Les droits de douane entre l’UE et les États-Unis en sept questions

Le président américain Donald Trump ayant annoncé sa volonté de conduire une politique plus protectionniste et surtout « réciproque », les droits de douane sont à nouveau à l’ordre du jour du commerce mondial. On vous explique en sept questions les enjeux et les effets potentiels pour les Européens de la politique américaine.

L’imposition de droits de douane relève de la compétence exclusive de la Commission européenne en matière de commerce extérieur. La France, par exemple, en tant qu’État membre, ne peut pas seule imposer des droits de douane.Membre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) comme le sont les États-Unis, l’Union européenne (UE) n’est autorisée à appliquer des droits de douane qu’en réponse à des pratiques discriminatoires non conformes aux règles de l’OMC. Les règles édictées par l’OMC interdisent l’instauration de droits de douane entre pays membres, les droits de douane étant supposés enfreindre la libre circulation des marchandises. Ils peuvent cependant être mis en œuvre en cas de réponse à des mesures de dumping ou d’autres pratiques discriminatoires non conformes aux règles de l’OMC.

De tels droits de douane sont, en outre, la prolongation d’un ancien principe, la préférence communautaire, populaire surtout au début de la construction européenne. Il n’est aujourd’hui plus un principe juridique de l’Union, mais il peut toujours être pris en compte par les institutions européennes pour fixer, par exemple, les taux des droits de douane.

Concrètement, sur proposition de la Commission européenne, c’est le Conseil qui fixe les tarifs des droits de douane (article 31 du TFUE) qui s’appliquent sur l’ensemble du territoire de l’UE. Ces droits de douane sont une importante source de revenu : les droits de douane sur les marchandises importées dans l’UE représentent environ 14% du budget total de l’UE au titre de ses ressources propres traditionnelles (notamment les contributions des membres, les droits de douane, une partie de la TVA des pays membres).

Le niveau de ces droits est réajusté chaque année selon plusieurs critères : classification du produit, origine, existence d’accords commerciaux ou de quotas ou d’autres régimes (par exemple, des réductions tarifaires en faveur des pays en développement) ou d’autres mesures (antidumping ou mesures de sauvegarde pour corriger, par exemple, des effets potentiellement déstabilisateurs de produits importés à des très bas coûts).

Dès son investiture le 20 janvier 2025, le président américain Donald Trump, favorable à une politique plus protectionniste, a déclaré vouloir imposer des droits de douane supplémentaires sur tous les produits importés :

  • 25% sur les produits en provenance du Mexique et du Canada (moins sur les produits énergétiques);
  • 25% sur toutes les importations d’acier et d’aluminium;
  • 25% sur les importations de toutes les voitures fabriquées en dehors du sol américain, y compris les pièces automobiles (moteurs, systèmes de transmission…);
  • 20% sur toutes les marchandises de l’UE, 10% sur celles du Royaume-Uni et 31% pour la Suisse ;
  • d’abord 10%, puis 34%, puis plus de 100% sur les importations en provenance de la Chine, d’autres pays asiatiques (Vietnam, Thaïlande) étant encore plus taxés ;
  • 0% pour le Groenland et la Russie tandis que d’autres se voient appliquer des taux plus faibles (10% pour la Turquie, l’Ukraine, l’Islande, l’Arménie ou l’Azerbaïdjan) ;
  • par défaut, toutes les autres importations sont taxées d’au moins 10% de droits de douane.

Les marchés financiers, y compris ceux de la dette américaine, ont réagi fortement à ces annonces. Le 9 avril, l’administration américaine a décidé un moratoire de 90 jours pour l’entrée en vigueur de ces nouveaux droits au profit de la plupart des pays concernés, à l’exception de la Chine, dont les importations restent pénalisées par une hausse des droits de plus de 100%.

Les États-Unis veulent pratiquer des droits de douane réciproques sur l’ensemble des marchandises importées, car ils reprochent à de nombreux partenaires commerciaux de pratiquer des barrières à l’entrée de leurs marchés domestiques, pénalisant les biens et services américains. L’objectif est de protéger les producteurs américains de la concurrence étrangère, rééquilibrer la balance commerciale américaine et réindustrialiser le pays. Pour détourner ces droits de douane, les entreprises étrangères pourraient être incitées à délocaliser leur production vers les États-Unis, ce qui stimulerait l’économie américaine.

Selon une étude du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), la politique américaine risque de comprimer le PIB mondial et causer un redéploiement du commerce mondial. De nombreux pays, dont la France, pourraient voir leurs exportations affectées. Les gagnants pourraient être les pays limitrophes des États-Unis.

Pour éviter des mesures unilatérales contestables devant l’OMC, les États-Unis doivent démontrer que certaines pratiques européennes entravent leurs importations.Selon l’administration américaine, la situation actuelle avec l’Union européenne est en sa défaveur. Elle veut appliquer le principe de réciprocité, c’est-à-dire mettre en place le même niveau de droits de douane que l’UE le fait pour les biens et services américains sur le marché européen.

