— Par Marie-Noëlle Bertrand —
Censé relier le nord des États-Unis à l’Illinois, le Dakota Access Pipeline, oléoduc long de 1 900 kilomètres, menace les ressources en eau des Amérindiens de la réserve de Standing Rock. Leur opposition au projet est violemment réprimée par les troupes du shérif du comté de Morton.
«Que ferait Sitting Bull ? Il nous rappellerait ce qu’il disait il y a cent cinquante ans : “Réunissons nos esprits pour voir quel avenir nous pouvons construire pour nos enfants.” » Ainsi Winona LaDuke, femme politique amérindienne, conclut-elle son récit de l’affaire du Dakota Access Pipeline, traduit et mis en ligne par l’Observatoire des multinationales (1). Une histoire parmi d’autres d’oléoduc contesté en Amérique du Nord. Une histoire, surtout, d’accaparement de ressources par risques de pollution interposés, telles qu’en subissent depuis deux siècles les Lakotas, Sioux du Dakota du Nord.
Leur opposition au projet se voit réprimée avec une singulière violence. Jeudi, 117 manifestants étaient arrêtés par les troupes du shérif du comté de Morton. Cent vingt l’avaient été le week-end précédent. Le quotidien britannique The Guardian rapporte les témoignages de militants et de journalistes embarqués brutalement. « Je n’aurais jamais imaginé voir ce genre de démonstration de force contre un peuple pacifique », raconte ainsi Jihan Hafiz, journaliste free lance. « Des reporters ont été arrêtés, les réseaux de mobiles coupés, les vidéos censurées… s’il vous plaît, aidez-nous !!! » écrit quant à lui un manifestant, dans un mail adressé ce week-end à la rédaction de l’Humanité. En septembre, les agents du shérif ont même lâché les chiens sur les militants, parmi lesquels se trouvaient des enfants. Au total, 390 personnes, dont Dave Archambault, président de la tribu Lakota, ont été arrêtées depuis août.
L’enjeu financier est gros
Mais tout commence en mai, avec le début des travaux du Dakota Access Pipeline. Gigantesque, le projet d’oléoduc vise à relier la frontière nord des États-Unis, celle qui borde le Canada, jusqu’à l’État de l’Illinois, au sud. L’objectif est d’y faire transiter le pétrole de schiste extrait du gisement de Bakken, riche en hydrocarbures non conventionnels.
L’enjeu financier est gros – le pétrole non conventionnel produit au nord revient moins cher aux compagnies que celui, « classique », produit au sud – et les industriels, parmi lesquels Energy Transfert Partners, propriétaire du tuyau, ont misé 3,8 milliards de dollars dessus. S’il est achevé, l’oléoduc traversera quatre États et franchira près de 200 cours d’eau. Dans le seul Dakota du Nord, son tracé sinuera à travers 33 sites historiques et archéologiques, et bordera les sites sacrés des Lakotas, dont ce n’est pas l’unique préoccupation.
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(1) http://multinationales.org
les banques françaises impliquées BNP Paribas, le Crédit agricole, Natixis et la Société générale : les quatre principales banques françaises ont directement financé le projet Dakota Access Pipeline, à hauteur de plus de 1 milliard de dollars (910 millions d’euros) au total. « Toutes, sauf la Société générale, ont accordé des crédits permanents aux firmes parties prenantes », souligne l’Observatoire des multinationales.