29 avril 1720, jour où les Parisiens tuent plusieurs policiers.
Antoine Siger, maire de Fort-de-France est assassiné le 29 avril 1908
Antoine Siger, né le 14 septembre 1848 à Case-Pilote (Martinique) et mort assassiné le 29 avril 1908 à Fort-de-France (Martinique), est un homme politique français.
À 22 ans, Antoine Siger est reconnu par son père. Il quitte Case-Pilote pour Fort-de-France et devient notaire au François. Homme calme, pondéré, il devient conseiller municipal de Fort-de-France, pendant plus de 30 ans, avant de devenir maire de 1907 à sa mort. Il est membre du Parti radical.
Alors qu’il était contesté par des manifestants, Antoine Siger est tué par un coup de feu tiré de la foule. L’assassin n’a jamais été identifié.
Les conditions de l’assassinat d’Antoine Siger dans la mairie de Fort-de-France sont abordées dans le roman Le cri muet de l’iguane écrit par Daniel Picouly en 2015.
Lire sur France-Antilles :
Assassinat d’Antoine Siger : coup de feu à l’hôtel de ville
Meurtre accidentel ou meurtre avec préméditation (assassinat) ? Le flou n’a jamais été définitivement levé sur cet événement violent de la vie politique particulièrement délétère en Martinique au début du siècle dernier. Au terme d’un parcours judiciaire épique, un béké a été acquitté. Les années ont passé. Ce crime, commis le mercredi 29 avril 1908 à l’hôtel de ville de Fort-de-France, est resté impuni.
«Ce crime n’est pas celui d’un homme; c’est le crime d’un parti, qui l’a préparé par toute une série d’attentats contre la liberté, contre le droit et contre le suffrage universel ». Ces propos sont de Victor Sévère, député de la deuxième circonscription de la Martinique depuis 1906, maire démissionnaire de Fort-de-France depuis le 19 septembre 1907. Ils sont prononcés le vendredi 1er mai 1908, lors des obsèques d’Antoine Siger, celui qui le remplaçait au fauteuil de maire de Fort-de-France depuis le 21 octobre 1907.
Siger, le modéré, le tolérant, ami de longue date de Sévère, avait été tué deux jours plus tôt, d’une balle au cou, en plein hôtel de ville de Fort-de-France, lors d’un mouvement de colère d’opposants. Dans un climat de campagne de municipales d’une rare violence où l’injure était une obligation, le mensonge et la diffamation, la règle, se trouvaient face à face les radicaux-socialistes menés notamment par Victor Sévère et Joseph Lagrosillière (à gauche), et les socialistes indépendants (à droite), partisans du clan usinier, menés entre autres par Fernand Clerc et Osman Duquesnay….
29 avril 1720, jour où les Parisiens tuent plusieurs policiers.
29 avril 1720. Les Parisiens massacrent plusieurs dizaines de policiers accusés de rapts d’enfants.Ces enfants, mais aussi femmes et vagabonds sont arrêtés arbitrairement pour être expédiés dans la colonie du Mississippi.
— Par Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos —
La colère parisienne couve depuis plusieurs semaines, voire depuis plusieurs mois, avant d’éclater le lundi 29 avril 1720. Des centaines d’artisans, de portefaix, de domestiques, de commerçants se rassemblent aux carrefours armés de bûches, pavés, bâtons, outils et épées en guise d’armes. Le gibier devient chasseur. La chasse aux archers du guet et aux exempts de l’armée est ouverte. Dès que l’un d’eux est attrapé, il est massacré. Tiens ce pavé dans la gueule, tiens ce bâton dans les côtes ! À la fin du jour, une dizaine de représentants de la loi font déjà la queue devant saint Pierre, et plusieurs centaines ont été blessés par la foule en colère. La rue Saint-Antoine et le pont Notre-Dame ont connu les plus sanglantes échauffourées. De Lisle, greffier au Parlement de Paris, donne l’explication de la colère populaire : « La populace s’était soulevée dans différents quartiers de la ville contre un grand nombre d’archers ou gens préposés pour prendre les vagabonds et gens sans aveu pour les conduire à Mississipi (orthographe du XVIIIe siècle, NDLR) parce que sous ce prétexte ils arrêtaient depuis quelques jours toutes sortes de personnes sans distinction, hommes, femmes, filles, garçons, et de tous âges, pour les y faire conduire aussi pour peupler le pays. »
Voici le fond de l’affaire, la raison de l’ire parisienne : la Compagnie des Indes (ou encore Compagnie de Mississipi) appartenant au financier John Law a besoin de centaines, de milliers de colons. Or, l’appel au volontariat ne donne pas grand-chose. La Compagnie a beau soudoyer les journalistes de son temps pour publier des articles vantant la vie de colon, le rêve américain ne prend pas. Un autre témoin du temps, Mathieu Marais, écrit : « Il semble que l’on veuille faire sortir tous les Français de leur pays pour aller là. On ne s’y prend pas mal pour faire de la France un pays sauvage et en dégoûter les Français. » S’il n’y a pas de volontaires, il y a toujours la possibilité de déporter les pauvres bougres croupissant dans les prisons ! Ils ne sont pas suffisamment nombreux ? Pas grave, c’est tellement facile de remplir les prisons. Bien avant Sarko, on connaissait déjà la recette pour traquer les indésirables.