L’administration américaine prend en compte deux sortes de barrières tarifaires :

  • d’une part, certains produits américains sont soumis à des droits de douane. En volume, ces droits s’élèvent à environ 1% de la valeur totale des importations américaines dans UE ;
  • d’autre part, la taxe sur la valeur ajoutée s’applique sur les produits américains vendus dans l’UE. Son taux varie parmi les 27 États membres entre 16% (Luxembourg) et 27% (Hongrie).

Selon l’administration américaine, ces deux « barrières », tout comme les subventions accordées par l’UE ou les pays membres, ainsi que les dévaluations monétaires seront prises en compte pour calculer les nouveaux droits de douane américains sur les produits importés depuis l’UE.

Par ailleurs, toutes les barrières ne sont pas quantitatives, certaines sont normatives comme l’interdiction dans l’UE de la vente de bœuf aux hormones ou les obligations résultant de la législation sur les services numériques. La prise en compte de ce genre de barrières est délicate.

Le calcul des droits finalement annoncés est complexe. Prenons par exemple le cas des 20% touchant la majeure partie des produits de l’UE. L’administration américaine semble avoir retenu les éléments suivants :

  • le taux de la TVA dans l’UE ;
  • les droits de douanes pratiqués par l’UE sur les produits américains (4%) ;
  • le poids des diverses barrières non-tarifaires, telles que les réglementations sanitaires et environnementales.

Le taux ainsi obtenu est divisé par deux pour arriver au taux de 20% annoncé.

En 2023, l’Union européenne et les États-Unis étaient respectivement première et troisième puissance commerciale mondiale, la Chine occupant la deuxième place. Au total, le commerce bilatéral entre l’UE et les États-Unis est de l’ordre de 1 600 milliards d’euros.En 2023, l’UE a exporté aux États-Unis un volume de biens d’un montant de 503 milliards d’euros et a importé pour un montant de 347 milliards d’euros (soit des échanges de 851 milliards en tout, chiffre arrondi), donnant un surplus au profit de l’UE de 157 milliards d’euros.

Pour les services dont le volume d’échange global a été en 2023 de 746 milliards d’euros, la situation est inverse : l’UE a enregistré en 2023 un déficit de 109 milliards d’euros (l’UE a exporté vers les États-Unis pour 319 milliards et a importé pour 427 milliards d’euros).

Si on prend l’ensemble des biens et des services, l’UE a enregistré un excédent global de 48 milliards d’euros en 2023. Il correspond à 3% du volume global des échanges.

Le niveau global du déficit américain (48 milliards d’euros en 2023 sur un volume d’échanges de 1 600 milliards) est assez faible. Il est plus important pour les seuls biens, mais pour les services ce sont les États-Unis qui dégagent un surplus commercial avec l’UE. Les deux blocs sont donc plutôt complémentaires.Si l’on considère les seuls droits de douane, ils s’élèvent globalement à des niveaux et montants assez équivalents des deux côtés de l’Atlantique. En 2023, sur 503 milliards d’euros de biens européens importés aux États-Unis, 7 milliards d’euros de droits de douane (environ 1,4%) ont été prélevés. De son côté, l’UE a récolté des droits de douane d’un montant d’environ 3 milliards d’euros sur les importations en provenance des États-Unis (soit 1% du total qui s’est élevé à 347 milliards d’euros).

Selon le site Toute l’Europe, « actuellement, le taux moyen des droits de douane appliqués par l’UE sur les produits américains est de 4% ». Il est de 3,5% sur les importations européennes aux États-Unis. Pour certains produits cette différence est plus grande : les voitures européennes supportaient jusqu’à récemment une taxe de seulement 2,5% aux États-Unis, l’UE imposait une taxe de 10% sur les voitures américaines importées.

La TVA est appliquée à tous les produits vendus dans les pays de l’UE, européens comme américains. Il n’y a pas de différenciation vis-à-vis des produits américains (la TVA est un impôt domestique et non une barrière tarifaire). Aux États-Unis, qui n’appliquent pas de taxe fédérale sur la vente, chaque État met en place ses propres taxes. Elles varient entre 0 et environ 12%. Tous les produits vendus, américains comme étrangers, y sont soumis.

La Commission européenne a déclaré dans un premier communiqué être opposée à la nouvelle orientation protectionniste de l’administration américaine. « L’UE maintient des droits de douane parmi les plus bas au monde et ne voit aucune justification à l’augmentation des droits de douane américains sur ses exportations. Ces droits sont des taxes, et en les imposant, les États-Unis taxent leurs propres citoyens.« L’UE a également déclaré vouloir protéger entreprises, travailleurs et consommateurs européens et réagir fermement contre les obstacles au commerce qu’elle estime injustifiés. L’entrée en vigueur, le 12 mars 2025, de droits de douanes de 25% sur toutes les importations américaines d’acier et d’aluminium a fait réagir la Commission européenne. À partir de mi-avril 2025, elle appliquera, sur une série de produits américains, des droits de douanes « proportionnés« , destinés à affecter un même volume de marchandises, soit 26 milliards d’euros.

