L’énergie fossile coûte énormément à la société planétaire : 5 900 milliards d’euros par an, soit 9,5 millions d’euros par minute. C’est ce que calcule le Fonds monétaire international. Une charge énorme par les subventions, mais surtout par les coûts environnementaux et sanitaires de la combustion des fossiles.
À travers le monde, six ans après la COP21 et l’Accord de Paris, les États persistent à soutenir massivement le secteur des énergies fossiles. Le chiffre établi par le Fonds monétaire international (FMI) est astronomique. Selon une étude publiée le 24 septembre et relayée par le Guardian, les énergies fossiles auraient coûté 5 900 milliards de dollars (5 100 milliards d’euros) à la collectivité en 2020, soit environ 6,8 % du PIB mondial. Chaque minute, le secteur des industries fossiles coûte 11 millions de dollars (9,5 millions d’euros) à la collectivité mondiale.
L’évaluation du FMI s’intéresse à l’ensemble des soutiens directs et indirects aux énergies fossiles. Il comptabilise autant les subventions aux entreprises que le coût des externalités provoquées par cette industrie : la pollution de l’air, la destruction des écosystèmes ou encore le réchauffement climatique. « Ces montants faramineux ne sont pas versés à 100 % dans les poches des producteurs et des distributeurs d’énergies fossiles, précise l’économiste Maxime Combes joint par Reporterre. Cette somme représente plutôt le coût monétaire que l’exploitation et la combustion des énergies fossiles font peser sur nos collectivités. »
Les allégements fiscaux représentent 6 % des 5 100 milliards d’euros. Les subventions qui viennent explicitement réduire le prix des carburants comptent pour 8 %. La part la plus importante tient au fait de ne pas faire payer les pollueurs pour les décès et les problèmes de santé causés par la pollution atmosphériques (42 %) et pour les vagues de chaleurs et les autres conséquences du changement climatique (29 %).
« Les énergies fossiles ne sont pas rentables sans la puissance publique »
Pour Nicolas Haeringer de l’association environnementale 350.org, cette étude a le mérite de montrer que « l’industrie des énergies fossiles n’est pas rentable sans la puissance publique. Si les actionnaires font du profit, c’est uniquement parce que les États soutiennent le secteur. »
Cette décision est éminemment politique. « Les autorités préfèrent socialiser les coûts de l’industrie fossile plutôt que de financer la transition écologique, dit-il à Reporterre. La puissance publique a fait le choix de subventionner les multinationales au détriment des populations et en dépit du bon sens. »
D’après le rapport du FMI, une tarification efficace des carburants en 2025 réduirait, en effet, « les émissions mondiales de dioxyde de carbone de 36 % en dessous des niveaux de référence et éviterait 0,9 million de décès prématurés chaque année dus à la pollution atmosphérique ».
En 2015, le FMI avait déjà écrit une étude similaire. À l’époque, il avait calculé que 4 580 milliards d’euros étaient consacrés aux énergies fossiles chaque année. En cinq ans, la somme a donc augmenté de près de 10 % pour atteindre 5 100 milliards. Le coût pourrait continuer à grimper dans les années à venir, préviennent les auteurs du rapport.
« Les États préfèrent socialiser les coûts de l’industrie fossile plutôt que de financer la transition »
Car pour l’instant, les États n’ont pas changé de braquet. Les grands discours ont beau s’être multipliés, les actions restent plus que timides. En 2009, le G20 avait convenu d’éliminer progressivement les subventions fossiles. En 2016, le G7 avait fixé l’échéance à 2025. Mais en juillet dernier, un rapport rédigé par l’institut Bloomberg avait montré comment le soutien au charbon, au pétrole et au gaz avait continué au sein du G20 après la signature de l’Accord de Paris. Il montrait également qu’en France, les aides aux énergies fossiles avaient augmenté de 23,8 % entre 2015 et 2019. Notre pays prend du retard. Le gouvernement français prévoit l’arrêt du soutien aux nouveaux projets pétroliers en 2025 et en 2035 pour les projets gaziers.
« La France, seul pays européen du G20 à avoir augmenté son soutien aux énergies fossiles »
« On aurait dû organiser la décroissance de l’extraction, de la combustion et de la consommation des énergies fossiles, mais nous faisons l’inverse, déplore Maxime Combes. La France est le seul pays européen du G20 à avoir augmenté ces dépenses depuis l’Accord de Paris. Ce n’est pas la transition écologique qui est coûteuse, c’est le statu quo qui est aujourd’hui insoutenable. »
Le moment est charnière. Les associations écologistes souhaitent profiter de la COP26 au Royaume-Uni pour exiger l’arrêt total des financements publics. « On ne peut plus accepter cette contradiction morbide, déclare à Reporterre Clément Sénéchal de Greenpeace. Les États ne peuvent pas fixer des objectifs et, en même temps, financer la crise climatique. C’est un comportement complètement suicidaire et autophage »…
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