Lettre ouverte à Monsieur l’Ambassadeur,
Le 8 mai 2017, notre collègue Mathias Depardon, reporter photographe était arrêté à Hasankeyf, en Turquie, lors de la réalisation d’un reportage. Installé depuis cinq ans à Istanbul, il collabore avec des médias occidentaux tels que L’Obs, Le Monde, The New York Times ou encore le magazine National Geographic. Les syndicats français de journalistes (SNJ, SNJ-CGT, CFDT-Journalistes), membres de la Fédération internationale des journalistes (FIJ), première organisation mondiale de la profession, et de son groupe régional européen (FEJ), ont appris avec consternation son arrestation et son incarcération depuis cette date, malgré une décision d’expulsion en date du 11 mai. Un mois plus tard, la procédure d’expulsion administrative n’est toujours pas appliquée. Pourquoi ? Lors d’un entretien en marge d’un sommet de l’Otan à Bruxelles, le président, Recep Tayyip Erdogan, a, selon l’Élysée, affirmé au président de la République, Emmanuel Macron « qu’il examinerait rapidement sa situation ». Tout récemment, M. Macron a de nouveau demandé « le plus vite possible » le retour en France de Mathias Depardon. Du 21 mai au 27 mai, il avait entamé une grève de la faim pour attirer l’attention sur son sort et obtenir sa libération. Les comités de soutien, français et belge, les syndicats de journalistes et les Fédérations internationale et européenne, de nombreuses ONG qui se sont constitués autour de Mathias Depardon, détenu au centre de rétention de Gaziantep, expriment leur totale solidarité avec ce confrère qui aurait eu le tort de disposer d’une carte d’accréditation non renouvelée par les autorités turques. L’accusation de propagande terroriste est-elle suspendue par le ministère de la Justice ou abandonnée comme l’indiquent certaines sources en France ? Pourquoi, malgré toutes ces interventions -y compris au sommet- et cette grève de la faim les autorités turques font-elles la sourde oreille en maintenant ce journaliste sous les verrous ? Avec cet emprisonnement, la Turquie se sert-elle du cas Mathias Depardon pour faire taire toutes les questions que posent la rétention et la mise à l’écart de 156 journalistes turcs et kurdes dont beaucoup sont détenteurs de cartes de presse et d’accréditation ? Les syndicats de journalistes français considèrent que cette détention est en soi une violation de la déclaration des droits de l’Homme et qu’elle constitue une entrave au libre exercice du journalisme, une atteinte à la liberté syndicale, à la liberté d’expression. Pour toutes ces raisons, les syndicats de journalistes français Snj, Snj-Cgt, Cfdt Journalistes demandent aux autorités turques : – la libération immédiate de Mathias Depardon, – le respect de la Charte européenne en matière de liberté d’expression, – la garantie pour les journalistes étrangers de pouvoir exercer librement leur métier sur le sol turc.
Recevez, Monsieur l’Ambassadeur, l’assurance de nos sentiments respectueux.
SNJ, SNJ-CGT, CFDT-Journalistes