Fort de mon expérience d’acteur et d’observateur, dès les années 70 dans les 3 océans, la vie a voulu que je sois en ce moment le témoin d’une semaine de déferlement de violence, mettant à terre 30 années de pacification et de concorde. Tout est allé très vite et je n’ai toujours pas compris ! C’est avec un peu de recul que je vous partage ce témoignage. Partant du principe que toute impression hâtive peut être source de mauvaise interprétation. Je dirais aujourd’hui :
Stupeur et tremblements
Devant ce point de basculement dans un accès de fièvre dévastatrice et incontrôlable. Et surtout à l’allure bien orchestrée ! En moins de 5 jours tout ce qui avait été construit en activité économique durant des décennies était à terre ! Dans les larmes et dans le sang.
Je n’avais pas ressenti de signes avant-coureurs dans ma grande proximité d’homme de terrain. Au contact d’interlocuteurs que ce soit dans l’entreprise ou dans mes nombreuses visites dans les commerces à l’observation du marché, à l’écoute des consommateurs, ou dans la vie courante. Si ce n’est une grande inquiétude pour l’avenir face aux difficultés économiques nées de l’écroulement de la filière Nikel dans un marché mondial sujet à concurrence, spéculation, voire convoitise. Le mirage s’est estompé pour laisser place aux fumées à l’assaut des nuages dans un orage solaire. Une fin de quelque chose. Et le début d’une autre histoire qui reste à écrire.
Je lis, j’écoute beaucoup de propos relatés sur cette actualité brulante, au sens propre comme au sens figuré. Et sur la complexité de ce dossier dont il m’a fallu pas moins de 2 mois pour m’en remémorer l’historique et l’évolution au fil des ans et de mes passages sur le « caillou ». Et l’identité et le profil de ceux qui portent les destinées du territoire. Dans les 2 camps et je dirais même 3 avec le pouvoir central. Encore une fois la lecture de la situation est difficile et toutes les hypothèses méritent d’être considérées. D’autres sont plus qualifiés, plus audacieux, voire plus prétentieux que moi pour le faire.
Ces évènements sont tragiques. Et marque une grande régression. Mais pas si sûr, tant ce chaos peut être une vraie opportunité de ressouder les gens, si ça s’arrêtait là. Sur la base de mon observation d’une qualité de dialogue bienveillant et respectueux dans la vie de tous les jours. Ou j’ai vu plus de sourires que de crispations.
Et cela pourrait donner effectivement tort aux ennemis de la vérité. De quelque bord, ou quelque lieu, que ce soit.
Être solidaires …pas solitaires
Il est difficile, et pour tout le monde, d’avoir une analyse objective à 20 000 kilomètres. Le destin m’a donné la possibilité d’être là, en ce moment tragique. Je me risque à vous livrer ce témoignage avec humilité et sincérité. J’ose vous interpeler face à un monde dangereux qui appelle à la vigilance et à la cohésion. Je prends cette réalité en pleine face. Il convient d’être forts ensembles et il faut s’aider pour ne pas céder.
En ce jour, au moment de quitter le caillou dans les prochaines heures, je suis très triste à l’idée que mes amis calédoniens, dans leur très grande majorité, puissent avoir été l’objet et les victimes de choses qui les dépassent et qui ruinent leur avenir. Surpris par la violence de cette armée improvisée, d’une jeunesse invisible en souffrance, en proie aux tentations de la modernité génératrice de frustrations. Les mobiliser a sans doute été chose aisée jusqu’à que leur contrôle échappe à leurs créateurs.
Que nos frères calédoniens, dans leur grande diversité et dans une légitimité partagée, puissent trouver une réponse immédiate et une opportunité insoupçonnée de démontrer au monde que l’espérance est un risque à courir, dans l’unité, dans le respect, dans la résilience et dans la confiance en leurs capacités.
Ce qui compte c’est demain, ou il leur faudra mobiliser toutes leurs énergies et redoubler d’efforts. En oubliant les utopies au profit de la réflexion et de l’action.
De tout cœur avec eux.
Nouméa le 30 MAI 2024
Guy POLLIER