La décision de l’institution ouvre une voie de recours contre le projet controversé de la Montagne d’Or, aberration environnementale selon les associations.
GUYANE – Le Conseil constitutionnel donne raison aux associations environnementales. L’institution a déclaré ce vendredi 18 février contraire à la Constitution une partie de l’ancien code minier qui permettait de renouveler les concessions minières sans tenir compte des conséquences environnementales, ouvrant une voie de recours contre le projet controversé Montagne d’or, en Guyane.
Cette question prioritaire de constitutionnalité (QPC) avait été renvoyée au Conseil constitutionnel par le Conseil d’État, saisi par l’association France nature environnement (FNE). L’association comptait sur une inconstitutionnalité pour essayer d’empêcher le projet controversé Montagne d’Or.
- L’ancien code minier, dans sa version antérieure à la refonte du fait de la loi Climat du 22 août 2021, permettait que des concessions soient prolongées de droit lorsque les gisements sur lesquels elles portent étaient encore exploités.
Le Conseil constitutionnel a estimé que, concernant cette possibilité donnée aux compagnies minières, “le législateur a méconnu (…) les articles 1er et 3 de la Charte de l’environnement” selon lesquels “chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé”, et “toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences”.
Cette décision s’applique aux dossiers en cours et ceux qui sont encore devant une juridiction, comme celui de la Montagne d’Or. Elle ne s’applique cependant pas aux dossiers définitivement jugés, pour ne pas être rétroactive.
“Il faut savoir que la charte de l’environnement existe depuis 17 ans et c’est la première fois que le Conseil constitutionnel statue sur cet article 1 pour sanctionner une loi qui y est contraire”, s’est félicité Olivier Gourbinot, juriste chez France Nature Environnement, qui précise que cette décision s’applique ”à tous les recours pendants, dont ceux qui concernent Montagne d’or et la concession Boulanger”.
Macron en faveur de l’arrêt du projet minier
Montagne d’Or est le plus grand projet d’extraction d’or primaire jamais proposé en France, porté par le consortium russo-canadien Nordgold-Orea mining (ex-Columbus gold). Le gouvernement le juge “incompatible” avec ses objectifs en matière de transition écologique. Les associations anticipent notamment un déversement de tonnes de cyanure dans la nature guyanaise, une déforestation et des dépenses d’eau et d’énergie démesurées avec ce projet.
A l’occasion du premier Conseil de défense écologique du 23 mai 2019, Emmanuel Macron s’était exprimé en faveur de l’arrêt de ce projet minier.
Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’est ainsi pourvu en cassation devant le Conseil d’État, plus haute juridiction administrative, pour s’opposer à l’obligation, confirmée par la cour administrative d’appel de Bordeaux en juillet 2021, de renouveler rapidement les concessions minières réclamées depuis 2018, et pour une durée de 25 ans, par les promoteurs de Montagne d’or.
Pour Olivier Gourbinot, la décision du Conseil constitutionnel est “une victoire majeure car elle permet de justifier une position politique de l’État qui n’était pas justifiée en droit jusqu’alors”, et “théoriquement le conseil d’État devrait casser l’arrêt de la cour administrative de Bordeaux qui est fondé sur une loi anticonstitutionnelle”.
Selon le juriste de la FNE, si les entreprises Boulanger et Nordgold-Orea mining veulent par la suite demander un renouvellement de leur concession il faudra désormais “qu’ils montrent patte blanche dès le début en disant exactement ce qu’ils vont faire sur les hectares concernés de la forêt guyanaise”.
Source : AFP / Huffingtonpost