— Par Sabrina Solar —
Depuis plusieurs années, les voix s’élèvent pour alerter sur les insuffisances du système éducatif concernant l’enseignement de la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS) chez les jeunes. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a récemment mis en lumière une baisse significative de l’utilisation des préservatifs chez les adolescents, augmentant le risque de grossesses non désirées et d’infections sexuellement transmissibles. À cette préoccupation s’ajoute celle soulevée par le Conseil économique, social et environnemental (Cese), qui dénonce le manque criant de respect de l’obligation légale d’éducation à la sexualité, une carence aux lourdes conséquences sanitaires, sociales et économiques.
Le 10 septembre dernier, le Cese a adopté en séance plénière un avis intitulé « Éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle », avec 119 voix pour. Ce texte met en évidence l’importance de garantir aux enfants et adolescents une éducation globale qui les aide à construire leur identité affective et relationnelle, tout en les outillant pour comprendre et gérer leur sexualité. En effet, malgré une loi de 2001 imposant trois séances annuelles d’éducation à la sexualité tout au long de la scolarité, seules 15 % des élèves bénéficient de ces cours. Ce constat alarmant est d’autant plus préoccupant que les jeunes expriment un véritable besoin d’accompagnement dans ces domaines sensibles. Dans une société où l’exposition à des contenus pornographiques survient souvent avant l’âge de 10 ans, les laisser sans repères revient à les isoler face à des questions complexes.
Le rapport du Cese va plus loin en proposant une série de recommandations pour rendre l’EVARS réellement accessible à tous. Parmi elles, l’organisation d’un débat de société sur les violences subies par les enfants, une grande enquête nationale auprès des jeunes en situation de handicap, ou encore le financement de contenus pédagogiques adaptés pour promouvoir une éducation complète. En outre, le Cese préconise la mise en place d’un plan de formation pour les enseignants et autres intervenants, afin qu’ils puissent traiter ces sujets avec une expertise accrue, en s’appuyant sur des partenaires spécialisés.
L’EVARS représente également un point de convergence entre les droits des femmes et ceux des enfants, en déconstruisant les stéréotypes de genre et en luttant contre les violences sexuelles, le sexisme et les discriminations LGBTQIA+. C’est pourquoi l’avis du Cese insiste sur l’importance de l’intégrer dans un cadre scolaire, avec un volume horaire dédié d’au moins 30 heures par an dès le collège. Cette éducation, orientée vers le respect, l’égalité et la prévention, permettrait de repérer plus facilement les jeunes victimes d’abus et de prévenir les comportements à risque.
Le rôle central des familles est également souligné. Première instance de socialisation, elles doivent être accompagnées dans cette démarche par des rendez-vous réguliers avec des professionnels, dès les premières étapes de la vie de l’enfant, pour mieux répondre à ses besoins émotionnels et relationnels. De ce fait, il est indispensable que le soutien à la parentalité soit renforcé, notamment au-delà du cadre médico-social.
Enfin, l’avis propose d’inscrire cette éducation dans tous les lieux fréquentés par les jeunes, qu’il s’agisse d’établissements scolaires, de centres de loisirs, ou encore de clubs de sport. L’EVARS ne peut se limiter à un cadre formel, elle doit imprégner l’ensemble des espaces de socialisation des jeunes pour devenir une véritable composante de leur émancipation.
En conclusion, rendre effective l’EVARS est non seulement une nécessité pour garantir les droits des enfants, mais également un levier pour construire une société plus égalitaire et respectueuse des différences. Cela passe par un engagement ferme des pouvoirs publics, des familles et des professionnels, afin de créer un environnement où les jeunes peuvent s’épanouir pleinement dans leurs relations affectives, relationnelles et sexuelles.