Lois anti-terroristes : le cri des hauts magistrats

liberte_expressionIl est rare que les hauts magistrats sortent de leur sacro-saint droit de réserve et de leur légendaire prudence. Leur initiative est donc suffisamment rare pour être soulignée. Dans un texte commun rédigé jeudi 14 janvier, la conférence des premiers présidents de cour d’appel s’alarme contre les dispositions anti-terroristes que la garde des Sceaux Christiane Taubira doit porter dans les toutes prochaines semaines dans son projet de loi contre la criminalité organisée.

Délibération adoptée par la conférence des premiers présidents le 14 janvier 2016.

Dans un pays tragiquement endeuillé et attaqué dans ses fondements démocratiques les plus précieux, l’autorité judiciaire doit, plus que jamais, assumer le rôle et laplace qui lui sont reconnus par la Constitution.

Il est essentiel que le juge judiciaire retrouve l’intégralité de ses fonctions premières de garant des libertés individuelles, notamment de contrôle des mesures d’enquêtes et de privation des libertés.

Les premiers présidents rappellent que c’est dans toutes ses composantes, civiles aussi bien que pénales, que l’institution judiciaire contribue à la paix sociale et au mieux vivre ensemble, indispensables à la prévention de toutes les formes de dérives.

La France ne saurait sacrifier les valeurs fondamentales de sajustice, au motif qu’un manque cruel et ancien de moyens l’a affaiblie.

Un projet de loi du Gouvernement, en cours d’élaboration,renforçant la lutte contre le crime organisé et son financement, l’efficacité et les garanties de la procédure pénale, contient des dispositions dangereuses pour les libertés et gravement contraires auxdroits de l’homme.

Par exemple, ce texte permettrait :

-l’assignation à résidence par l’autorité préfectorale pourdes motifs imprécis et sans autorisation ni contrôle du juge judiciaire,
-l’extensionjuridiquement inutile, au regard des critères actuels de la légitime défense, de l’usage des armes par les forces armées et de sécurité intérieure, – des perquisitions de nuit dans les domiciles par les forces de police, en enquête préliminaire, hors flagrant délit,
– des retenues,à l’initiative de l’autorité préfectorale, créant une garde à vue administrative.

Les attributions nouvelles créées par ce projet aggravent l’évolution déjà constatée remettant en cause la place essentielle du juge judiciaire dans la protection des libertés individuelles, tout particulièrement lorsque l’état de droit est menacé.constituent un transfert de Elles compétence de l’autorité judiciaire vers l’autorité administrative, dans la dépendance de l’exécutif, incompatible avec le principe de la séparation des pouvoirs, fondement de la démocratie.

L’Obs