À 18 heures, le mercredi 30 juin, Outre-Mer Olympique / le jeudi 1er juillet, Massacre River
En partenariat avec la cinquième édition du Festival Les Révoltés du Monde, qui a pris fin à Fort-de-France ce dimanche soir, la commune de Schoelcher a sélectionné deux films, qui seront projetés à l’Esplanade Osenat Case Navire, rue Emmanuel Osenat.
Outre-Mer Olympique était hors-programmation à Madiana, il s’agit du documentaire déjà proposé ce lundi par la chaîne Guadeloupe la 1ère, et vu à la médiathèque de Sainte-Luce dans une soirée « autour du corps noir », animée par Mathieu Méranville. Ce dernier est l’auteur du film Outre-Mer Olympique, Vianney Sotès en est le réalisateur. Une initiative bienvenue avant le coup d’envoi des Jeux olympiques de Tokyo, le 23 juillet 2021. Un documentaire inédit où « l’histoire du sport se conjugue avec l’histoire humaine. »
Le film
C’est dans les années quatre-vingt-dix que l’Hexagone prend conscience de l’importance des champions ultramarins. Cette décennie permet également de faire éclater leur talent à la face du monde. Ces années-là constituent d’une certaine façon le point de départ de la grande épopée du sport d’Outre-mer aux Jeux Olympiques.
Mais l’histoire d’amour entre l’olympisme et les sportifs ultramarins a débuté bien avant, aux Jeux d’été de Berlin en 1936, avec le pionnier Maurice Carlton, qui participe aux épreuves du 100 mètres et du 4 x 100 mètres. Dans la capitale du Reich, le sprinter guadeloupéen côtoie et se lie d’amitié avec le quadruple champion olympique afro-américain Jesse Owens, qui impose la figure de l’athlète noir. Au grand dam d’Adolf Hitler qui avait voulu faire de ces Jeux allemands le symbole de la supériorité de la race aryenne. Au cours des décennies suivantes, tout n’a pas toujours été simple pour les héritiers de Maurice Carlton, qui ont dû redoubler d’efforts pour se faire accepter en équipe de France. Discriminations, arrachement à leur terre, rien ne leur a été épargné pour qu’ils puissent assouvir leur rêve olympique !
Aujourd’hui, qui mieux que Teddy Riner, double champion olympique de judo, peut incarner l’histoire d’amour que la France entretient avec les Jeux Olympiques ? Icône du sport tricolore, adulé du public, Teddy Riner, né en Guadeloupe, ne manque pas une occasion de revendiquer son attachement à sa région d’origine, comme beaucoup d’athlètes ultramarins. Leur forte présence dans la délégation tricolore marque l’originalité de la France lors des cérémonies d’ouverture des J.O., à tel point que quatre champions venus d’Outre-Mer ont été désignés “porte-drapeau” : Marie-José Pérec, Jackson Richardson, Laura Flessel et Teddy Riner.
Le journaliste Mathieu Méranville, spécialiste de l’olympisme, et le réalisateur Vianney Sotès sont partis en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à La Réunion, à la rencontre de ces hommes et de ces femmes qui ont permis l’émergence du sport ultramarin, et fait briller leur pays au niveau international. Grâce à leur documentaire, on découvre les champions d’Outre-mer de demain, on redécouvre les champions d’hier et d’aujourd’hui, et leur contribution à cette histoire spécifique de l’olympisme français.
L’auteur
C’est à Monésie qu’est né Mathieu Méranville, le plus célèbre des habitants de ce quartier de Sainte-Luce. Après une enfance en Martinique, une adolescence à Rennes, des études de journalisme à Lille, il travaille depuis une vingtaine d’années à la rédaction de France 3 à Paris, et collabore depuis peu à la chaîne France Info. Spécialiste de sport, il a couvert les Jeux Olympiques de Sydney en 2000, auxquels il a consacré un livre éponyme. Il a couvert également de grandes compétitions aux quatre coins de la planète, ce qui fait de lui un fin connaisseur du monde de l’athlétisme, de la natation ou du football. Très concerné par les discriminations qui n’épargnent pas les stades, il a publié en 2007 l’ouvrage Sport, malédiction des Noirs ?, dans lequel il convoque Jesse Owens, Laura Flessel, Surya Bonaly ou Lewis Hamilton autour de cette question : « Et si le sport n’était finalement qu’un nouveau ghetto ? ». On lui doit aussi l’ouvrage Muscles Noirs, Corps Ebènes, où l’on voit que longtemps avant les sportifs contemporains, d’autres champions, leurs devanciers, ont utilisé leurs muscles noirs et leur corps d’ébène comme moteur de réussite et facteur d’émancipation. Dans la Grèce et la Rome antiques, les auteurs ont célébré le corps noir. Ce livre, c’est l’histoire du corps noir rompu à la « pratique sportive », depuis l’Antiquité jusqu’au début du 20ème siècle.
Le réalisateur
Vianney Sotès est un réalisateur indépendant. Il est connu pour Scolopendres et papillons (2019), co-réalisé avec LaureMartin-Hernandez, et qui a reçu le Prix du Meilleur Documentaire Antilles-Guyane (CinéMartinique Festival 2020) et le Prix Spécial du Jury (FIFAC 2019, Saint-Laurent du Maroni, Guyane). Un film qui plonge avec pudeur dans l’intimité de trois femmes martiniquaises en quête de résilience : tels des papillons, meurtris par de féroces morsures de scolopendres, elles tentent de déployer à nouveau leurs ailes…
Massacre River a obtenu lors de sa diffusion à Madiana le prix du Meilleur Film Caribéen.
Il sera projeté en présence du Docteur Max Casimir, et suivi d’une clôture musicale.
Réalisé par Suzan Beraza, réalisatrice hispano-latino-américaine elle-même née et grandie dans les Caraïbes, c’est « une œuvre parfaitement aboutie », qui au travers d’un beau portrait de femme nous interpelle, non seulement sur la place de Haïti dans le monde, sur le partage d’un territoire en deux états, frères ennemis – séquelle de la colonisation –, mais de façon plus générale, sur tous les problèmes d’immigration qui aujourd’hui déchirent le monde. Un documentaire qui n’a laissé personne indifférent !
Une critique détaillée, réalisée lors du festival, est à lire dans Madinin’art.
Fort-de-France, le 29 juin 2021