18, 19 & 20 janvier 2018, 19h 30 au T.A.C.
— Par Christian Antourel & Ysa de Saint-Auret —
Le camp de Romainville, camp d’internement installé dans l’enceinte du fort de Romainville et administré d’abord par la Wehrmacht puis par la SS recevait différentes catégories de détenus. Il constituait une sorte de « réserve » permanente d’otages. Ils s’y servaient chaque fois que l’on devait procéder à des exécutions de représailles.
Le souffle de la violence du monde fait incursion sur la scène, se référant à une multitude d’évènements historiques ou plus confidentiels, Florence Delbo nous narre cette histoire d’une implacable vérité ; sept femmes donnent corps et voix aux traumatismes que l’histoire inflige.
C’est dire l’angoisse que vivent ces femmes enfermées depuis des mois dans leur dortoir -cellule tremblantes, dès qu’après les silences glacials des nuits, l’angoisse des nuits, des bruits de portes de serrures et de pas s’infiltrent tenaces jouant à la roulette russe entre leur désespoir, l’angoisse d’être déporté et des vagues idées d’évasions. Une loterie ou tout est joué d’avance. Que reste-t-il, alors quand tout s’effondre autour d’elles ? la tendresse irremplaçable d’une conscience innocente dont le cœur est sur les lèvres ,une douleur une souffrance scélérate sentie à fleur de peau.. Mais il leur faut croire encore au sourire de la vie qui s’éloigne face à la mort redoutée qui grimace et ricane, puisqu’elle sait tenir l’issue en main. Curieuse idée , à première vue que celle de nommer une pièce « Les Hommes » quand elle est essentiellement jouée par des femmes.
Un espace où les mots soulagent les maux.
Le hiatus s’explique peut-être par la présence sous-jacente de leurs hommes, leurs pères, fils, frères, ou maris enfermés tout comme elles dans une cellule voisine, toujours présents à l’esprit de ces femmes même si absents à l’image, où encore par la dimension humanisante globale du vécu carcéral subi par ces « résistantes » envers et contre tout. Le monde des hommes rencontre le monde des femmes. La partition des comédiennes, brillantes déchire le voile des non-dits. Sans jamais jouer sur les sentiments , sans s’appesantir sur quiconque au détriment d’une autre. Les artistes Sabrina, Pauline, Florence Isabel, Christine , Florence Cabaret, et Séverine, Cojannot, parviennent à dire toute la douleur des vies abimées, dans une parfaite complémentarité. La mise en scène de Laurence Hétier parvient à transcrire sur la scène le ressenti des choses, comment le corps encaisse la peur et les traumatismes qui détruisent les vies. Elle a su tout conserver du récit de l’auteur, sans en affadir la puissance. Parler de sujets graves dans un langage poétique, c’est là toute la subtilité du talent de Charlotte Delbo .Nous partageons en direct la vie quotidienne de ces femmes dans ce qu’elle révèle de plus insoutenable mais aussi d’ héroïque. A l’enfermement effectif des murs, s’ajoute la promiscuité supplice, l’angoisse lancinante, taraudante des lendemains incertains. Alors pour lutter contre l’atmosphère de peur, de mort, de désespoir, en fin, elles montent résolument la pièce « Un Caprice » de Musset, un espace où les mots soulagent les maux. Sublime antithèse de ce qu’elles vivent, par sa légèreté, sa fraîcheur, sa fantaisie où peuvent s’exprimer cette pulsion de vie et le combat de toute leur vie ce courage pour la Liberté.
En pratique !
An Théâtre Aimé Césaire
Jeudi 18
Vendredi 19
Samedi 20 janvier à 1h930
Durée 1h30.
Production Compagnie Partage & Serge Paumier.
Christian Antourel
& Ysa de Saint-Auret..