— Par Robert Berrouët-Oriol, Linguiste-terminologue —
Le romancier et poète Louis-Philippe Dalembert, que les lecteurs du National avaient (re)découvert dans l’entretien qu’il a accordé le 8 septembre 2020 à notre collaborateur Robert Berrouët-Oriol (« Entrevue avec Louis-Philippe Dalembert pour saluer la parution de « Cantique du balbutiement » (poésie) », est l’invité au premier semestre 2021 de la Chaire d’écrivain en résidence au prestigieux Centre d’écriture et de rhétorique de Sciences Po à Paris. L’annonce de cette résidence, qui vient de paraître sur le site de Sciences Po Paris, marque une étape importante dans l’élaboration de l’œuvre de l’écrivain. Après Kamel Daoud, Marie Darrieussecq, Patrick Chamoiseau et Maylis de Kerangal, Louis-Philippe Dalembert est le cinquième auteur à rejoindre Sciences Po comme titulaire de la Chaire d’écrivain invité.
Fondé en 1872, l’Institut d’études politiques de Paris, communément appelé Sciences Po, est un grand établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel dans les domaines des sciences humaines et sociales, notamment le droit, l’économie, l’histoire, la sociologie et la science politique. Jouissant d’un énorme prestige dans l’enseignement supérieur en France et à l’international, Sciences Po est également connu comme vivier de formation de la haute fonction publique française. La formation offerte attire chaque année un nombre relativement important d’étudiants étrangers et elle s’étend de la licence au doctorat. Sciences Po est en partenariat avec 470 universités du monde entier, y compris des institutions universitaires de renom comme l’Université de New York.
Tel que précisé sur le site de Sciences Po Paris, la Chaire d’écrivain en résidence, créée en 2019, permet chaque année à deux écrivains de venir partager leur approche, leur vision, leur expérience, complétant ainsi l’offre du Centre d’écriture et de rhétorique de Sciences Po, qui est aussi un lieu d’accueil et de rencontre pour des écrivains du monde entier, qui interviennent lors de conférences ou de « masterclass » : Roberto Saviano, Jonathan Coe, Souleymane Bachir Diagne, Nicolas Mathieu, Christophe Ono-dit-Biot, Pierre Assouline, Ken Follett, Kate Mosse, Jojo Moyes, Lee Child, Isabelle Carré… Une fois à Sciences Po, les écrivains en résidence sont impliqués dans différentes activités : l’exposé inaugural, au cours duquel le titulaire sortant accueille le titulaire entrant, et des cours d’écriture créative ouverts à tous les étudiants, quelle que soit leur année ou leur programme d’étude. Les titulaires participent enfin à un cycle de « master class » sur les sept campus de Sciences Po.
Écrivain haïtien d’expression française et créole, Louis-Philippe Dalembert, a travaillé comme journaliste en Haïti avant poursuivre ses études à l’Université Paris-III – Sorbonne nouvelle où il obtient un doctorat en littérature comparée sur l’œuvre de l’écrivain cubain Alejo Carpentier. Professeur invité dans des universités américaines et suisses, écrivain en résidence à Rome, Jérusalem ou Berlin, il a publié depuis 1993 une vingtaine de romans, essais, nouvelles et de la poésie. Louis-Philippe Dalembert vit aujourd’hui entre Berlin, Paris et Port-au-Prince. Il a été fait Chevalier de l’Ordre des arts et des lettres en 2010, et a obtenu en 2019 le Prix de la langue française.
Son roman « Mur Méditerranée », tragédie sur l’immigration parue en 2019, lui a valu de nombreux prix (dont deux Choix Goncourt) et une nomination parmi les romans du Prix littéraire des étudiants de Sciences Po. Pour le premier semestre 2021, Louis-Philippe Dalembert succède à Maylis de Kerangal comme titulaire de la Chaire d’écrivain en résidence du Centre d’écriture et de rhétorique de Sciences Po. L’auteur haïtien a écrit une vingtaine de romans et recueils de nouvelles ou de poésie.
