Nos voix. Nos droits
Après consultation publique et afin de porter les voix des Martiniquaises au Grenelle sur les violences conjugales initié par le gouvernement, le Collectif du 8 Mars recueille ici les témoignages et propositions des citoyennes.
Fait, le samedi 31 août 2019, à Fort-de-France
27 propositions / 104 témoignages
I/ Une politique régionale de lutte contre les violences faites aux femmes
1) Faire entrer la question des violences faites aux femmes dans les projets politiques de chaque collectivité (Collectivités territoriales, Communautés de communes, municipalités) avec un·e référent·e dans chacune d’entre elles.
2) Une ligne budgétaire permettant la mise en œuvre de ladite politique.
3) Une plus grande réactivité des policiers/gendarmes
« Mon voisin a traîné sa femme par les cheveux et l’a frappée en pleine rue. Nous avons appelé la police tout de suite, ils sont arrivés une heure après. Elle s’était déjà enfuie avec l’aide d’un autre voisin et nous avons dû seul·es retenir le mari violent. Ce n’est pas la première fois que ça arrive ! »»
Sophia, 25 ans
II/ Un parcours de soutien plus lisible et plus accessible
4) Un numéro local (et pas le 39 19) accessible 24/24h et 7/7j
« Ma sœur a essayé d’appeler, il était 6 heures du soir le 39 19 était fermé. Il faudrait un numéro d’ici avec les horaires d’ici »
Marie-Pierre, 32 ans
24 femmes ont exprimé le même désir
5) Plus de logements d’urgence, spécifiques pour les femmes victimes de violences (pour l’instant, le 115 ne fait pas de distingo entre les hommes et les femmes en grande précarité et les femmes violentées.
« Que les femmes victimes de violences conjugales puissent se reloger rapidement »
Sylvia, 54 ans
6 femmes ont exprimé le même désir
6) Rendre accessible les informations sur les recours et les parcours de soutien aux victimes.
ex : un guide d’information et d’orientation contre les violences accessible en ligne, sur les réseaux sociaux, dans les mairies, les CCAS, les commissariats, gendarmeries, les établissements scolaires, les antennes de sécurité sociale, les cabinets médicaux… Et prévoir à intervalle régulier des campagnes.
20 femmes ont exprimé le même désir
« Quand j’ai porté plainte contre mon compagnon, j’ai trouvé qu’il n’y avait pas de suivi, on ne m’a indiqué aucune association ou groupe de soutien. J’aimerais que les choses soient plus claires parce qu’on est vraiment désemparée. »
Franscesa, 29 ans
« Le mari de ma tante a essayé de la brûler vive dans son lit, pendant qu’elle était enceinte. Elle ne savait pas où aller »
Aliette, 27 ans
« Plus d’espaces de parole pour les femmes qui ont subi des violences
Marie, 32 ans
8 femmes ont exprimé le même désir
7) «Créer un seul espace qui regroupe des professionnel·les (psy, avocate, assistante sociale, pôle emploi) car quand on est traumatisée, devoir courir dans plusieurs administrations, c’est compliqué. Un endroit unique où se reconstruire socialement, c’est bien»
Aurélie, 37 ans.
4 femmes ont exprimé le même désir
8) Des capsules vidéos expliquant les démarches à suivre, les recours et qui feraient l’objet de campagnes trimestrielles.
« Pas d’informations audio-visuelles sur ce qu’il faut faire en cas de violences conjugales »
Valériane, 26 ans
2 femmes ont exprimé le même désir
III/ Un meilleur accueil des femmes victimes de violences
Les femmes doivent se sentir en sécurité et en confiance dans les commissariats et gendarmeries.
38 femmes ont exprimé le même désir
9) Exiger un principe de neutralité de la part des agent·es recueillant les plaintes.
« 1h30 par d’attente pour prendre ma plainte. Mon mari m’a battu à plat de coutelas. On m’a dit que j’aurais dû partir. 6 mois plus tard et rien n’est arrivé à mon mari »
Anaïs, 38 ans
10) Formation de policier·es et de gendarmes référent·es dans chaque commissariat/gendarmerie de Martinique. Un binôme référent constitué d’un homme et d’une femme sur le modèle en cours en Grande Bretagne.
« J’aimerais qu’on soit prise au sérieux. Quand j’ai porté plainte contre mon mari violent, j’ai dû écrire au procureur pour qu’on reçoive ma plainte. Les policiers voulaient que je dépose une main courante. Et quand on m’a enfin reçu, j’ai entendu « mais pourquoi vous êtes restée avec lui » « qu’est-ce que vous avez fait pour qu’il s’énerve comme ça. » Finalement, j’ai arrêté d’aller au commissariat et je me suis mise à l’abri toute seule. »
Justine, 55 ans
12 femmes ont exprimé le même désir
« Former les policiers à l’empathie et à la gestion des violences psychologiques et pas seulement aux coups »
Paulette, 83 ans
2 femmes ont exprimé le même désir
11) « Un traitement plus rapide des plaintes »
Josiane, 26 ans
2 femmes ont exprimé le même désir
12) Formation de tous les personnels médicaux, sociaux, des enseignants sur l’écoute des femmes et filles victimes de violences.
« J’ai vécu des violences pendant plus de 20 ans, J’avais peur d’en parler à ma famille alors aux gendarmes, c’était impossible ! Il m’a fallu de la force pour en parler même aux gens qui ne me croyaient pas. Je voudrais qu’il existe plus de lieux où briser le silence»
Marie-France, 67 ans
7 femmes ont exprimé le même désir
« Former les professionnelles de santé sur les mécanismes de la violence dans les relations amoureuses pour qu’elles·ils sachent répondre et accompagner les victimes »
Fabienne, 40 ans
13) Dépliants d’information à déposer dans tous les organismes publics, avec les contacts pour accompagner les femmes après la plainte.
