Septième site le plus visité au monde, Wikipédia compte plus de 55 millions d’articles publiés dans 309 langues
« Wikipédia, c’est le plus grand bien commun numérique ». L’encyclopédie en ligne gratuite, l’un des derniers « dinosaures » de l’Internet libertaire et participatif, fête ses 20 ans. « Un petit miracle » à l’heure du triomphe des Gafam et de l’Internet marchand, décrit ainsi l’historien Rémi Mathis, ex-président de l’association Wikimedia France.
Créé le 15 janvier 2001 par l’Américain Jimmy Wales avec un but non lucratif, Wikipédia ambitionnait de réunir sur une même plateforme en ligne les savoirs de la planète grâce à des millions de contributeurs bénévoles. Le succès fut immédiat. Le premier site a été développé en anglais, les Wikipédia allemand et suédois ont suivi en mars 2001, et peu après dix autres – dont le français, l’italien, le chinois, le russe et le catalan.
Plus de 55 millions d’articles publiés dans 309 langues
Septième site le plus visité au monde, Wikipédia compte plus de 55 millions d’articles publiés dans 309 langues. Le contenu de chaque site est autonome : pas de traductions mais des contributions originales, parfois complétées par des robots à partir de données publiques.
Aux antipodes de l’encyclopédie traditionnelle rédigée par des experts reconnus, ce recueil de savoirs compilés par des amateurs, souvent anonymes, s’est attiré d’innombrables critiques, et l’hostilité de certains milieux académiques. « Lorsqu’on connaît plus en détail la façon dont Wikipédia est surveillé, les articles sont écrits, et la communauté échange, on peut quand même considérer qu’il y a un niveau de fiabilité globale qui est important », estime Lionel Barbe, maître de conférences à l’Université Paris-Nanterre.
Un manque de diversité
Reste un problème de diversité dans les sources et thématiques abordées, avec des angles morts sur des sujets liés aux pays en développement. En cause, le profil des contributeurs, majoritairement originaires des Etats-Unis et des pays occidentaux. « Le fait de vouloir bâtir une encyclopédie n’attire pas n’importe qui et les gens qui sont là sont souvent des CSP +, urbains, diplômés », appuie Rémi Mathis, auteur de Wikipédia : Dans les coulisses de la plus grande encyclopédie du monde (First Editions).
« A 80 %, voire plus, ce sont des hommes blancs qui écrivent des articles de Wikipédia », explique Marie-Noëlle Doutreix, maître de conférences à l’université Lyon 2. « On est passé de 15 à 18,6 % de biographies de femmes dans le Wikipédia francophone », se réjouit quant à elle Natacha Fault, fondatrice du projet « Les sans pages », visant à combattre les déséquilibres de genre. Mais « le gender gap ne sera jamais comblé car la réalité, c’est que les réalisations des femmes ont été très peu documentées » au cours de l’histoire.
« Nous ne nous sommes pas détournés de notre mission »
Malgré tout, à l’heure du triomphe des Gafam, l’encyclopédie en ligne fait figure de rare rescapée de l’utopie participative du Web libertaire, conçu comme « un réseau décentralisé d’échange et de connaissances », rappelle Lionel Barbe, pour qui « Wikipédia, c’est quand même le plus grand bien commun numérique que nous ait livré Internet ».
« Nous ne sommes pas détournés de notre mission par le souci d’engranger plus de revenus, donc nous ne sommes pas confrontés à ces problèmes que nous voyons aujourd’hui, cette question des algorithmes conçus de manière à encourager l’engagement afin d’augmenter les recettes publicitaires », explique son créateur Jimmy Wales. Il espère aujourd’hui que Wikipédia va essaimer dans les pays en développement. « Il est réellement important que le prochain milliard de personnes qui arrivent sur Internet aient envie d’y contribuer », explique le fondateur qui rêve d’une « institution qui dure aussi longtemps (…) que l’université d’Oxford. »
Source : 20minutes.fr