— Par Jean ROGER, président de l’association CARIBBEAN LAGOONS — (www.caribbeanlagoons.com)
Alors que je m’active à ramasser les quelques déchets laissés par les visiteurs de la réserve naturelle de Petite-Terre, Guadeloupe, en cette fin de samedi 24 janvier 2015, travail faisant partie de ma mission d’écovolontaire de l’association Ti-Té, mon regard butte sur un bouchon de bouteille en plastique : d’un bleu ciel inhabituel pour les bouteilles de Guadeloupe, il revêt également une inscription peu créole, Sidi Ali. Ayant un peu voyagé ces dernières années, je n’ai aucun doute quant à l’origine marocaine de ce bouchon. D’ailleurs après vérification, il s’agit bien d’un bouchon portant la marque d’une eau minérale d’Oulmès, Maroc, que je viens de trouver dans la laisse de mer de la journée parmi les sargasses et autres posidonies, au niveau de la cocoteraie de Petite-Terre. Je le montre à mes collègues qui n’ont alors qu’une question : mais comment est-il arrivé ici ? Peu de chance qu’un touriste ait eu dans son sac une bouteille d’eau marocaine.
Il y a 3 ans, j’ai eu l’occasion d’aller avec mon équipe faire des recherches sur les submersions marines à Sainte Lucie. Mes investigations m’avaient alors poussé sur la côte Est de cette île voisine de la Martinique à la recherche de marqueurs géologiques de tempêtes ou tsunamis ayant eu lieu dans le passé. Sur les photos satellites, des baies magnifiques étaient bordées de plages vierges de toute construction. La réalité fût alors fortement déroutante quand nous nous trouvâmes face à des baies défigurées par d’immenses constructions de complexes hôteliers avortées il y a des années de çà et déjà recouvertes par la végétation. Il nous restait les plages. Mais quelle déception quand nous les vîmes recouvertes de milliers de bouteilles plastiques de toutes les couleurs et de toutes les formes. Et en creusant, nous en trouvions encore plus, jusqu’à 2 m de profondeur environ, maximum de nos sondages.
En assez bon état de conservation, nous pouvions lire leur origine, française, espagnole, sénégalaise et … marocaine.
Tels de grands navigateurs, elles ont donc certainement traversé l’océan Atlantique, au gré du vent et des courants équatoriaux, pour venir s’échouer sur les belles plages des Petites Antilles. Chacun est alors en droit de se demander pourquoi nous n’en trouvons pas autant en France ou en Martinique ? Tout simplement parce que l’effort de nettoyage du littoral par les associations de protection de l’environnement telle que Caribbean Lagoons Association (www.caribbeanlagoons.com), les collectivités et les particuliers y est beaucoup plus fort et plus régulier.
Ainsi, tout comme les échanges commerciaux sont devenus internationaux et ne tiennent désormais que très peu compte des frontières, les pollutions sont elles aussi devenues globales et les efforts de dépollution, sensibilisation, protection de l’environnement ne doivent pas s’arrêter aux simples frontières d’un pays.