— Par Ali Babar Kenjah —
Le Pdt E. Macron va jouer son sort et celui de la France sur sa prochaine intervention. Focalisant sur lui toutes les attentions, il peut potentiellement retourner la situation à son avantage. Il joue donc ce soir à quitte ou double. Quitte, comme lui susurre certains gilets jaunes ; ou double comme la double peine infligée par un régime dos au mur, qui refuse de se réformer et prolonge son agonie, à qui on demande du rêve… Quel que soit le lapin qui sortira du chapeau présidentiel, E. Macron sera considérablement fragilisé par cette séquence « Gilets Jaunes ». Son jeu présidentiel a aimanté les rancœurs, il a personnifié la colère populaire jusqu’au lynchage carnavalesque sur les réseaux sociaux. Cette descente aux enfers du dieu de l’Olympe résulte, en réalité, d’un triple échec de la stratégie macronienne.
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L’échec du « en même temps », dernier espoir de la social-démocratie libérale. La percée foudroyante d’E. Macron surfait sur le rejet concomitant de la droite et de la gauche, signant l’échec de trente-cinq ans de pseudo alternance. Refusant le ni-ni, E. Macron promettait une politique et de droite et de gauche ; il donnait ainsi un sursis à la Vème république, son programme étant supposé réconcilier le social et l’économie. Au nom de quoi, les premiers de cordée furent les premiers servis et la plèbe amputée d’une part d’allocation logement. On est en droit de douter de ces élites cooptées lorsqu’on voit une représentante du Gouvernement avouer, au cours d’un débat sur le pouvoir d’achat, ignorer le montant du SMIC… Face aux cadeaux consentis aux nantis (Lois El Khomri, CICE, ISF), sans retour à l’investissement dans l’économie réelle, on attend encore le volet social de la macronie. Et qu’E. Macron corrige l’image qui le pose en Président des (très) riches…
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L’échec allemand, dernier espoir d’une Europe démocratique. D’emblée E. Macron a positionné sa vision nationale dans le cadre d’un renforcement de l’intégration européenne. Il a gagé une grande partie de sa crédibilité sur sa capacité à faire évoluer A. Merkel et la droite allemande vers l’acceptation d’un budget européen démocratiquement contrôlé. A. Merkel, qui n’est plus que l’ombre de la chancelière qu’elle a été, a minaudé quelques consolations sous forme de promesses éventuelles, avec toutes ses condoléances, et l’Allemagne est restée ankayée sur son magot. Au moment où le Brexit part en couille et où l’Italie rejoue les fascii, E. Macron se retrouve seul face aux pouvoirs autoritaires d’Europe Centrale qui bafouent joyeusement l’idéal de la réconciliation franco-allemande initié par De Gaulle et Adenauer. Sans capacités populaires ni majorité morale (puisqu’il va s’aligner sur l’Europe de Junker et des lobbies) E. Macron n’apparaît plus comme le sauveur de l’Europe.
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L’échec d’un « leadership progressiste ». Cet isolement progressif d’E. Macron sur la scène internationale, entre les provocations de V. Poutine en Ukraine et la provocation permanente qu’est D. Trump, affaiblit notablement le roman de son leadership international. E. Macron n’apparaît plus comme la réincarnation de JFK, « en même temps » que vole en éclat la fiction d’un « camp progressiste » s’organisant à faire barrage à la vague mondiale du nationalisme. Ce « camp progressiste » survit, en France, sur la nostalgie des Trente glorieuses (1950-1973), modèle désormais en décomposition avancée. Incapable de s’opposer à la mascarade du procès de Lula et de la destitution de D. Roussef, il est mondialement submergé par la manipulation des réseaux sociaux et l’incompétence culturelle des élites à imaginer une réponse acceptable. La politique de casse du modèle social français et de précarisation économique de la société n’est en rien « progressiste ». De plus, E. Macron n’hésite pas – dans son rapport à l’Afrique et aux colonies d’outremer – à endosser la posture martiale et le verbe nationaliste du chef de guerre, pour défendre les intérêts de Total, d’Areva ou de Bolloré. Emmanuel Macron n’est pas un rempart contre le fascisme, il en est la version libérale, héritière de Napoléon III, arcboutée sur l’Empire. En témoigne, accessoirement, les lycéens de Mantes-la-Jolie… La France a-t-elle encore les moyens de ses opérations militaires extérieures ? Comment justifier les centaines de millions dépensés à bombarder la Syrie, ou à entretenir des bases en Côte d’Ivoire, alors qu’il s’agit de financer une transition énergétique au coût faramineux, sans remettre en cause un modèle social qui fut sans équivalent pour protéger la société de l’impact de la crise des subprimes en 2007.