Décès d’Antoine Labelle ecclésiastique colonisateur québecois le 4 janvier 1891
Antoine Labelle, né le 24 novembre 1833 à Sainte-Rose et décédé le 4 janvier 1891 à Québec, est un ecclésiastique québécois, figure emblématique de la colonisation des Laurentides. Il est parfois surnommé le « roi du Nord » ou bien, plus simplement, le « curé Labelle ».
Jeunesse
Né en 1833, il est le seul fils d’Angélique Maher et d’Antoine Labelle, un cordonnier. Il étudie au séminaire de Sainte-Thérèse. Les premières années de sa vie sont mal connues, mais on sait qu’il aimait lire Auguste Nicolas et Joseph de Maistre. Il ajoute François-Xavier à son prénom, saint François-Xavier étant un modèle pour lui. Il est ordonné prêtre le 1er juin 1856 après une brève formation théologique de 1852 à 1855. Il est doté d’un physique imposant : il mesure 1,80 m et pèse 140 kg.
Il est un descendant direct d’Olivier Charbonneau.
Missionnaire et colonisateur
Premières cures
D’abord nommé vicaire à Sault-au-Récollet par l’évêque Ignace Bourget, il devient curé à la paroisse de Saint-Antoine-Abbé, près de la frontière avec les États-Unis, où il exerce son ministère jusqu’en 1863. Ensuite, il est prêtre à Saint-Bernard-de-Lacolle. Il se présente aussi comme volontaire pour lutter contre l’invasion des Féniens. Vers 1867, il exprime un épuisement, demandant d’être transféré dans un diocèse américain ou dans un monastère. L’évêque Bourget le somme de rester, lui accordant la populeuse paroisse de Saint-Jérôme.
Curé de Saint-Jérôme
Labelle trouve de grands besoins à combler dans sa nouvelle communauté, et il cherche immédiatement à faire développer le chemin de fer dans la région pour encourager le développement économique. Un de ses objectifs est de faire cesser l’émigration des Canadiens français vers les États-Unis
Son action sociale est reconnue, et il est comparé à Auguste-Norbert Morin, qui a fondé Sainte-Adèle. Au total, il fait venir cinq mille habitants dans le sol colonial. Le gouvernement élu à la suite de la Confédération canadienne accorde de larges subventions à son grand projet. Hugh Allan et John Joseph Caldwell Abbott lui rendent hommage en 1873, et lorsque le premier tronçon du chemin Montréal-Saint-Jérôme est inauguré le 9 octobre 1876, une des locomotives porte son nom.
En 1879, Arthur Buies se joint à sa cause. Le coureur des bois Isidore Martin lui prête également main-forte. Labelle fonde la société de colonisation du diocèse de Montréal, ainsi qu’une loterie pour la colonisation. Cette même année, il souhaite que le diocèse d’Ottawa puisse devenir un archidiocèse.
En 1887, il demande l’érection canonique du diocèse de Saint-Jérôme.
Un prélat politicien
Membre du gouvernement
Le nouveau premier ministre libéral Honoré Mercier, élu lors des élections de 1886, veut tirer profit de la popularité du prêtre colonisateur. Mercier le nomme alors comme sous-commissaire au nouveau département de l’Agriculture et de la Colonisation, fraîchement créé par son gouvernement. Il entre en fonction lors de la 2e session de la 6e législature, le 15 mai 1888. Avec le commissaire des Terres de la couronne, Georges Duhamel, il prépare une nouvelle loi pour supprimer les réserves forestières, des titres que se procuraient les compagnies forestières pour s’approprier de grands territoires destinés à la coupe de bois au détriment de la colonisation de ceux-ci. On concède cependant aux compagnies une première coupe avant l’obtention des lettres patentes des colons. Cette dernière entre en vigueur le 12 juillet 1888. Il obtient également l’adoption du « bill des 100 acres », lequel permet l’octroie gratuitement une terre de 100 acres à toute famille avec 12 enfants vivants. Malgré sa présence au gouvernement, le dossier du parachèvement du chemin de fer vers le nord n’aboutit pas. Politiquement, les conservateurs voient en lui un transfuge politique. Ils s’allient à l’archevêque de Montréal, Mgr Édouard-Charles Fabre, qui n’apprécie pas le pouvoir politique acquis par ce curé placé sous sa gouverne. Fabre lui demande sa démission. En réaction, le premier ministre Mercier réussit à obtenir une faveur du Saint-Siège en faisant accorder au curé Labelle le titre de « protonotaire apostolique ad instar ».
Intervention de Rome
Devenant ainsi prélat, même à titre honorifique, le curé Labelle (maintenant « monseigneur ») peut jouir d’une certaine indépendance vis-à-vis l’archevêque. Malgré cela, Fabre réclame toujours sa démission. Le pape Léon XIII doit intervenir deux fois (en novembre 1889 puis en mai 1890) pour le calmer.
