Les origines du poisson d’avril restent obscures mais la tradition festive de personnes qui sont l’objet de farces ou de satires existe dans plusieurs cultures depuis l’Antiquité et le Moyen Âge : fêtes religieuses romaines des Hilaria célébrées le 25 mars ; la Holi, fête des couleurs hindouiste ; Sizdah bedar, fête persane ; Pourim, fête juive ; fête des Fous médiévale en Europe.
Un poisson d’avril très élaboré à Copenhague en 2001.
Les écrits folkloristes proposent de nombreuses origines mais il ne s’agit que de « vagues conjectures ».
Une première explication relie le poisson d’avril à la Pâques qui marque la fin du jeûne du carême, le poisson prenant une place alimentaire importante à cette période. De plus, l’ichthus chrétien, symbole graphique représentant un poisson, est un acronyme du nom de Jésus utilisé du Ier siècle au IVe siècle et le mot poisson serait une corruption du mot Passion.
Une autre hypothèse, couramment reprise par les médias, relie la date du 1er avril à la réforme calendaire au XVIe siècle. Au Moyen-Âge, dans plusieurs villes et régions européennes, l’année commençait à des dates variées (Noël, 1er mars, 25 mars) et correspondait selon le calendrier julien au Jour de l’an. Le 25 mars notamment était associé la fête de l’Annonciation à Marie avec la tradition de s’échanger des étrennes. En France, l’année civile débutait à différentes dates selon les provinces mais dans celles où elle commençait le 25 mars, il était courant de prolonger les fêtes mariales jusqu’au 1er avril. Le roi Charles IX décide, par l’Édit de Roussillon en 1564, que l’année débuterait désormais le 1er janvier, marque du rallongement des journées, au lieu de fin mars, arrivée du printemps. Le pape Grégoire XIII étend cette mesure à l’ensemble de la chrétienté avec l’adoption du calendrier grégorien en 1582. Selon la légende, beaucoup de personnes eurent des difficultés à s’adapter au nouveau calendrier, d’autres n’étaient pas au courant du changement et continuèrent à célébrer le 1er avril selon l’ancienne tradition. Pour se moquer d’elles, certains profitèrent de l’occasion pour raconter aux étourdis des histoires pour rire et leur remettre de faux poissons correspondant à la fin du Carême. Ainsi naquit le fameux poisson d’avril, le jour des fous, le jour de ceux qui n’acceptent pas la réalité ou la voient autrement. Cette hypothèse de la réforme calendaire, qui s’appuyait sur le fait que la tradition du poisson d’avril est bien attestée au XVIe siècle, est cependant contredite car l’expression ou la notion de poisson d’avril est évoquée dans plusieurs écrits antérieurs à 1564, notamment un poème de Pierre Michault en 1466, Le livre de la deablerie (diablerie) du curé Eloy d’Amerval en 1508 ou un poème dans l’œuvre Testament rhetoricae d’Eduard de Dene en 1539.
Une autre origine viendrait de l’usage dans différents pays d’ouvrir la saison de pêche le 1er avril ou au contraire dans d’autres de la suspendre, afin de respecter la période de reproduction. Pour faire un cadeau aux pêcheurs, et pour se moquer un peu d’eux car la pêche était soit trop facile (abondance le jour d’ouverture), soit infructueuse (jour de suspension), on leur offrait un hareng. C’est alors qu’une habitude populaire s’installa : on accrochait subrepticement un vrai poisson dans le dos des gens. Comme les habits étaient plus larges, les victimes ne s’en apercevaient pas tout de suite, de sorte que le poisson devenait de plus en plus gluant et puant. Ainsi naquit le goût de faire ce jour-là des petits cadeaux pour rire, des plaisanteries ou des mystifications. Là encore cette hypothèse est rejetée, les archives historiques mentionnant le choix d’autres dates par les autorités gérant les pêches.
Selon le folkloriste Alan Dundes (en), plusieurs usages semblent s’être en fait mélangés avec celui du carnaval en ce jour qui est une probable émanation d’anciens rites de fertilité et d’inversion, de fêtes au cours desquelles les victimes de farces sont confrontées à un rite calendaire de passage : influence des fêtes antiques, sortie du signe zodiacal des Poissons (dernier signe de l’hiver et dernier signe zodiacal), avril considéré au Moyen-Âge comme le premier mois du printemps (le 1er avril étant fixé comme un rite printanier), prolongement la période du carême où il n’est permis de manger que du poisson.
En France, au début du XXe siècle, on s’envoyait de jolies cartes postales toutes ornées d’un poisson d’avril et richement décorées.
Le musée du château de Dieppe conserve une très importante collection de cartes postales sur ce thème.
Cette coutume de faire des plaisanteries s’est répandue dans de nombreux pays, bien que le poisson ne se soit pas toujours exporté en même temps :
les Américains et les Britanniques ont conservé leur April Fool’s Day (certains Écossais parlent aussi de Gowk ou de Cuckoo),
les Allemands ont leur Aprilscherz,
cette coutume existe aussi au Danemark, aux Pays-Bas, en Belgique, au Canada, en Italie, en Pologne, au Portugal, aux États-Unis, en Suisse, en Suède, en Finlande, ou même au Japon,
en Russie il s’appelle le « jour des fous » (den dourakov). En Roumanie, il s’agit de la « tromperie/duperie du 1er avril » (păcăleală de 1 aprilie),
au Portugal et au Brésil il s’appelle « jour des mensonges » (dia das mentiras)…