Le festival OFF d’Avignon se met au vert


— Par Guillemette de Préval —
Pour des raisons écologiques et économiques, Pierre Beyfette, président du festival OFF d’Avignon, a annoncé mardi 12 février vouloir diminuer drastiquement le nombre d’affiches collées dans la ville. Une proposition accueillie favorablement chez les compagnies mais qui oblige à inventer d’autres façons de communiquer.
Chaque mois de juillet, Avignon se transforme en théâtre à ciel ouvert. En marge du Festival d’Avignon, le « In », le festival Off, réunit plus de 1 500 spectacles indépendants. Du jour au lendemain, les rues de la ville se tapissent de centaine de milliers d’affiches.

Pour répondre à ces dégradations écologiques, son président Pierre Beyfette a suggéré, mardi 12 février, de limiter drastiquement le nombre d’affiches en vue de la prochaine édition, qui se tiendra du 3 au 26 juillet. « L’affichage est interdit dans les villes. Mais à Avignon, en période de festival, la mairie édite un arrêté pour l’autoriser. On va demander à la mairie de ne plus l’éditer pour mettre fin à l’affichage sauvage », a indiqué à l’AFP Pierre Beyfette, dans la présentation du premier plan environnemental du « Off », étalé sur quatre ans.

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« On n’a pas le choix, on ne va pas regarder la planète se dégrader. Nous sommes le plus grand festival de France », a-t-il souligné. Et de chiffrer « a minima, ça fait un total de 300 000 affiches par festival, soit 30 tonnes, soit environ 450 arbres par festival ! »

Et si la réduction de l’empreinte carbone est l’une des motivations premières, le coût économique entre aussi en jeu. « Les affiches sont une vraie source d’injustice car les budgets diffèrent entre compagnies. Nous préconisons 200 affiches par spectacle mais il y a des compagnies qui vont jusqu’à 2 000… », déplore Pierre Beyfette.

Privilégier l’échange avec le public

La proposition attend donc la décision de la mairie mais elle semble faire l’unanimité auprès des compagnies de théâtre. « C’est un vrai gâchis de papier », reconnaît Marie Guyonnet, metteure en scène. Elle dirige la compagnie Le Théâtre de la Boderie, qui a présenté un spectacle l’année dernière. « Chaque année, je me demande si cela vaut le coup d’en imprimer. Les règles sont détournées. Les plus grosses structures de production arrivent avec une armée d’afficheurs. Certains accrochent des banderoles de 20 affiches reliées les unes aux autres… Il peut y avoir des jeux d’intimidation entre compagnies ! C’est une vraie foire d’empoigne. »

Un sentiment d’hostilité également vécu par la comédienne Céline Pitault. L’an passé, sa compagnie Les Airs entendus était présente au « Off ». « La première journée est une bataille, se remémore-t-elle. Chacun s’empresse pour obtenir les meilleures places. Ensuite, au fil du festival, on essaie de recoller quelques-unes de nos affiches au-dessus des autres. En vain. On n’y voit plus rien. Tout ça alors qu’il suffit d’un soir d’orage ou un coup de mistral et tout est balayé… »

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L’inefficacité des affiches semble donc être unanimement éprouvée. Comme beaucoup d’autres compagnies, Marie Guyonnet et son équipe privilégient donc le tractage. « Contrairement à l’affichage, tracter permet un contact direct avec le public. On prend le temps d’échanger sur son spectacle. Et le meilleur outil, ça reste le bouche-à-oreille. »

Mais le tractage lui-même sera soumis à une diète relative. Pierre Beyfette a en effet annoncé que le « Off » souhait le limiter. La plupart des tracts, recouverts d’un vernis, n’étant pas recyclables.

Faire appel à l’imagination

Si elle regrettera sûrement le visage festif de cette « ville théâtre » foisonnant d’affiches, Camille, bénévole à la compagnie Les Gavroches Chapeautés venue au « Off » il y a deux ans, est optimiste : « Il va falloir s’adapter, réinventer une façon de communiquer. On pourrait réfléchir à une application sur laquelle les spectateurs retrouveraient toutes les informations du spectacle. Ou proposer davantage de parades, ces petits extraits de spectacles animés par les compagnies, dans les rues d’Avignon. »

Revenir à plus de sobriété n’effraie pas plus Céline Pitault. « Si on nous demande de limiter les tracts, je pense qu’on pourra gagner en qualité. Ils seront probablement distribués aux festivaliers de manière plus consciencieuse. Pour eux aussi, le fait de limiter les tracts sera positif. Ils sont tellement assaillis ! Et puis, n’y a-t-il pas, tout simplement, trop de spectacles programmés ? »

Guillemette de Préval

Source : LaCroix.com