Des dizaines de milliers de SDF
Copain comme cochon avec Philippe d’Orléans, régent de France, John Law obtient la publication de l’ordonnance royale du 10 mars 1720 prescrivant l’arrestation de tous les pauvres hères de la capitale sans domicile fixe. Ils sont des dizaines de milliers dans ce cas ! À l’époque, les SDF grouillent dans la ville. Les archers du guet ne savent plus où donner de la tête. Mais cela ne suffit pas. Le 28 mars, une nouvelle ordonnance menace les domestiques, les gens sans aveu et les artisans qui agiotent rue Quincampoix d’être expédiés, eux aussi, en Louisiane et dans le Mississippi s’ils continuent à spéculer en bas du domicile de Law. Il faut dire qu’une spéculation effrénée se déroule dans la rue où les esprits enfiévrés par l’espoir d’un gain d’argent achètent et vendent les actions de la Compagnie des Indes. En une journée, des domestiques deviennent bien plus riches que leur maître, tandis que d’autres spéculateurs sont ruinés. Pour stimuler l’ardeur des archers et exempts, la Compagnie des Indes offre une pistole par personne livrée outre leur solde quotidienne de vingt sols. Inutile de dire que les arrestations se multiplient. Et tant qu’à faire, autant attraper des gosses pour ménager sa peine. D’où la colère des Parisiens.
À la date du 14 août 1719, dans le Journal de la régence, Jean Buvat écrit : « On tira des hôpitaux de Bicêtre et de la Salpêtrière cinq cents jeunes gens des deux sexes pour les embarquer à la Rochelle et les transporter au Mississipi. Les filles étaient dans des charrettes et les garçons allaient à pied, avec une escorte de trente-deux archers. » Ce sont les charters de l’époque, sauf qu’en ce temps-là la France exportait ses propres ressortissants… En septembre, Buvat note encore : « On apprit aussi de La Rochelle que les cent cinquante filles qu’on y avait envoyées de Paris pour être transportées au Mississipi s’étaient jetées comme des furies sur les archers, leur arrachant les cheveux, les mordant et leur donnant des coups de poing, ce qui avait obligé les archers de tirer leurs fusils sur ces pauvres créatures, dont six avaient été tuées et douze blessées ; ce qui avait intimidé les autres de telle sorte qu’elles se laissèrent embarquer. » Les prostituées, très nombreuses à cette époque, constituent également un gibier très recherché. Jean Buvat indique encore que les autorités parisiennes ont offert la possibilité à 180 filles ramassées sur le pavé de Paris de se choisir un époux parmi les hommes de la prison du même prieuré. « Après laquelle cérémonie, on les fit partir liés d’une petite chaîne deux à deux, le mari avec la femme, suivis de trois charrettes chargées de leurs hardes, et pour les soulager de temps en temps, ou pour voiturer ceux ou celles qui se trouveraient malades en chemin, escortés par vingt archers, pour les conduire à La Rochelle et de là être transportés au Mississipi, dans l’espérance d’une meilleure fortune. »
Arrestations arbitraires
On comprend que ces arrestations arbitraires et les déportations de masse révoltèrent le bon peuple de Paris. « Personne n’osait sortir pour ses affaires ou pour gagner sa vie, même les gens de métier et les domestiques dont plusieurs avaient été arrêtés, n’étant pas en sûreté hors de chez soi », ajoute Buvat.
Le mardi 30 avril, les émeutes reprennent. Des archers sont pris à partie rue du Roi-de-Sicile. L’un est tué et les autres blessés. Le procureur général du roi se rend dare-dare au Parlement pour expliquer aux magistrats que les archers et les exempts ont reçu l’ordre « d’arrêter les vagabonds et gens sans aveu, dont le nombre augmentait tous les jours dans la capitale ». Il admet aussi que des arrestations arbitraires ont pu être faites. Du coup, un projet d’ordonnance royale est rédigé à la hâte pour permettre aux personnes victimes d’une arrestation arbitraire d’être entendues dans leur prison par un commissaire ou officier de police, tous les jours à midi. Et c’est le garde des Sceaux, en personne, qui statuera sur le bien-fondé de la plainte. L’ordonnance prévoit aussi une réorganisation des conditions d’arrestation par les archers. Le lieutenant de police demande enfin aux corps des artisans et des marchands de Paris de lui fournir la liste exacte des « enfants, des garçons de boutique et des apprentis » afin d’éviter toute erreur lors des arrestations à venir. Ces décisions font revenir le calme dans Paris. Mais cela ne fait que déplacer le problème, car les archers et les exempts se mettent alors à écumer les campagnes ceinturant la capitale pour continuer à alimenter les colonies. Le 15 juin, une nouvelle ordonnance « portant défense d’arrêter et d’inquiéter les habitants de la campagne et gens de profession » est publiée. L’histoire de France est un éternel recommencement…
Sources : LePoint.fr et MosaikHub