— Par Roland Sabra —
Edito de septembre 2007
Admirable pays que celui dans lequel, les poètes écrivent et inventent eux-mêmes la geste politique. « Dean » aura mis en pleine lumière cette évidence : les seuls vrais politiques en Martinique sont des poètes. Dans le fracas du vent déracinant les arbres, dans le fatras des chamailleries et autres pleurnicheries politiciennes un seul discours mérite l’attention, un seul qui prenne la hauteur nécessaire, un seul qui propose l’ouverture d’une trace : celui de Chamoiseau et de Glissant. Il reste à la « Une » de cette Lettre de rentrée pour qu’il soit dit que ces choses là avaient été dites.
La classe politique dans son ensemble à montré combien elle était attachée à ce que rien ne bouge, rien ne change occupée qu’elle est dans sa dispute de préséance pour recevoir les subsides de « Maman France ».
Interdire les panneaux publicitaires qui enlaidissent la Martinique et qui se révèlent être des lames de rasoirs quand ils s’envolent ce serait oublier qu’ils sont installés pour le profit des békés reconvertis dans l’import-export. Vous n’y pensez pas! Si Almont et Manscour auront tenté quelque chose en la matière. Letchimy aura décroché la palme du jésuitisme politicien en défendant une position « autonome » (?) « médiane » entre interdiction et réinstallation, puisqu’il demande aux publicitaires de mieux attacher les panneaux et de prévoir leur démontage en cas de tempête. Lors du prochain coup de vent tous à vos clés à molette!
Que tout change pour rien ne bouge!
Interrogé sur RFO, pour savoir s’il ne fallait pas remettre en question les cultures d’exportation ( qui accroissent notre dépendance vis à vis des marchés extérieurs) au profit des cultures vivrières Michel Barnier, Ministre de l’agriculture répond que pas un seul homme (ou femme) politique martiniquais n’a évoqué cette question dans l’ensemble des réunions qui se sont tenues depuis la catastrophe!
Que tout change pour que rien ne bouge!
Brisons là, quittons l’arène et revenons à la culture.
Si la rentrée est chargée, comme en témoigne l’EloKanS de Veronique Larose, elle se fait dans un climat de crise généralisée des Arts du spectacle vivant. On lira à ce propos les articles de la rubrique théâtre. Le rôle du metteur en scène, le financement public/privé de la création, le statut des artistes dans nos sociétés, la place du public, tout semble être remis en cause. La Martinique n’est pas à l’abri de l’onde de choc de cette déflagration. Depuis quelques années, Madinin’Art et Le Naïf ne cessent de mettre en garde contre les dérives, mépris du public, des auteurs et des textes, narcissisme exacerbé des metteurs en scène, nombrilisme incommensurable de « comédiens » qui ravalent le métier au rang de passe temps, financements de projets par le copinage politique, attribution de subventions sans exigence de résultats, impasse sur l’évaluation des productions, glorification systématique et auto-célébratrice de tout spectacle un tant soit peu « local », etc. L’ensemble des articles consacrés à cette gabegie est consultable sur le site.
Certes les problèmes soulevés par la crise ne sont pas nouveaux, mais la diversification, l’éclatement même de l’unité, si tant est qu’elle ait existé, du champ culturel des Arts du spectacle vivant, dans un contexte politique de marchandisation croissante de la vie culturelle, dans une période de restriction budgétaire exacerbent les contradictions.
Le débat est ouvert. Madinin’Art compte bien y participer.
Roland Sabra