Du 9 janvier au 15 septembre 1890, Labelle effectue un second voyage en Europe. En France, au nom du gouvernement, il encourage l’immigration française vers le Canada. À Rome, il défend sa réputation et plaide également la création d’un nouveau diocèse. Le 23 décembre 1890, il apprend le refus du Saint-Siège de créer le diocèse de Saint-Jérôme par séparation de l’archidiocèse de Montréal (cela n’aura lieu qu’en 1951). Il est conscient que cette annonce signe la fin de ses ambitions. Dans une entrevue au Montreal Star, il explique : « il est vrai que l’archevêque de Montréal n’aime pas à ce que aucun de ses prêtres ne soit élevé à la position d’évêque […] C’est possible que M. Mercier prie le Pape de m’ordonner de rester, mais mon désir est de m’en retourner dans mon comté et d’aller vivre près des lacs et des montagnes en arrière de Saint-Jérôme. »5. Labelle présente sa démission au premier ministre le 26 décembre 1890. Ce dernier la refuse le lendemain. Au même moment, une hernie abdominale commence à le faire souffrir.
Fin de vie
Le curé Labelle est décédé au 48, rue Sainte-Ursule, dans le Vieux-Québec. Il y logeait lors de ses passages à Québec.
Le vendredi 2 janvier 1891, son état de santé devient grave. Le samedi en après-midi, le docteur Auguste Hamel l’anesthésie au chloroforme et procède à une opération chirurgicale avec ses collègues Michael Joseph Ahern et Laurent Catellier. L’opération réussit et le curé Labelle semble aller mieux, mais il faiblit quelques heures plus tard. Il aurait dit dans ses dernières paroles : « C’est la fête des Saints Innocents, on en recevra bien, j’espère, un de plus au ciel ». Un révérend jésuite lui donne l’extrême-onction6. Il rend l’âme tôt le dimanche, vers 2 h 15. Il serait décédé de septicémie à la suite d’une injection. L’annonce de sa mort crée une onde de choc partout au Canada français et à Paris, faisant l’objet d’articles dans les journaux durant plusieurs jours.
À 16 h, son corps est transféré à la chapelle des Jésuites accompagné d’un cortège de trois cents notables et citoyens de Québec. Un office des morts est célébré dans la chapelle remplie à pleine capacité. Le lundi 5 janvier, le corps est transféré à la basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec où un Liberia est chanté à 9 h par le cardinal Taschereau. Il est ensuite transporté à la gare du Canadien Pacifiqu7, où un convoi ferroviaire spécial quitte à 10 heures en direction de Saint-Jérôme. Vers 15 h, le train atteint la jonction Saint-Martin, sur l’île Jésus. Il entre finalement en gare de Saint-Jérôme deux heures plus tard où il est accueillit par environ 5 000 personnes. L’affluence est gigantesque pour la petite ville, les « hôtelleries » affichant complet, les rues étant décorées de nombreuses banderoles funèbres et les drapeaux étant mis en berne8. Son corps est déposé dans la chambre mortuaire du presbytère, où un autre « office des morts » est récité, puis en l’église de Saint-Jérôme. Le 8 janvier marque le paroxysme des célébrations funèbres. Un cortège impressionnant d’environ 1 200 personnes provenant de Montréal vient gonfler la population. Les obsèques officielles, célébrées par l’archevêque Joseph-Thomas Duhamel, sont exceptionnelles, tant au niveau de la préparation que du nombre de participants. Le journal L’Électeur dit : « Jamais hors des grandes villes on a vu un aussi nombreux clergé réuni ». On peut noter la présence des premiers ministres Honoré Mercier et Joseph-Adolphe Chapleau et de l’ensemble des ministres du gouvernement québécois.
Hommages
Statue de Labelle, à Saint-Jérôme
Dès l’annonce de sa mort, Antoine Labelle reçoit des hommages senties à travers toute la société québécoise. Le lendemain de son décès, le Bureau du service civil québécois adopte la résolution suivante : « Que le nom de celui qu’on appelait à juste titre l’apôtre de la colonisation restera légendaire et vénéré dans notre population ».
Depuis le 15 janvier 2016, il est désigné « personnage historique du Québec » en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel10 à l’occasion du 125e anniversaire du décès du Roi du Nord. La Ville de Saint-Jérôme l’a d’ailleurs désigné ainsi quelques années plus tôt.
Un grand monument, œuvre du sculpteur Alfred Laliberté, est érigé en son honneur en 1924 au parc Labelle, devant la cathédrale de Saint-Jérôme11. Il est un des personnages principaux de la série télévisée Les Belles Histoires des pays d’en haut (1956-1970) sous les traits de Paul Desmarteaux, rôle repris par Antoine Bertrand dans Les Pays d’en haut (de 2016 à 2019).
En 2016, la ville de Saint-Jérôme a organisé des activités afin de commémorer l’œuvre d’Antoine Labelle.
Plusieurs éléments géographiques ont été nommés en l’honneur d’Antoine Labelle, dont :
La municipalité régionale de comté d’Antoine-Labelle ;
La circonscription électorale provinciale de Labelle ;
La circonscription électorale fédérale de Laurentides—Labelle ;
La municipalité de Labelle, où se trouve une statue de ce dernier ;
La réserve faunique de Papineau-Labelle ;
Le boulevard Curé-Labelle (route 117) ;
À Laval :
Boulevard Roi-du-Nord
Parc Roi-du-Nord
École secondaire Curé-Antoine-Labelle
Des rues dans différentes municipalités du Québec.
Le fonds d’archives d’Antoine Labelle est conservé au centre d’archives de Montréal de Bibliothèque et Archives nationales du Québec.
Source ; Wikipedia