— Par Robert Saé
Le naufrage qui, le jeudi 3 octobre, a couté la vie à 350 personnes près des côtes de ‘l’île italienne de Lampedusa a provoqué une émotion planétaire parce que, cette fois là, le drame a connu une très forte médiatisation. Mais ce n’est, hélas, que l’un des tristes épisodes du fléau quotidien qui décime les désespérés des boat peoples. En vingt ans, ce ne sont pas moins de 20.000 migrants qui ont péri en tentant de gagner les rivages de l’Europe. Chaque année, à l’échelle mondiale, des centaines de milliers de personnes*, en quête de moyen de survie ou fuyant des zones de conflit, victimes d’une véritable traite organisée pas des maffias, abandonnent leur pays dans des conditions impensables d’insécurité. C’est ainsi que des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants périssent quotidiennement de manière atroce.
Qu’en disent les gouvernements de cette Europe qui, entre 1846 et 1940, a déversé 51 millions de colons en Amérique, en Australie et en Afrique ? Après avoir jeté quelques larmes de crocodile, ils ressortent les mêmes réponses : L’urgence c’est de développer une politique commune aux frontières de l’Europe ; Le pragmatisme c’est de faire le tri entre les immigrés économiquement rentables qu’on peut tolérer et ceux dont « on ne peut accueillir la misère », qu’il faut impitoyablement renvoyer chez eux. La responsabilité c’est de réprimer ceux qui commettent le délit d’humanité en aidant des miséreux en « situation irrégulière ».
Pourtant, c’est le pillage qu’ils pratiquent dans les pays du sud, les politiques néolibérales qu’ils imposent à ceux-ci, leur soutien à des régimes corrompus, le chaos découlant de leurs agressions militaires, c’est tout cela qui est à la base des migrations en question ; Comble du cynisme, ce sont ces mêmes gouvernements qui créent l’appel d’air par une propagande massive visant à idéaliser leurs pays et leur société. Car, les impérialistes savent pertinemment que les immigrés sont indispensables au maintien de leur suprématie et c’est précisément la situation de non-droit qui rend possible la surexploitation de ceux-ci. Les maîtres et les profiteurs du système sont donc directement responsables des drames horribles qui frappent les migrants. Aussi, au-delà de la sincère compassion que nous pouvons éprouver pour les victimes ou des gestes de solidarité que nous pouvons faire à leur égard, nous devons avoir pleinement conscience qu’on ne saurait mettre fin à de tels crimes contre l’humanité sans s’attaquer aux rapports de domination impérialiste,
*L’ONU évalue à 2,5 millions par an le nombre de personnes qui laissent leur pays.