Poète, romancier, nouvelliste et essayiste, Louis-Philippe Dalembert est en effet l’artisan d’une œuvre littéraire riche et variée. Il a entre autres publié les romans « L’autre face de la mer », Paris, Stock, 1998 ; réédition, Paris, Le Serpent à Plumes, coll. « Motifs » ; réédition, Port-au-Prince, Éditions des Presses nationales, 2007 ; réédition, Alger, Apic, 2009 ; réédition, Port-au-Prince, C3 Éditions, 2014 ; « Les dieux voyagent la nuit », Paris/Monaco, éditions du Rocher, 2006 ; réédition, Port-au-Prince, C3 Éditions, 2014 ; « Mur Méditerranée », Paris, Sabine Wespieser éditeur, 2019 ; « Epi oun jou konsa tèt Pastè Bab pati », Port-au-Prince, Éditions des Presses nationales, 2007. La poésie de Louis-Philippe Dalembert comprend notamment « Ces îles de plein sel et autres poèmes », Paris, Silex/Nouvelles du Sud, 2000 ; « Poème pour accompagner l’absence », Paris, Agotem, no 2, Obsidiane, 2005 ; réédition, Mémoire d’encrier, Montréal, 2005 ; « En marche sur la terre », Paris, Éditions Bruno Doucey, 2017. Parmi les nombreux prix reçus par Louis-Philippe Dalembert, il y a lieu de mentionner le Prix Casa de las Américas pour le roman « Les dieux voyagent la nuit », Cuba, 2008 ; le Prix Orange du livre 2017 Prix France Bleu/Page des libraires pour « Avant que les ombres s’effacent » ; le Prix de la langue française 2019 pour « Mur Méditerranée ». Le jury du Prix de la langue française est composé de membres de l’Académie française, de l’Académie Goncourt et d’autres écrivains. Auparavant pensionnaire de la prestigieuse Villa Médicis à Rome (1994-1995), Louis-Philippe Dalembert est l’auteur d’une remarquable préface du livre de poésie d’Anthony Phelps, « Au souffle du vent poupée » illustré par Geneviève Lahens, peintre et architecte, paru début 2018 aux Éditions Bruno Doucey. Dernier titre de l’auteur : « Cantique du balbutiement », Éditions Bruno Doucey, septembre 2020.
Louis-Philippe Dalembert est le second écrivain haïtien à occuper une chaire d’écrivain en résidence en France dans une institution d’enseignement supérieur de très grande renommée internationale. On se souviendra que Yanick Lahens a été la première titulaire de la Chaire Mondes francophones créée par le Collège de France avec l’Agence universitaire de la Francophonie, l’AUF. Elle a prononcé le 21 mars 2019 sa conférence inaugurale qu’on peut retrouver sur le site du Collège de France. L’enseignement de Yanick Lahens au Collège de France est consigné dans le livre « Littérature haïtienne : urgence(s) d’écrire, rêve(s) d’habiter » (Éditions Collège de France / Fayard, 2019). Le linguiste Hugues Saint-Fort a fait une remarquable recension de ce livre dans l’édition du 20 octobre 2020 du journal Le National.
Le site franceculture.fr comprend un intéressant parcours biobibliographique sur Louis-Philippe Dalembert : « Louis-Philippe Dalembert est un écrivain d’expression française et créole. Fils d’une institutrice et d’un directeur d’école, Louis-Philippe Dalembert est né à Port-au-Prince le 8 décembre 1962. Le décès du père, quelques mois après sa naissance, a des conséquences dramatiques sur la situation matérielle de la famille. Les premières années de son enfance, il grandit ainsi au Bel-Air, un quartier populaire de la capitale, dans un univers entouré de femmes : les cousines de sa mère, qui s’absente la semaine pour enseigner en province, sa sœur aînée, ses grand-tantes et sa grand-mère maternelle. Cette dernière mène son petit monde à la baguette, dans un Port-au-Prince que dirige d’une poigne de fer François Duvalier. À l’âge de six ans, il connaît la première grande séparation de sa vie : la famille laisse le quartier pour s’installer ailleurs. Il en tirera un roman intitulé « Le crayon du bon Dieu n’a pas de gomme », trace d’une enfance très religieuse placée sous le signe du sabbat. De formation littéraire et journalistique, Dalembert travaille comme journaliste d’abord dans son pays natal avant de partir en 1986 en France poursuivre des études qu’il achève à l’université de Paris III – Sorbonne Nouvelle par un doctorat en littérature comparée sur l’écrivain cubain Alejo Carpentier. Dalembert vit aujourd’hui entre Berlin, Paris et Port-au-Prince. »
Montréal, le 11 janvier 2021