— Par Lorenzo Clément avec AFP —
Le chanteur Jacques Higelin, un des pionniers du rock français, est décédé vendredi matin à Paris à l’âge de 77 ans, a annoncé sa famille.
Jacques Higelin, est l’auteur-compositeuir d’une vingtaine d’albums et quelques chansons inoubliables, parmi lesquelles « Pars », « Champagne » ou encore « Tombé du ciel ». Il est le père de trois enfants artistes, le chanteur Arthur H, la chanteuse Izia Higelin, et le réalisateur Kên Higelin.
Artiste attachant aux airs d’éternel adolescent, cet « enchanteur », auteur, compositeur et interprète, a rassemblé un public de fidèles autour de ses chansons et de ses concerts incarnés, durant desquels il improvisait sans relâche, passait du piano à l’accordéon ou la guitare et apostrophait les spectateurs Homme de coups de gueule et de coups de coeur, toujours révolté, Higelin évoque dans certaines de ses chansons la société, les sans-papiers ou les difficultés économiques, et s’engage à plusieurs reprises aux côtés des sans domicile fixe. Alternant ballades aériennes, rock énergique et envolées lyriques, jonglant avec le texte en amoureux des mots. Né le 18 octobre 1940 à Brou-sur-Chantereine (Seine-et-Marne), d’une mère belge et d’un père alsacien, Jacques Higelin quitte l’école à 14 ans. Il grandit en écoutant du jazz et de la chanson, Léo Ferré ou Jacques Brel, et rencontre à la fin des années 50 Henri Crolla, guitariste d’Yves Montand, figure familière de son adolescence.
Mais c’est comme comédien qu’il commence sa carrière. Au début des années 60, il s’inscrit au Cours Simon. Il débute au théâtre en 1959 avec « Bon week-end, Monsieur Bennett », mis en scène par Michel Vitold, et se lance aussi au cinéma avec « Le bonheur est pour demain » d’Henri Fabiani (1961), « Bébert et l’Omnibus » d’Yves Robert (1963) ou « Elle court, elle court, la banlieue » de Gérard Pirès (1972). Il jouera au total dans une trentaine de films.
Son destin bascule avec une double rencontre décisive au milieu des années 60, celle des musiciens Areski et Brigitte Fontaine, avec lesquels il se produit en trio sous la houlette de Pierre Barouh. C’est l’époque de ses débuts dans la chanson, des communautés et des expériences. En 1965, il sort l’album « Douze chansons d’avant le déluge », enregistré en duo avec Brigitte Fontaine.
En 1974, il amorce un virage rock, avec l’album « BBH 75 ». Enfant de Charles Trenet et des Rolling Stones, il est l’un des premiers chanteurs à tenter la synthèse entre le rock et la chanson, deux genres a priori antagonistes. Il sort ensuite « Irradié » (1975), « Alertez les bébés » (1976) et « No man’s land » (1978). Devenu chanteur rock populaire, il connaît en 1979 un grand succès avec l’album « Champagne pour tout le monde » et son jumeau « Caviar pour les autres… ».
En 1988, il remporte à nouveau l’adhésion du public avec l’album « Tombé du ciel », pour lequel il s’entoure de musiciens comme Didier Lockwood et William Sheller. L’album, qui se vend à plus de 300.000 exemplaires, est son plus grand succès. Suivent « Aux héros de la voltige » (1994) et « Paradis païen » (1998), qui marque ses retrouvailles avec Areski. En 2005, il reprend des chansons de Charles Trenet lors d’une tournée, en héritier déjanté et lunaire du « fou chantant ». En 2006, après huit ans sans album de chansons originales, il sort « Amor Doloroso », suivi de « Coup de Foudre » en 2010. Ces albums, pour lesquels il travaille avec l’ex-leader de Kat Onoma, Rodolphe Burger, sont tous deux salués par la critique. Après « Beau Repaire » paru en 2013, il sort son 20e et dernier album, « Higelin 75 », à l’automne 2016. Plus libre que jamais sur cet opus, le chanteur installé à Pantin, aux portes de Paris, se permet un morceau-fleuve final de plus de… 21 minutes et, dans « J’fume », clame continuer à « fumer » en attendant « que le fossoyeur me creuse une tombe au Père-Lachaise » et que « le temps s’arrête et que le ciel me tombe sur la tête ».