L’îlet à Ramiers, ou îlet Ramiers, est une petite île volcanique de 3 hectares située au sud de la baie de Fort-de-France, au large de la commune des Trois-Îlets en Martinique. Culminant à 43 mètres d’altitude, cet îlet de forme conique présente une physionomie spectaculaire, avec des flancs abrupts sur trois côtés et une petite anse sablonneuse à son extrémité méridionale. D’origine volcanique, cet îlot fait partie des coulées de lave massive et retombées de scories formées il y a plusieurs centaines de milliers d’années, ce qui en fait un lieu d’intérêt géologique unique.
Historiquement, l’îlet à Ramiers occupe une place centrale dans le système défensif de la baie de Fort-de-France. Il servait de premier rempart dans un réseau fortifié qui comprenait plusieurs autres places fortes stratégiques : le fort Saint-Louis à Fort-de-France, le fort Desaix, le fort Tartenson et le fort d’Alet. Sa position en première ligne en faisait un point stratégique essentiel pour la défense de la Martinique, particulièrement lors des conflits coloniaux et des incursions étrangères. Les Anglais, lors de leurs campagnes en mer des Caraïbes, surnommaient l’îlet « Pigeon Island » en référence au pigeon ramier, une espèce d’oiseau locale qui a donné son nom à l’îlet.
La fortification de l’îlet à Ramiers débute au XVIIIe siècle. À l’origine simple batterie militaire jusqu’en 1728, un projet ambitieux de fortification voit le jour entre 1740 et 1746. Cependant, le développement rapide de l’artillerie de l’époque rendra rapidement ce fort dépassé, et les travaux ne seront réalisés que partiellement. Malgré cela, le fortin de l’îlet à Ramiers conservera une importance stratégique jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, période durant laquelle il sera encore utilisé pour la défense maritime.
Le fort, aujourd’hui en ruines, s’étend sur le plateau sommital de l’îlet et témoigne de l’ingénierie militaire de l’époque. Il se compose de plusieurs bâtiments, notamment une caserne formée de casemates et de sanitaires, des magasins à poudre, un atelier, deux citernes et des terrasses de tirs en arc de cercle. L’accès au fort se fait par un escalier très abrupt, seul passage pour atteindre la caserne, qui forme le cœur de l’enceinte fortifiée. Ces vestiges, bien que partiellement délabrés, demeurent lisibles et laissent imaginer la vie des militaires qui y étaient stationnés.
Après la Seconde Guerre mondiale, l’îlet est abandonné par l’armée française et devient en 2010 la propriété du Conservatoire du Littoral, qui en fait un site naturel protégé. En raison de la dégradation de certaines structures et de la prolifération de la végétation, l’accès au public est aujourd’hui restreint pour des raisons de sécurité. Toutefois, des travaux de sauvegarde sont prévus pour restaurer les ruines tout en préservant le caractère authentique du site. L’entretien ponctuel est assuré par l’association Karisko, qui œuvre à la valorisation et à la réappropriation du patrimoine culturel martiniquais. Cette association organise également des actions bénévoles et des projets d’insertion autour de l’entretien de l’îlet.
L’îlet à Ramiers se distingue également par sa biodiversité remarquable. En 2010, une colonie d’iguanes des Caraïbes (Iguana delicatissima) y a été introduite dans le cadre d’un programme de protection des espèces. Ces iguanes, menacés d’extinction, bénéficient désormais d’un arrêté de protection de biotope pour assurer leur conservation. En plus des iguanes, la faune terrestre de l’îlet comprend principalement des lézards (anolis), des crustacés tels que les crabes zagayacs, touloulous et krab tè, ainsi qu’une diversité d’insectes, notamment le pou-bois. L’îlet est également un refuge pour plusieurs espèces d’oiseaux, dont des pipiris, des grives des savanes, des colibris huppés et des sucriers, tous répertoriés parmi les espèces protégées.
Du côté de la flore, l’îlet à Ramiers présente une grande diversité végétale. Sa physionomie arborée est dominée par une végétation typique des zones côtières. Sur la façade est, on trouve des mapous, des poiriers, des côtelettes, des grand-cosmaya (Crateva tapia), ainsi que des tamariniers bâtards, des bois-vinette (Erythroxylum brevipes) et des savonnettes bois. Autour du fortin, la végétation est plus clairsemée, mais on y observe la présence d’un majestueux fromager qui témoigne de la résilience de cet écosystème face aux conditions parfois rudes.
Malgré les restrictions d’accès pour protéger cet espace, l’îlet à Ramiers fait l’objet de projets de valorisation touristique. Le Conservatoire du Littoral envisage de développer des activités d’écotourisme respectueuses de l’environnement, avec des visites thématiques abordant l’histoire militaire de l’îlet, ses particularités géologiques et sa biodiversité. Une étude menée en 2017 a permis d’établir un plan d’aménagement basé sur l’état des lieux du fort en 1864. Le projet prévoit la conservation des ruines, l’installation d’un nouveau ponton pour faciliter l’accès des visiteurs, ainsi que la construction d’un kiosque d’accueil pour gérer les flux touristiques. Les visites, limitées à environ 200 à 250 personnes simultanément, permettront aux visiteurs de découvrir le fort et ses alentours à travers des parcours scénographiés dans les anciens logements d’officiers, les casemates et les cuisines du fort.
Ce projet ambitieux vise à préserver le patrimoine naturel et historique de l’îlet tout en offrant une opportunité unique aux visiteurs de s’immerger dans l’histoire fascinante de la Martinique. Grâce à ces efforts de conservation et de mise en valeur, l’îlet à Ramiers continuera de témoigner de la riche histoire militaire de l’île et de sa biodiversité exceptionnelle, tout en restant un site emblématique de l’écotourisme en Martinique.
Pour visiter s’adresser à l’Association Karisko