La Martinique est confrontée à un défi de taille en matière d’illettrisme, une problématique qui prend une ampleur préoccupante au sein de sa population. Alors que les 10èmes journées nationales d’action contre l’illettrisme débutent le 8 septembre, il est crucial de se pencher sur cette réalité alarmante qui touche un grand nombre de Martiniquais.
Selon une enquête de l’Insee réalisée en 2014, 13% de la population adulte martiniquaise âgée de 16 à 65 ans se trouve en situation d’illettrisme. Pour mieux comprendre l’impact de ce chiffre, il est important de noter qu’il représente environ 30 000 individus au sein de la population de l’île, qui s’élève à environ 400 000 habitants. Ces 30 000 Martiniquais rencontrent des difficultés substantielles en lecture, en écriture, et en compréhension de textes simples. Cette proportion est deux fois plus élevée que la moyenne nationale, ce qui met en évidence l’ampleur de ce problème dans cette région.
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Un examen plus approfondi de la situation révèle également des disparités de genre. Les hommes sont plus touchés par l’illettrisme que les femmes, avec un taux d’illettrisme de 17% chez les hommes, contre 10% chez les femmes. Cette disparité soulève des questions sur les facteurs sociaux et culturels qui peuvent contribuer à cette différence de taux entre les sexes.
Par ailleurs, l’illettrisme a des répercussions significatives sur l’emploi. Parmi les demandeurs d’emploi, déjà vulnérables sur le marché du travail, 22% sont confrontés à des lacunes en lecture et en écriture qui entravent leur recherche d’emploi. Cette situation accentue le cercle vicieux de la précarité et de l’illettrisme, rendant plus difficile pour les individus de sortir de cette impasse.
Un autre aspect révélateur de la situation est le taux d’illettrisme parmi les ouvriers non qualifiés, qui représentent une part substantielle de la main-d’œuvre martiniquaise. Ce groupe affiche un taux alarmant de 38% d’illettrisme. Ces ouvriers, souvent en première ligne dans des emplois essentiels, sont confrontés à des défis considérables dans leur vie quotidienne en raison de leurs difficultés en lecture et en écriture.
Bien que des améliorations aient été notées depuis 2006, le problème persiste et nécessite des actions continues et adaptées. C’est ici qu’interviennent des associations locales telles les ateliers ABC de la Croix-Rouge ou La Maison ducossaise du savoir, qui se mobilisent pour répondre à ce défi complexe. Ces associations proposent des formations sur mesure, adaptées aux besoins individuels des stagiaires, visant à améliorer leur maîtrise de la lecture et de l’écriture.
L’approche personnalisée de ces formations est cruciale, car elle permet aux participants de progresser à leur rythme, en comblant les lacunes spécifiques qu’ils peuvent avoir en lecture et en écriture. Ces compétences fondamentales sont essentielles pour la vie quotidienne, allant de la simple lecture d’un panneau de signalisation à la rédaction d’un CV pour une recherche d’emploi. De plus, ces compétences sont la clé pour l’obtention du permis de conduire, un objectif important pour de nombreux participants.
Cependant, la lutte contre l’illettrisme ne se limite pas à l’acquisition de compétences en lecture et en écriture. Les associations s’attaquent également à l’« illectronisme », qui désigne le manque de compétences en informatique. Dans un monde de plus en plus numérique, ces compétences sont devenues essentielles pour la participation à la société moderne. Ces associations offrent donc des formations visant à combler ces lacunes en informatique, permettant ainsi aux Martiniquais d’acquérir des compétences numériques indispensables.
En parallèle de l’acquisition de compétences pratiques, ces associations jouent un rôle crucial dans le soutien psychologique et social des participants. Ils sont rassurés, encouragés et rappelés qu’ils ne sont pas en marge de la société, mais qu’ils ont simplement besoin de temps et de soutien pour développer leurs compétences.
Il est intéressant de noter que l’un des stagiaires participant à une formation de cette semaine est un homme d’une soixantaine d’années qui aspire à obtenir son permis de conduire. Les formateurs adoptent une approche innovante en adaptant le contenu de la formation aux besoins individuels des participants. Par exemple, lors de l’apprentissage de la lecture, des textes liés au code de la route sont utilisés, ce qui maintient l’intérêt des apprenants et les implique activement dans le processus d’apprentissage.
En fin de compte, l’illettrisme en Martinique reste un défi majeur qui affecte de nombreuses vies au quotidien. Cependant, des actions concrètes sont entreprises pour lutter contre ce fléau en offrant des formations personnalisées et en encourageant le développement continu des compétences en lecture, écriture et informatique pour tous les Martiniquais. En investissant dans l’éducation et la formation, la Martinique peut espérer un avenir où l’illettrisme ne sera plus un obstacle à la réalisation du potentiel de sa population.
Les ateliers ABC de la Croix-Rouge se tiennent à l’ancienne école primaire de Debriant (impasse Franck-Arnolin, à Fort-de-France), les mardis de 14h à 16h et les jeudis de 10h à 12h. Renseignements : 0596 73 85 13/0596 96 30 54
La Maison ducossaise du savoir qui est située rue Pauline-de-Kergomard, au bourg de Ducos, propose des cours les lundis et vendredis de 7h à 10h et de 10h à 12h, et les mardis et jeudis de 18h à 20h. Renseignements : 0596 60 22 58