Dans un rapport intitulé « Discriminations et origines : l’urgence d’agir » et publié le 22 juin, le défenseur des droits lève le voile sur l’ampleur des discriminations subies par les personnes issues de l’immigration. Il fait état d’un racisme systémique. Ce rapport paraît dans un contexte de mobilisation mondiale contre le racisme et les violences policière.
Discrimination à l’emploi, au logement, à l’éducation, surexposition aux contrôles et aux violences policières, inégalité face à la santé… le dernier rapport publié par le défenseur des droits révèle l’ampleur des discriminations qui touchent les personnes racisées : « En France métropolitaine, l’origine réelle ou supposée constitue le deuxième critère de discrimination après le sexe : 11 % des individus déclarent avoir vécu une ou des discrimination(s) en raison de l’origine ou de la couleur de peau au cours des cinq dernières années. »
Le confinement et la crise sanitaire ont mis en lumière les inégalités sociales et exacerbé les discriminations
Pendant le confinement, les habitants des quartiers populaires, en grande partie issus de l’immigration, ont été surexposés aux contrôles policiers abusifs, tandis qu’ils et elles comptaient parmi les travailleurs en première ligne de la lutte contre le coronavirus.
Études à l’appui, le défenseur des droits fait état d’un racisme systémique : « Les discriminations ne sont pas le résultat de logiques individuelles, de quelques DRH qui refusent d’embaucher des personnes noires ou arabes. C’est tout le système qui est en cause, un système qui reproduit les inégalités », expose Jacques Toubon, au Monde. Ces discriminations concernent tous les domaines de la vie sociale : elles entravent l’accès la santé, à l’éducation, au logement (les personnes ayant un nom à consonance arabe ou africaine ont respectivement 27 % et 31 % moins de chances d’obtenir un premier rendez-vous avec le propriétaire), au loisir, et à l’emploi (les individus ayant un nom à consonance arabe doivent envoyer environ trois CV pour obtenir un entretien).
Dans le monde du travail, les discriminations se traduisent par une plus grande difficultés pour accéder à l’emploi, des carrière stagnantes et des écarts salariaux
« Les hommes descendants d’immigrés originaires d’Afrique du Nord ou subsaharienne, âgés de 25 à 59 ans, ont un salaire mensuel moyen inférieur de 7 % par rapport aux hommes sans ascendance migratoire, ceux nés dans les DOM de 23 %. L’écart salarial est encore plus marqué pour les femmes, âgées de 25 à 59 ans, originaires d’Afrique du Nord ou subsaharienne (- 49 %) ou celles nées dans les DOM (- 38 %) par rapport aux hommes sans ascendance migratoire directe. »
Les personnes issues de l’immigration sont aussi plus souvent assignées à des emplois précaires, peu qualifiés et physiquement difficiles. Dans le secteur du BTP, le défenseur des droits a mis en évidence l’existence d’un système d’organisation et de hiérarchisation des tâches de chacun sur le chantier, non en fonction des compétences, mais en fonction des origines réelles ou supposées, le groupe de travailleurs sans papiers maliens étant affecté et maintenu aux tâches les plus pénibles et dangereuses.
Ces discriminations se constatent dès l’école, comme le relate le sociologue Jean-Luc Primon au Monde : ils et elles ont plus de chance d’être orientés vers des formations professionnelles et nombre d’entre eux témoignent avoir été discriminés à l’école. L’enquête « Condition de vie des étudiants » de 2016 montre qu’un important pourcentage des étudiants racisés sont victimes de traitements défavorables, par exemple concernant la notation.
Absence de politique nationale de lutte contre les discriminations liées à l’origine
Dans son rapport, le défenseur des droits déplore l’absence de politique nationale de lutte contre les discriminations liées à l’origine et les limites du recours au contentieux. « La complexité de la preuve, la faiblesse des sanctions et des indemnités ainsi que le coût financier et psychologique pour la victime sont autant d’obstacles à l’efficacité du recours juridictionnel qui ne peut être le seul point d’ancrage de la régulation sociale », rapporte-t-il.
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