— Par Térèz Léotin, écrivain en créole —
Durant la semaine du 06 au 09 avril 2017, s’est tenue, sur le territoire guadeloupéen, la cinquième manifestation du Congrès des écrivains de la Caraïbe qui se réunit tous les deux ans. L’on se doit de reconnaître que l’initiative très louable est à encourager.
Il y a eu de nombreux ateliers, des échanges entre pairs, cependant, à l’heure des bilans, ne pourrait-on demander aux organisateurs s’il s’agit d’ostracisme de leur part ou si tout simplement, pour eux, ce n’est que la langue qui détermine à elle seule les propensions, les qualités requises pour que l’on soit reconnu écrivain ou non ?
Autrement dit si c’est uniquement la langue qui fait l’écrivain, ou plus précisément s’il n’y a d’écrivains caribéens que dans certains milieux, ou encore dans certaines langues : les langues officielles de la Caraïbe, par exemple.
Pourquoi avoir ignoré et relégué aux oubliettes les langues dites minoritaires ? Est-ce pour mieux s’appliquer à les faire disparaître du domaine culturel ? Pourquoi cette prétention à les rejeter au second plan ? À les croire inutiles ? Tout le monde mérite sa place. Alors pourquoi ne vole-ton qu’au secours de ceux qui n’ont plus besoin de reconnaissance linguistique ?
Sans polémique aucune, nous voulons savoir si ce grand Rendez-vous du Congrès n’aurait pas pu être l’occasion de donner aux écrivains, dont la langue écrite est le créole, l’opportunité d’avoir une certaine reconnaissance, eux aussi ? Nous ne voulons pas en désespérer.
Nous savons qu’il est difficile de répertorier puis ensuite d’inviter tout le monde, et nous ne nous faisons surtout pas d’illusions, mais l’impression amère d’une omerta – nous précisons de nouveau, et cela a son importance – sur les auteurs qui écrivent en créole, paraît évidente. Elle correspondrait à la déconsidération et au mépris que cette langue subit. Cette langue tout autant que les écrivains qui ont choisi de l’écrire pour la faire émerger, pourquoi n’auraient-ils pas droit de cité, d’être cités ?
À quoi veut-on faire correspondre le Congrès des écrivains de la Caraïbe, si dans la triste réalité ce Congrès ne renvoie qu’à un CERTAIN reflet ?
Nous ne voulons ni croire ni penser qu’il s’agirait, là, d’une espèce de mise en quarantaine vis-à-vis de ceux qui n’écrivent pas dans les langues qui ont « si bonne réputation ».
Térèz Léotin, écrivain en créole
Membre de KM2 ( Krey Matjè Kréyol Matinik / Association d’écrivains en langue créole de la Martinique )