Une telle escalade pourrait compromettre les précédents efforts de libéralisation commerciale et engendrer des effets économiques potentiellement négatifs. En renchérissant le prix des produits étrangers, les droits de douane ont un effet inflationniste, augmentent les coûts de production et pèsent sur le pouvoir d’achat des consommateurs. In fine, les droits de douane risquent de réduire les échanges. Compte tenu de l’ampleur des échanges entre les États-Unis et l’UE, ces effets négatifs pourraient être importants.

Par ailleurs, de nouveaux droits de douane impliquent toujours une hausse de l’incertitude pour les entreprises. Pour répondre aux nombreuses questions des entreprises, le ministère de l’économie et des finances met à leur disposition un site dédié. Les effets des l’augmentation des droits de douane sont nombreux :

  • si les produits américains deviennent plus chers en Europe, l’éventail des choix du consommateur européen risque de se réduire et les entreprises européennes peuvent être contraintes de les remplacer, ce qui risque de perturber leurs chaînes de production ;
  • les entreprises des pays tiers, concernées par les droits de douane américains, pourraient décider de vendre leurs produits davantage en Europe, ce qui peut rendre la concurrence plus difficile pour les entreprises européennes ;
  • les entreprises pourraient être incitées à réduire ou retarder leurs projets d’investissement ;
  • une hausse des droits de douane peut avoir un effet à la hausse de la monnaie du pays qui les applique. Une telle appréciation rend les produits de ce pays plus chers sur les marchés internationaux et donc moins compétitifs ;
  • les pays concernés par les droits de douane sur leurs produits vendus aux États-Unis pourraient se rapprocher de l’UE et chercher à négocier des accords d’échanges plus favorables avec l’Europe.

Une riposte européenne par l’augmentation des droits de douane pourrait servir de levier pour négocier un moratoire ou une désescalade commerciale. Les États-Unis pourraient essayer de défendre leurs intérêts et, par exemple, exiger d’affaiblir, en faveur des entreprises américaines, la réglementation européenne en matière de données et de services numériques.

Enfin, il reste encore à savoir comment peuvent réagir les pays européens concernés non-membres de l’UE (Royaume-Uni, Suisse, Norvège…). Si ces pays européens ne participent pas à la réponse tarifaire de l’UE, ils sont en contact étroit avec la Commission européenne pour décider de la suite à donner.

traité international entre l’UE d’une part et un Etat ou une autre organisation internationale d’autre part, qui réduit les obstacles commerciaux entre les deux parties.L’objectif est simple : augmenter les débouchés des entreprises en leur ouvrant d’autres marchés et ainsi donner un coup de pouce à la croissance économique, voire à l’emploi dans les pays signataires.

Un accord de libre-échange comprend donc au moins la diminution des droits de douane dans certains domaines.

traité international entre l’UE d’une part et un Etat ou une autre organisation internationale d’autre part, qui réduit les obstacles commerciaux entre les deux parties.L’objectif est simple : augmenter les débouchés des entreprises en leur ouvrant d’autres marchés et ainsi donner un coup de pouce à la croissance économique, voire à l’emploi dans les pays signataires.

Un accord de libre-échange comprend donc au moins la diminution des droits de douane dans certains domaines.

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Un accord de libre-échange comprend donc au moins la diminution des droits de douane dans certains domaines.

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Un accord de libre-échange comprend donc au moins la diminution des droits de douane dans certains domaines.

L’Union européenne et les États-Unis sont tous les deux membres de l’OMC.

Un accord de libre-échange est un accord international dont l’objectif est de réduire les obstacles commerciaux entre les deux contractants. Il s’agit de faciliter mutuellement l’accès des entreprises aux marchés intérieurs via une réduction des barrières à l’entrée (droits de douane, normes ou réglementation) et l’ouverture des marchés publics.

Actuellement, le commerce entre l’Union européenne et les États-Unis n’est pas régi par un accord de libre-échange, mais par les règles édictées par l’OMC. Il existe en revanche un accord de coopération douanière entre l’UE et les États-Unis datant de 1997 (élargi en 2004). Il vise notamment l’assistance mutuelle en matière douanière et la sécurité de la chaîne d’approvisionnement (gestion des risques).

TTIP pour « Transatlantic Trade and Investment Partnership » .Les adversaires du traité ont plutôt tendance à employer l’ancienne dénomination TAFTA (pour Transatlantic Free Trade Area, ou « traité de libre-échange transatlantique

Le projet de TTIP (« Transatlantic Trade and Investment Partnership »), appelé également TAFTA (pour « Traité de libre-échange transatlantique »), négocié entre 2013 et 2017, n’a pas abouti.

Source : Service-Public