—Annie Chénieux —
Magnifique clôture de saison aux Bouffes du Nord avec Judith Chemla, Violaine incandescente de L’annonce faite à Marie mise en scène par Yves Beaunesne.
S’il est un auteur qui inspire Yves Beaunesne, c’est bien Paul Claudel. Après L’échange et Partage de midi(à la Comédie-Française en 2007), sa mise en scène de L’annonce faite à Marie, dans la version de 1911, illumine l’étrangeté de cette pièce opaque, mystérieuse, qui voit l’humain être traversé par le divin. La représentation de ce 3drame de la possession d’une âme par le surnaturel3, comme le définissait l’auteur, porté par une langue hautement musicale et poétique, trouve ici une puissance magnifiée.
Judith Chemla, bouleversante de sensibilité
Comment aborder ce conte moyenâgeux qui voit une jeune fille, Violaine, promise par son père à un fiancé, être rejetée, devenir lépreuse, achever sa vie dans la sainteté? Pour accompagner le balancement de la pièce entre l’histoire concrète et le mysticisme, entre le charnel et le divin, le visible et l’invisible, Beaunesne offre en résonance la composition musicale de Camille Rocailleux toute en sonorités médiévales. La scénographie de Damien Caille-Perret s’inscrit dans l’enceinte des Bouffes du Nord, les lumières de Joël Hourbeigt jouant avec les ocres décrépis des murs.
Par l’intensité du jeu, certaines scènes atteignent à une émotion profonde, et la beauté des tableaux rappelle des visions ancestrales et mythiques de grotte, de pietà…