-il négocier avec la Commission européenne un accès à l’espace Schengen ? Quelle serait sa politique de visas ? » En ce qui concerne le droit national du nouvel Etat, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) a déposé, en 1987 à l’ONU, un projet de Constitution. « Les acteurs locaux engagés pour l’indépendance se reconnaissent-ils toujours dans [ce] texte constitutionnel ? Une réflexion sur les modalités d’élaboration d’une Constitution est-elle nécessaire avant la troisième consultation ? » Quelles seront les règles d’accès à la nationalité et d’éventuelle acquisition ou conservation de la double nationalité ?
Entre 10 000 et 70 000 intentions de départ
Les conséquences économiques et financières occupent une large place : quelle monnaie pour le nouvel Etat, comment assurer sa solidité, quelles conséquences pour les prix, les patrimoines et la compétitivité de l’économie ? Sur le plan commercial, la Nouvelle-Calédonie « est peu intégrée dans le commerce régional et reste fortement dépendante de l’Hexagone ». Celui-ci est son premier fournisseur de biens, avec 23,5 % des parts de marché et, à la fois, le premier client (61 %) et le premier fournisseur (72 %) de services. Le pays perdra les avantages liés à son statut de pays et territoire d’outre-mer au sein de l’Union européenne.