Par Sébastien Le Fol
Si l’on en croit les arbitres des élégances littéraires, l’affaire DSK aurait accouché d’un écrivain : Marcela Iacub. Le livre de cette brillante juriste, Belle et bête, oscillerait entre La métamorphose de Kafka et Truismes de Marie Darrieussecq, ce qui laisse de la marge tout de même. Alertés par ces grognements de joie, nous avons à notre tour plongé le groin dans cette porcherie. Est-ce de l’art ou du cochon ? Rien de tout ça. Ce n’est pourtant pas le mascara (que le personnage du livre aime goûter sur les yeux de sa partenaire) qui nous aveugle. L’auteur retranscrit ici son « expérience » dans un style plat et insipide. Pour filer sa métaphore, Marcela Iacub écrit comme un gland. Afin d’épater la galerie médiatique, elle a emballé cet amas informe de fantasmes et de réalités dans un concept choc : le cochon. « Quel génie ! Quelle originalité ! », s’égosille la meute. Rien n’est bon dans ce cochon-là. Le récit ne s’élève jamais au dessus de l’autoanalyse de comptoir, comme le montre bien Florent Georgesco dans sa critique du Monde. Le plus incroyable dans cette histoire est la prétention délirante de son auteur : elle voudrait ni plus ni moins sauver son cochon. Sainte Marcela priez pour nous ! Certains en feraient volontiers une nouvelle Sainte Blandine. Contre cette impie, Christine Angot a sorti ses griffes. « Non, non, non et non », elle ne veut pas être comparée à elle. Ah oui ? Et son livre inspiré de sa liaison avec Doc Gynéco, c’était quoi ? L’affaire Iacub, qui avait des airs de salon de l’agriculture, vire au bal des hypocrites. Les tribunes indignées fleurissent avant le printemps. L’une d’elles appelle à la moralisation de l’édition. La rive gauche est en feu. Gauche morale et gauche libertaire sont à couteaux tirés. Paris, en ce moment, c’est le porc de l’angoisse. Feu sur Le Nouvel Observateur rebaptisé « Le nouveau voyeur ». DSK interpelle Jean Daniel : « L’ancien « grand journal de la conscience de gauche » vient de sombrer dans une opération qui donne la nausée». Albert Camus, réveille-toi, ils sont devenus fous! Observant ce beau monde se vautrer dans la fange, on songe à deux phrases de lui. L’une est tirée de La Peste : « la bêtise insiste toujours ». L’autre, de ses Carnets : « Celui qui désespère des évènements est un lâche, mais celui qui espère en la condition humaine est un fou ».
A propos du blog de Sébastien Le Fol
Tous les jours, au Figaro, j’orchestre les pages culturelles. Expositions, films, spectacles, livres, programmes de télévision, polémiques….tout ce qui fait l’actualité, mais aussi tout ce qui façonne l’air du temps, m’inspire des réflexions professionnelles et personnelles. Ce blog se veut autant un journal « off » d’après bouclage qu’un décryptage des idées et des attitudes en vogue aujourd’hui.
le 25 février 2013