L’Origine de la radicalisation politique en Outre-Mer : Analyse et décryptage !

— Par Jean-Marie Nol, économiste —

L’expression d’un malaise profond se fait de plus en plus ressentir dans les régions d’outre-mer françaises, notamment en Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion, Polynésie et Nouvelle-Calédonie. Les causes de ce malaise sont multiples, mais elles trouvent leur origine principalement dans une société en mutation, une insatisfaction politique, une économie déséquilibrée, une violence en hausse et une gestion controversée de l’immigration. Ainsi un récent incident au large de Bouillante en Guadeloupe, où un voilier transportant 29 clandestins haïtiens a été arraisonné, soulève des questions sur la politique d’immigration en France. Malgré les efforts des autorités pour expulser les migrants, des obstacles juridiques ont retardé le processus, suscitant ainsi le mécontentement de la population locale.

Le mécontentement généralisé concernant la politique gouvernementale, notamment la question de la rigueur budgétaire inhérente à la crise de la dette, la réforme de l’assurance chômage qui fragilise les jeunes et les personnes les plus précaires, ajoute à la tension sociale. Les discours politiques promettent des changements, mais la réalité persiste dans un déni de l’injustice structurelle. Il est impératif de s’attaquer au cœur du problème : la structure par trop déséquilibrée de l’économie. Et le temps presse car déjà les sondages sur les élections européennes montrent une forte poussée du vote en faveur des extrêmes dans l’ensemble des territoires d’outre-mer et notamment en Guadeloupe, Guyane et  Martinique où le vote extrême semble faire une très grosse percée. En somme, la radicalisation politique dans les régions d’outre-mer est souvent le résultat d’une combinaison de facteurs socio-économiques, historiques, culturels et institutionnels. Pour répondre à ces défis, il est essentiel de comprendre les causes profondes de la radicalisation et le vote en forte croissance d’extrême droite et gauche. Il y a plusieurs facteurs qui contribuent à la radicalisation politique dans les régions d’outre-mer, à l’instar de ce qui se passe actuellement en Nouvelle-Calédonie. Voici quelques explications possibles : 

1) Sentiment d’abandon et de marginalisation : Les régions d’outre-mer ont souvent le sentiment d’être négligées par le gouvernement central en France. Ce sentiment d’abandon peut conduire à un mécontentement croissant envers les institutions traditionnelles et à une recherche de solutions radicales.

2)Problèmes socio-économiques persistants : Les régions d’outre-mer font face à des défis socio-économiques importants tels que le chômage élevé, la pauvreté, les inégalités sociales et la vie chère. L’incapacité des gouvernements successifs à résoudre ces problèmes renforce le désir de changement radical.

3)Gestion controversée de l’immigration : Les questions liées à l’immigration, comme le contrôle des flux migratoires et la gestion des demandeurs d’asile, peuvent susciter des tensions au sein de la population. Les politiques d’immigration perçues comme inefficaces ou injustes peuvent contribuer à la montée de mouvements politiques radicaux.

4)Histoire coloniale et identité culturelle : L’héritage colonial et l’identité culturelle distincte des régions d’outre-mer peuvent également jouer un rôle dans leur radicalisation politique. Certains groupes peuvent se tourner vers des idéologies radicales en réaction à la domination historique ou en tant que moyen de revendiquer une identité culturelle spécifique.

5)Défiance envers les institutions traditionnelles : La perception de corruption, d’injustice et de dysfonctionnement au sein des institutions traditionnelles peut conduire à une perte de confiance dans le système politique existant. Dans ce contexte, les partis politiques traditionnels peuvent être perçus comme inefficaces ou compromis, ce qui ouvre la voie à des mouvements radicaux.

Alors pour faire face à cette tentation de radicalisation, des actions concrètes sont nécessaires pour transformer le modèle économique actuel en un système inclusif et équitable, répondant aux besoins de la population guadeloupéenne si l’on veut éviter la montée des tensions . En réalité, la Guadeloupe doit s’engager dans une réforme économique profonde pour un avenir plus juste et prometteur.Continuer à se focaliser sur un changement des institutions relève de l’hérésie et de la malhonnêteté intellectuelle, alors même que la responsabilité de la vie chère, du mal développement, et du mal être identitaire, incombe pour l’essentiel à la structure de consommation déséquilibrée d’une économie dite de comptoir .

L’assemblée unique voulue par certains élus en Guadeloupe est une supercherie, alors de plus le maintien de deux assemblées s’impose  en l’état . Comment croire que des politiciens incapables de gérer des compétences actuellement dévolues, pourront assumer une véritable autonomie d’un territoire, dans la diversité et la complexité de ses attributions. Derrière le dessous des cartes se cache l’éternel serpent de mer de l’autonomie étape vers une indépendance à contenu  indéfinissable . C’est à dire tout sauf dans un proche immédiat l’intérêt économique et financier véritable de la Guadeloupe . L’exemple de la nouvelle Calédonie en proie à de graves troubles de type insurrectionnel trouve à raison un très fort écho et un encouragement à la résistance contre l’oppression dans tous les pays de l’outre-mer. C’est l’infrastructure de l’économie qu’il faut modifier à l’aide d’un nouveau modèle économique et social qui devrait tendre à l’érection d’une économie de production. Malgré les engagements réitérés des autorités françaises, la réalité persistante d’une économie de type monopolistique continue d’étouffer les aspirations locales à la responsabilité politique et à la prospérité économique

Les régions d’outre-mer, traditionnellement orientées vers des idéaux de gauche sociale, luttent depuis des décennies contre les entraves de leurs économies néolibérales, héritage du régime post-colonial.La focalisation excessive sur les réformes institutionnelles est critiquée par bon nombre de citoyens, car elle néglige l’urgence de transformer l’infrastructure économique elle-même. Les promesses de promotion des cadres supérieurs locaux restent souvent vaines, laissant un sentiment d’exclusion et d’injustice parmi la population.

La montée de la radicalisation politique dans ces régions découle donc en partie des erreurs de l’administration française et des dérapages de la part de certains citoyens métropolitains. Cette situation alimente un mal-être identitaire croissant et renforce les tensions sociales et surtout sociétales. Pour répondre à ces défis, des actions concrètes doivent être entreprises. Un nouveau modèle économique et social, axé sur l’inclusion et l’équité, est nécessaire pour assurer un avenir plus juste et prometteur pour les régions d’outre-mer. Cela nécessite un engagement réel du gouvernement français à s’attaquer aux racines du problème, plutôt que de simplement promettre des réformes institutionnelles superficielles.Le débat autour de la « main invisible »de l’économiste Adam Smith met en lumière les failles du libéralisme économique dans un contexte de libre échange néocolonial . En se concentrant uniquement sur les changements institutionnels, on ignore l’impératif de modifier l’infrastructure économique elle-même. Les régions d’outre-mer doivent également être impliquées dans le processus décisionnel de l’octroi de mer, ainsi qu’une prise en compte d’une évolution politique avec le maintien de deux assemblées en Guadeloupe et une réelle opportunité législative à travers des lois spécifiques adaptées à leurs réalités dans le cadre du droit commun de l’article 73 de la constitution. Il est impératif que les promesses politiques se traduisent en actions tangibles pour répondre aux besoins et aux aspirations des populations des DROM TOM..Dans cette optique, une franche collaboration étroite entre les responsables politiques locaux et le gouvernement français est essentielle pour surmonter les défis actuels et construire un avenir meilleur pour tous.

Jean-Marie Nol, économiste