— Par Jean-Baptiste Mouttet —
Elle est l’un des fers de lance de l’opposition à Nicolás Maduro. L’ancienne procureure générale du Venezuela, Luisa Ortega Díaz, attaque le président vénézuélien par le flanc judiciaire. Dénonçant le non-respect des droits de l’homme, décrivant un pouvoir corrompu, elle souhaite l’arrestation du président vénézuélien, dans un entretien à Mediapart.
est une des dissidences qui a le plus ébranlé le gouvernement de Nicolás Maduro. Luisa Ortega Díaz était procureure générale de la République du Venezuela depuis 2007 et perçue comme un pilier du pouvoir chaviste. Le 31 mars 2017, cette image vole en éclats. Alors qu’elle présente son bilan annuel, elle dénonce une « rupture de l’ordre constitutionnel ».
En cause ? La décision du Tribunal suprême de justice (TSJ) [la Cour suprême, aux mains de l’exécutif – ndlr] de priver l’Assemblée nationale de ses compétences et les députés de leur immunité. Malgré le rétropédalage de la Cour, l’Assemblée nationale, où l’opposition est majoritaire, est demeurée une coquille vide. Le pays vivait alors des manifestations quotidiennes contre l’autoritarisme de Maduro.
Luisa Ortega Díaz s’opposait elle-même à l’élection de l’Assemblée nationale constituante (ANC) du 30 juillet 2017. Avec son équipe du ministère public qu’elle dirigeait, elle dénonçait la répression des forces de l’ordre durant ces mobilisations qui ont fait au moins 125 morts. Le 5 août, elle est destituée de ses fonctions par l’Assemblée constituante et trouve refuge en Colombie deux semaines plus tard.
Elle estime toujours être la procureure générale légitime du Venezuela et a présenté les preuves de la compromission du président vénézuélien dans l’affaire Odebrecht devant le Tribunal suprême du justice en exil. Ce tribunal a condamné Nicolás Maduro à 18 ans et trois mois de prison pour corruption. Elle a dénoncé à diverses reprises la violation des droits de l’homme dans son pays devant la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye.
De son côté, Maduro a peu répondu aux accusations de l’ancienne procureure. En avril 2018, alors que se déroulait le procès convoqué par le Tribunal suprême de justice en exil, en Colombie, il déclarait ne pas vouloir « perdre du temps avec des gens qui vivent à Bogotá ». Et d’insister : « Ces gens peuvent se déclarer président des États-Unis. […] Ils fuient la justice. Un jour, ils tomberont aux mains de la justice vénézuélienne. »
En février dernier, la CPI ouvrait un « examen préliminaire », afin d’enquêter sur les « crimes commis dans cet État ». Qualifiée de traître par les maduristes, respectée à l’étranger, Luisa Ortega Díaz continue inlassablement de décocher des flèches contre celui qu’elle nomme « le tyran ».
Entretien. => Mediapart