— Par Léon Mastail —
Dès le lendemain, si ce n’est le soir même du second tour des élections municipales, les différents groupes ou partis politiques de la Martinique, comme d’ailleurs ceux d’autres territoires, ont certainement dû procéder au décompte de leurs pertes et de leurs gains en voix et en élus, et donc mesurer à chaud le degré d’influence et de confiance qui leur a été, à cette occasion, accordé.
Des calculs évidemment essentiels, et toujours très attendus, dans la vie de ces acteurs politiques puisqu’ils servent de données et d’éléments d’appréciation à la fois sur la consistance des différentes forces en présence et sur la popularité et l’audience de leurs leaders respectifs. Un exercice peut-être même incontournable, surtout à l’approche d’une nouvelle consultation majeure avec le renouvellement de l’Assemblée de Martinique. D’ailleurs, un observateur politique n’a-t-il pas effectué, à partir des résultats de ces élections municipales, des exercices de projection arithmétique sur la prochaine élection en 2021 de l’Assemblée de Martinique ! Il s’agit cependant d’indicateurs à interpréter avec la plus grande prudence dans la mesure où l’élection de l’Assemblée est très différente des municipales en ce qu’elle a, entre autres, une nature politique très marquée, avec des enjeux cruciaux à l’échelle de tout le territoire. Mais au-delà de ces jeux politiques du calcul, d’autres questions interpellent. Dans quelle mesure, par exemple, l’appartenance politique des maires a un impact sur la gestion quotidienne de leur ville et sur les politiques mises en oeuvre ?
Qu’il s’agisse d’urbanisme, de logement, d’environnement et de développement durable, de gestion des écoles, des services aux seniors, de fourniture d’eau potable à leurs administrés… la présentation et l’analyse des projets des différents maires montrent des approches souvent similaires quel que soit leur bord politique : droite, gauche, autonomistes, indépendantistes, sans étiquette… Peut-être la différence entre ces municipalités se situerait-elle plutôt dans l’ordonnancement des priorités et des objectifs et sur leur capacité à trouver les financements nécessaires !
Mise en commun des énergies
Cette même façon de concevoir les projets et d’appréhender les problématiques qui y sont liées ne fait pas pour autant obstacle, lors de l’examen de ces questions, aux échanges parfois polémiques, voire même à quelques escarmouches entre élus, mais la raison finit toujours par permettre la rencontre des (grands) esprits qui se traduit par l’adhésion du plus grand nombre au projet concerné. Vu, en effet, la nécessité de prendre en compte les attentes et besoins des populations et d’y apporter des réponses publiques, vu également les contraintes financières qui pèsent toujours plus sur les collectivités et réduisent chaque jour leur marge de manœuvre et vu enfin le rejet, par ces mêmes populations, des querelles partisanes stériles, toutes ces considérations font que l’intelligence et la sagesse triomphent toujours. Et l’on trouve des accords, et même de bons accords, là où il n’y avait au départ que polémique. C’est cela le pragmatisme en politique, c’est-à-dire « une attitude fondée sur le réalisme et qui privilégie l’observation des faits. » Un pragmatisme qui devrait faire bien des adeptes, d’autant plus qu’en matière de politiques publiques, l’on est passé d’une logique des moyens à une culture des résultats.
C’est d’ailleurs ce pragmatisme qui explique que la plupart des délibérations des conseils municipaux sont votées, parfois avec quelques abstentions, plus rarement avec des voix « contre », mais souvent à l’unanimité.
Plus encore, les toutes récentes élections des conseils communautaires, à la lumière de leurs présidents élus respectifs et de la composition éclectique de leur bureau où semble-t-il l’appartenance politique n’a pas été un critère pertinent pour distinguer les élus qui y siègent, ne révèlentelles pas elles-aussi cette même forme de pragmatisme ?
Celui de la mobilisation et de la mise en commun de toutes les énergies et compétences de leurs assemblées respectives, revendiquées par tous, toutes étiquettes politiques confondues, avec cette même volonté de réaliser des investissements et équipements profitables à l’ensemble des administrés du territoire concerné, là où ils se trouvent.
En fait, il s’agit pour ces élus issus de différentes communes de construire de manière concertée et de gagner ainsi en efficacité, en exploitant et en transcendant justement leurs diversités d’approches spatiales. Badis Khenissa, chef d’entreprise et consultant français, ne disait-il pas fort à propos, que « l’espoir fait vivre. Le pragmatisme, lui, fait agir. »
Bref, un pragmatisme des élus communaux et communautaires de nature à leur permettre de répondre aux besoins présents, surtout à un moment où les populations dans leur reconquête d’une vie plus conforme à leurs aspirations, revendiquent des actes forts, et dans les délais.
Léon Mastail