—Par Selim Lander––
Beauty remained just a moment then returned gently to her starting position, une pièce du MIDM (Moving Into Dance Mophatong) de Johannesburg.
Le Pavillon Noir d’Anton Preljocaj accueillait l’année dernière une très remarquable adaptation du Lac des Cygnes par Dada Masilo et les danseurs de la Dance Factory de Johannesburg. Cette année, la chorégraphe Robyn Orlin a présenté une pièce d’une toute autre nature, mais témoignant à nouveau de la créativité de la danse sud-africaine. Si Dada Masilo reste très proche de la danse classique, tout en l’africanisant, c’est plutôt l’inverse chez Robyn Orlin : elle conserve les figures africaines de base, se contentant de leur insuffler un peu de modernité. Est-ce la raison pour laquelle il y a finalement si peu de danse stricto sensu dans Beauty remained ? Car une grande partie du temps est utilisée autrement. Les spectateurs qui se sont vus remettre une petite bouteille d’eau à l’entrée sont invités à produire divers sons avec de l’eau dans la bouche, puis on leur demandera de lancer les bouteilles vides sur la scène où elles deviendront des accessoires pour les danseurs. Plus tard, une danseuse se dirigera vers les spectateurs pour leur emprunter quelques habits afin de se confectionner un tutu – enfin c’est ainsi qu’elle le désigne. Les danseurs sont munis de micros cravates, ce qui leur permet de s’adresser facilement au public. Tout ceci prend du temps…
Qu’est-ce qui fait, malgré tout, le charme de cette pièce ? D’abord son ironie, ou son humour, comme on voudra. Le début est particulièrement réussi. Les images d’un coq sont projetées sur le rideau (clair et fendu verticalement) du fond de scène. Un premier danseur apparaît imitant l’animal, à petits pas pressés. D’autres danseurs sortent du rideau, ils disparaissent puis reviennent formant un ballet incessant qui traverse ce rideau. Un autre atout de la pièce réside dans la variété et l’inventivité des costumes, beaux, à l’instar de la robe sur la première photo, ou drôles comme sur la photo suivante.
Quant à la danse elle-même, il n’est pas facile d’en juger, vu le peu de moments dans lesquels s’affiche une chorégraphie un tant soit peu élaborée. C’est juste suffisant pour confirmer les compétences des danseurs et faire regretter de n’en voir pas davantage.
Au Pavillon Noir d’Aix-en-Provence, les 11 et 12 octobre 2013.
PS / Une autre forme de beauté se donne à voir jusqu’en décembre sur les corniches du Pavillon Noir et du bâtiment voisin, le conservatoire de musique et de danse dessiné par l’architecte Kengo Kuma, récemment inauguré. Le « groupe LAPS », de Montreuil (Seine-Saint-Denis), spécialisé dans l’art de la lumière, a imaginé un spectacle intitulé Keyframes. Ce terme emprunté au cinéma d’animation désigne les figures initiale et finale d’un mouvement quelconque, entre lesquelles on intercale d’autres figures, plus ou moins nombreuses, qui sont autant d’étapes de la transformation conduisant du début à la fin. Ici, ces figures faites de tubes lumineux représentent des danseurs. Le mouvement est obtenu en éclairant les figures successives ; il accompagne une musique de Mozart. Le résultat est fascinant. C’est bien une danse à laquelle nous assistons : les personnages stylisés par des bâtonnets lumineux et un cercle pour la tête n’ont pas seulement une allure fort sympathique ; ils démontrent d’incontestables capacités de danseurs.