« Qu’il y ait des flyers et des documents accessibles partout »
Cynthia, 33 ans
3 femmes ont exprimé le même désir
14) « Faire un fichier de toutes les victimes pour que les services de l’état puissent les contacter et les suivre »
Isabelle, 39 ans
15) « Apporter une aide financière d’urgence aux femmes qui partent sans rien, avec leurs enfants. »
Sonia, 24 ans
IV/ Une meilleure protection des victimes
Pour éviter les récidives et la protection des femmes à la sortie des hommes de prison.
16) Mise en place de collaboration avec les services de justice, de préfecture, de douane pour aider les femmes à quitter rapidement le territoire
« Que les femmes se sentent protégées une fois qu’elles ont porté plainte et qu’on les aide à se relocaliser si nécessaire »
Nathalie, 44 ans
2 femmes ont exprimé le même désir
17) La création pour les femmes victimes de violences et de mesure de protection judiciaire, d’une « chape de silence administrative »
Il est en effet très facile de trouver l’adresse de quelqu’un en consultant les impôts par ex, ou d’obtenir un numéro de téléphone si la femmes victime change de numéro et oubli de se mettre sur liste rouge.
Cette chape silence = sur demande de la justice, toutes les administrations (impôts, EDF, CAF, CGSS) et les opérateurs téléphoniques doivent refuser l’accès à ces informations à toute personne qui n’est pas la femme elle-même y compris des (pseudos) huissiers.
« J’ai dû déménager 3 fois. J’ai peur pour ma vie. Je suis en Martinique depuis un an et j’ai peur qu’il me retrouve par mon téléphone ou par la CAF»
Myriam, 27 ans
7 femmes ont exprimé le même désir
18) « Un bracelet électronique pour les hommes violents »
Sabine 28 ans
V/ Mesures spécifiques pour les femmes migrantes
19) Informer les agent·es de la préfecture que les femmes victimes de violences conjugales ne sont pas expulsables si elles portent plainte
« Femme de ménage et étrangère j’ai été violentée par mon conjoint. J’étais à sa merci. J’avais peur de porter plainte car j’avais peur qu’on me prenne mes enfants. Mon conjoint disait qu’on m’expulserait si je divorçais. J’ai fini par aller chez une amie martiniquaise au Gros Morne. J’ai été porter plainte avec elle. La seule chose qui intéressait les gendarmes c’était mes papiers ! »
Ulyssine, 45 ans
20) Informer les femmes étrangères victimes de violences conjugales que si elles portent plainte, elles ne sont pas expulsables. Ces affiches en créole, en anglais, en espagnol, doivent être présentes dans tous les commissariats, gendarmeries, centres de rétention et services des étrangers à la préfecture
VI/ Un renforcement des moyens pour prévenir la violence
La violence envers les femmes a cela de spécifique qu’elle existe parce que la victime est une femme. Elle s’enracine donc dans les stéréotypes et croyances sexistes et sexuels liés au genre féminin. Ces stéréotypes et croyances peuvent être déconstruits.
« Plus d’informations pour la prévention des violences. Et des formations pour les jeunes filles qui ont tendance à se laisser dominer »
Paule, 30 ans
21) Au rectorat
• Un poste de référente égalité fille-garçon à plein temps (et non à temps partiel comme c’est le cas pour l’instant)
• des interventions systématisées auprès des élèves, mais aussi auprès de la communauté éducative.
« On devrait former les jeunes à la prévention de la violence dans le couple et aussi à la reconnaître. Quand j’étais au lycée, j’ai eu une seule intervention sur le sujet. C’est pas assez ! »
Valérie, 22 ans
« On devrait former le personnel à reconnaître les signes de trauma chez un enfant qui vit dans un couple violent. »
Régine, 48 ans
22) A la Collectivité Territoriale
• L’obligation de modules égalité femmes-hommes dans toutes les formations professionnelles financées par la Collectivité.
• L’obligation de formation des agent·es de la collectivité à l’égalité femmes-hommes
23) Dans les municipalités : obligation de formation des agent·es de la municipalité à l’égalité femmes-hommes
24) Des règles claires quant à l’utilisation de l’image des femmes dans les médias
• Création d’un guide de communication non sexiste à l’usage des communicant·es (on peut partir du très bon outil fait par le JDP, Jury de déontologie Publicitaire, https://www.jdp-pub.org/)
• Obligation de formation sur une communication non sexiste pour les créatifs publicitaires des agences souhaitant répondre à des appels d’offres publics
« Ces femmes qu’on va partout offertes, font que les hommes se croient autorisés à se servir du corps des femmes. Il faudrait que l’état comprenne qu’il y a un rapport entre les deux »
Cécile, 38 ans
2 femmes ont exprimé le même désir
25) Un renforcement du financement des campagnes de prévention contre les violences faites aux femmes, permettant des diffusions pluriannuelles
« Que les associations aient plus de moyens et soient plus présentes et visibles dans les campagnes de prévention »
Martine, 25 ans
2 femmes ont exprimé le même désir
VII/ Prévention des violences médicales faites aux femmes
26) « Que les gynécologues demandent le consentement des femmes avant un examen vaginal »
Marianne, 38 ans
27) « Inscrire sur le carnet de santé que la mère a été victime de violences pour comprendre certains traumas et comportements »
Isabelle, 42 ans