« Le combat contre le diable : l’exorcisme dans les textes du XVIe siècle à aujourd’hui », d’Olivia Legrip-Randriambelo

Qui sont les exorcistes ? Qui sont les possédés, les démons et les diables à exorciser ? Comment se déroule une séance d’exorcisme ? Véritable anthologie de l’exorcisme, ce volume parcourt le temps, du XVIe au XXIe siècle, afin de venir éclairer cette pratique religieuse si particulière, dans une perspective historique et anthropologique.

Un recueil qui passe en revue nombre de textes sacrés et d’écrits théologiques au sujet de l’exorcisme, mais également des textes qui détaillent les rituels, sans faire l’impasse sur le volet politique et juridique de cette pratique (on y puisera aussi des récits et archives de procès).

Une approche chronologique, qui ambitionne de percevoir les changements et les adaptations des rituels exorcistes à travers les siècles.

Un ouvrage qui redonne la part belle aux pratiques exorcistes en tant qu’objet de recherche, les distinguant ainsi des procès en sorcellerie et de l’imaginaire diabolique. Une pratique qu’il convient de redéfinir en contexte, suivant l’évolution des siècles, touchant aussi à la santé, la justice ou les questions de genre.

Foisonnant et inédit.

Anthropologue, chercheure à l’Université de Lyon 2, Olivia Legrip-Randriambelo est co-rédactrice en chef de la revue de sciences sociales Émulations.

Le combat contre le diable
d’ Olivia Legrip-Randriambelo , Olivier Legrip-Randriambelo

248 pages – sept. 2021
Dimensions : 13,5 x 21ISBN : 9782204142151Poids : 244 grammes
22,00€

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« Dans les diocèses de France, les demandes faites au service de l’exorcisme sont très nombreuses »

Si le mot fascine, la réalité de l’exorcisme reste mal connue du grand public. L’anthropologue Olivia Legrip-Randriambelo, qui vient de publier une anthologie de textes sur le sujet, fait le point sur cette pratique toujours utilisée aujourd’hui.

— Propos recueillis par Matthieu Giroux —

Qui sont les exorcistes ? Qui sont les possédés, les démons et les diables à exorciser ? Comment se déroule une séance d’exorcisme ? Chercheuse à l’université de Lyon II et corédactrice en chef de la revue de sciences sociales Emulations, Olivia Legrip-Randriambelo vient de publier, aux éditions du Cerf, Le Combat contre le diable, un recueil de textes sur l’exorcisme qui couvre une période de cinq siècles (du XVIe au XXIe siècle). L’ouvrage éclaire la réalité historique d’une pratique souvent mal comprise et réduite à quelques clichés spectaculaires.

Votre livre compile des textes traitant de l’exorcisme du XVIe siècle à aujourd’hui. Est-ce à dire que la pratique n’existait pas avant le XVIe siècle, qu’elle a commencé à être ritualisée à cette époque, ou que la documentation historique antérieure fait défaut ?
Des exorcismes sont relatés dès l’Antiquité. L’exorcisme apparaît très tôt dans la tradition chrétienne (dès les premiers siècles de notre ère) et des textes bibliques disent que Jésus lui-même a fait des exorcismes. Ce rituel est particulièrement répandu entre les XIIe et XVIIe siècles. Pour le XVe siècle, l’exorcisme est évoqué en parallèle des chasses aux sorcières. Le XVIe siècle est celui des grandes publications autour des notions de « démonologie », « démonomanie », etc.

Ces ouvrages prennent la forme de manuels, de rituels ou de récits de possession, d’exorcisme et de procès en sorcellerie. Les plus connus sont publiés pendant la période de l’Inquisition : Le Marteau des Sorcières paru en 1487, de Jacob Sprenger et Heinrich Institoris, La Démonomanie des sorciers en 1602, de Jean Bodin, Le Discours exécrable des sorciers, également en 1602 de Henry Boguet, ou encore le Tableau de l’inconstance des mauvais anges et démons paru en 1612 de Pierre de Lancre.

« Jésus lui-même a fait des exorcismes »

En ce qui concerne mon livre, le choix a été fait de débuter le recueil de textes au XVIe siècle pour plusieurs raisons. D’une part, les sources imprimées sont plus nombreuses à partir de cette époque. D’autre part, surtout, le XVIe siècle est marqué par la Réforme protestante qui impose un tournant dans les pratiques rituelles chrétiennes, dont l’exorcisme. De plus, peu après, les rituels exorcistes ont été soumis aux règles établies par le grand rituel romain édicté par le pape Paul V en 1614.

L’exorcisme et les cas de possession ne se limitent pas à la chrétienté. Comment se manifestent-ils dans les autres civilisations ?

Si le terme « exorcisme » est utilisé dans le vocabulaire chrétien, il se définit comme une action rituelle qui vise à identifier une entité néfaste (un esprit, un démon, un génie, le diable, etc.) puis à l’expulser en dehors d’un individu, d’un objet ou d’un lieu dont elle a pris possession.

Ces phénomènes d’expulsion rituelle sont observables dans de nombreux contextes religieux (l’islam, le judaïsme, l’hindouisme, le bouddhisme, etc.), mais aussi dans les discours qui donnent des interprétations sorcellaires aux souffrances humaines (pour prendre des études anthropologiques classiques : au Soudan chez les Azandé – voir les études d’Edward Evans-Pritchard ; en France en Mayenne – celles de Jeanne Favret-Saada) et à différentes périodes historiques (la Haute Antiquité, l’ancienne Mésopotamie ou la période byzantine).

Par ailleurs, couvrir une période allant du XVIe à aujourd’hui a demandé de faire des choix drastiques. Il aurait été encore plus difficile de se confronter à des choix cohérents et pertinents en empruntant des exemples à divers contextes religieux et à des époques différentes…

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