La pièce « La réunification des 2 Corées » s’est jouée, samedi soir, à guichet fermé
— Par Roland Sabra —
On n’oubliera pas la querelle intense, passionnée qui traversé de part en part la reconstruction du lycée Schoelcher et notamment la question de l’existence d’une salle de théâtre : Fallait-il la supprimer, la réserver uniquement aux enseignements de l’art des planches, la réduire, lui donner plus d’autonomie ?
La bataille a été rude, mais très vite, dès le début, Gustavo Torrès l’architecte, maître d’œuvre du projet, en homme de culture accompli, s’est rangé du coté de ceux qui voulaient pouvoir offrir, en dehors des heures de cours la possibilité d’accès à une salle de théâtre dont la conception serait le reflet du multiculturalisme martiniquais. Bataille gagnée ! Le plateau sépare deux espaces bi-frontaux réservés au public. D’un coté, en léger arrondi, un théâtre à l’italienne et de l’autre un amphithéâtre, évocation d’un pitt, pour cette spécificité antillaise qu’est le conte.
En matière de visibilité quelque soit la place occupée la réussite est totale. Les fauteuils, confortables, font oublier les « tape-culs »(?) d’autres salles, oh! combien plus prestigieuses. Les loges d’artistes, équipées de douches sont spacieuses et fonctionnelles
L’accès au théâtre se fait par le parking souterrain du lycée totalement protégé à ces heures-là.
Le président de la CTM, pour qui « La culture est un vecteur majeur de reconnaissance du potentiel d’un peuple », mais que l’on ne voit jamais au théâtre, en particulier et aux autres spectacles en général, a néanmoins vite compris, le potentiel de cette salle en projetant d’installer dans les anciens bâtiments du lycée, qui jouxtent le théâtre, le Conservatoire de Musique et d’Arts de Martinique. Deux larges portes lui donnent accès à la salle de spectacle. Il faut espérer qu’en dehors de la légitime priorité accordée aux élèves et enseignants du lycée, pour lesquels elle a été conçue, d’autres publics, comme ceux, bien évidemment, des arts musicaux, mais pas seulement, y auront accès, pour des répétitions et des représentations.
Sept ans ont passé depuis la première mise en scène, par l’Autre Bord Compagnie du metteur en scène Guillaume Malasmé de « La réunification des 2 Corées » Nous écrivions à l’époque : »Les comédiennes et comédiens amateurs ont été dirigés. C’est indéniable. Ils font preuve d’une belle présence, d’une belle occupation du plateau et d’une belle économie de mouvements au service du propos. Se ressent une exigence de précision du geste et du dire que l’on ne retrouve pas toujours dans des troupes dites « professionnelles » que l’on connaît ici. La mise-en-scène, n’est pas une copie du travail de Pommerat mais une lecture différente, compte tenu de moyens ô combien différents, mais néanmoins fidèle à l’auteur. Il y a une belle alternance de moments drôles, graves, bouleversants et inquiétants. »
Pas une ligne à changer ! La troupe est différente, mais quelque soit le matériau sur lequel il travaille il semble que le metteur en scène aboutisse toujours à ce résultat qui comble le public. Et si la salle a semblé, parfois et pour certains, rire à contre-emploi on se souviendra de Simone de Beauvoir qui disait « On ne peut pas toujours regarder la mer et penser au prix du poisson ».
Le faible équipement de la salle en ce tout début de vie, absence de sonorisation, d’éclairage etc. ont été l’occasion pour Guillaume Malasmé d’inventer des formes de scénographies nouvelles, comme par exemple l’éclairage de scènes par des projecteurs portés sur le plateau par des comédiens non impliqués directement dans le propos. Un bel exemple de transformation d’un mal en bien, dont il faut espérer que les gestionnaires de la salle ne tireront pas argument pour ne pas doter le théâtre des équipements dont il a besoin.
Et puisque les choses n’existent qu’à être nommées, faut-il donner à ce théâtre un nom différent de celui du lycée Schoelcher ? 🙄 😎
Que vive ce théâtre !
Le 25/06/2023 à Fort-de-France,
R.S.