Clôture à Point-à-Pitre du 1er salon de la Société des Artistes Antillais le 31 janvier 1924
Le Bulletin de l’Agence générale des Colonies évoque l’ouverture de ce premier « Salon » en rappelant les objectifs de la Société : « elle s’est donnée pour objet d’encourager le mouvement des beaux-arts aux Antilles françaises par des expositions annuelles et par la création d’une bibliothèque permettant à la jeunesse de ce tenir au courant du mouvement artistique ».
La Société des artistes antillais, un public d’élites et d’élégants
La Société des Artistes antillais, créée à Pointe-à-Pitre par Germaine Casse, le 15 janvier 1924, a été aussi éphémère que la manifestation de mai. Placée sous le haut patronage d’Henry Béranger, la Société est inaugurée solennellement, dans le cadre de son premier Salon23, en présence encore des élites locales : à cette occasion, le gouverneur de la Guadeloupe, Jocelyn Robert, est élevé au titre honorifique de Président d’Honneur, et Adrien Lefèvre, directeur de la Banque de la Guadeloupe, est nommé trésorier de la jeune société.
Les principaux organes de la Presse coloniale métropolitaine rapportent, – avec parfois beaucoup de retard -, l’évènement. Les Annales coloniales du 12 février soulignent l’importance de la fête autour de la manifestation guadeloupéenne et insistent sur le succès de sa présidente Germaine Casse25. Le Monde colonial illustré du 7 avril donne davantage de détails au sujet des festivités de clôture. La présidente Germaine Casse a reçu, lit-on, un « public d’élites, d’élégants et nombreux, qui goûta le plaisir rare de voir tous les arts réunis et tous les plaisirs esthétiques assemblés »26. Environ cent quatre-vingts tableaux et oeuvres d’art appliqué des Antilles et de France y étaient réunis, dans un ensemble parfait, digne des plus belles expositions de Paris27. Un concert de musique classique « des plus brillants », ainsi que des conférences, charmèrent le public. « La danse termina la fête 28».
On note que les informations fournies à la Presse métropolitaine sont lacunaires et ciblées. Le lieu exact de l’exposition, par exemple, n’est jamais précisé. On apprend seulement que le siège social de la Société se trouve à Pointe-à-Pitre. Aucun nom d’artiste, aucun titre d’oeuvre n’est cité, hormis celui de Germaine Casse. Le Monde colonial illustré. évoque bien la présence d’artistes locaux, mais sans aucune autre précision29. Un point seulement semble attirer l’attention des chroniqueurs métropolitains : la présence et la mise en scène dans l’exposition des élites coloniales.
Il faut donc chercher un complément d’informations sur l’éventuelle présence d’artistes antillais dans la Presse locale. Un seul article, paru dans le quotidien La Paix du 23 janvier, évoque l’évènement30. On apprend alors que l’exposition a présenté la « ravissante » collection privée de M. Vignes, demeurant à Trois-Rivières (Guadeloupe), et une rétrospective du sculpteur français Maxime Baudelot (né en 1850) connu pour avoir vécu à New-York à la fin du XIXe siècle31. À sept jours de la clôture, l’article évoque l’attente de nombreuses oeuvres d’art envoyées de France et mises à la disposition du Comité organisateur par l’intermédiaire de Charles Sainte-Croix de la Roncière (1872-1946)32. À nouveau Germaine Casse est félicitée.
Le récit de la Presse locale semble masquer l’échec de ce premier Salon des artistes Antillais, qui accueillit, semble-t-il, aucune oeuvre d’artistes locaux. Comme lors de l’exposition de mai 1923, le Salon semble n’avoir existé qu’à travers ses stratégies de communication vis-à-vis de la Métropole. Une unique image permet de prolonger le souvenir de l’événement : il s’agit d’une affiche colorée (ill.1), réalisée à partir d’un des tableaux de Germaine Casse et imprimée à Paris33. En outre, un Bulletin de la Société des Artistes antillais34, sorte d’annuaire inventoriant les « noms des diverses notabilités guadeloupéennes de la finance, de la politique, du journalisme et des Beaux-Arts »35, est publié, dont ne paraîtront que deux numéros.
Source : hal.archives-ouvertes.fr