— Tribune de Gabriel Jean-Marie (combat ouvrier)° —
Depuis quelques jours, c’est l’émoi et le branle bas de combat chez les élus. Un vent de fronde souffle, principalement chez les maires à quelques jours de la rentrée. La cause ?
Le gouvernement a décidé du jour au lendemain de ne pas renouveler les contrats aidés à partir du 1er août 2017. Il a donc décidé froidement et brutalement de renvoyer vers le chômage 160 000 travailleurs qui avaient pu momentanément sortir la tête de l’eau….. Il s’en explique par sa ministre du travail, Muriel Pénicaud qui a déclaré. « La solution de demain, sur le long terme, ce n’est pas de l’emploi court terme précaire en contrat aidé. Un, les contrats aidés sont extrêmement coûteux pour la nation; deux, ils ne sont pas efficaces dans la lutte contre le chômage; et trois, ils ne sont pas un tremplin pour l’insertion professionnelle. Ces contrats permettent surtout aux « associations ou (aux) collectivités locales » d' »équilibrer leur budget ».
C’est la même ministre qui est chargée de poursuivre le démantèlement du Code du travail à la demande de Macron pour le compte du patronat, et principalement du Medef.
Des élus de la Réunion sont montés au créneau. Le député de Martinique Serge Letchimy est intervenu à l’Assemblée nationale dans le cadre des questions au gouvernement. Après avoir cité une série de chiffres attestant de l’importance de ces emplois dans l’activité économique, il a conclu en justifiant le maintien des contrats aidés: « Les inégalités atteignent aujourd’hui des sommets. Vous allez les amplifier en remettant en cause le volume, la durée et le financement des contrats aidés. Vous allez mettre des milliers de jeunes dans la rue ». A n’en pas douter, le député n’a pas oublié la journée du vendredi 6 mars 2009 à Fort de France où des centaines de jeunes, souvent sans emploi, exaspérés par l’attitude du patronat et du pouvoir qui faisaient trainer les négociations, étaient intervenus durant la grande grève de février-mars 2009. Et manifestement, il n’a aucune envie qu’une telle situation se renouvèle.
Jeudi 24 août, des élus municipaux se sont réunis au siège de leur association, puis se sont rendus en délégation en préfecture pour dire leur inquiétude au représentant de … l’Etat, celui là même qui est chargé de mettre en œuvre la politique du gouvernement qui vient de le nommer.
Les collectivités financièrement exsangues : une affaire qui n’est pas nouvelle!
Les 14 et 15 novembre 2016, s’était tenue aux Trois-Ilets une rencontre en présence du préfet de Martinique intitulée les « Universités des Maires ». Le thème était : « les réalités financières et juridiques des communes dans un contexte économique très difficile ». Maurice Bonté, président de l’association des maires de Martinique et maire de droite d’Ajoupa-Bouillon déclarait à cette occasion : « Dans un contexte financier tendu, voire très difficile pour la plupart des communes », il s’agit d’« être plus efficace». Le directeur général de l’association des maires de France a bien parlé des « actions menées par l’AMF pour lutter contre la baisse des dotations allouées aux communes » Mais c’était pour ajouter tout de suite que « L’association des maires de France estime que les communes sont prêtes à participer à cet effort des dépenses publiques ». Dit autrement, ils acceptaient de gérer la pénurie.
Lors de la plénière des 23 et 24 novembre qui débattait des orientations budgétaires pour l’année 2017 de la CTM, Michel Branchi, le président (PCM) de la Commission Finances de l’Assemblée justifiait ainsi l’augmentation des prix des carburants: « la dotation globale de fonctionnement va baisser de 10 millions. Donc, il y a malheureusement la nécessité d’augmenter l’effort des Martiniquais. Quand les Martiniquais donnent 5 cts de plus, ces 5 cts qui va permettre d’entretenir mieux le réseau routier, de faire des études pour le viaduc de Fonds Lahaye, et de créer des emplois et de soutenir l’activité des entreprises martiniquaises ».La belle histoire !
Dans France-Antilles du 21 décembre 2016, Eugène Larcher, le président de la Communauté d’Agglomération de l’Espace Sud de Martinique (CAESM) lui aussi justifiait ainsi les hausses de taxes : « Il nous a fallu faire face aux conséquences du désengagement de l’État qui réduit massivement les dotations qu’il verse aux collectivités ». « Il faut savoir que, depuis 2015, la dotation Globale de Fonctionnement versée à l’Espace Sud diminue de 1,3 millions d’euros par an, ce qui représentera une perte de 4 millions d’euros pour notre communauté entre 2014 et 2017 ». Certains n’ont pas baissé les bras en constituant un comité de citoyens et en se mobilisant, ce qui a fait reculer Larcher.
Une pénurie qui profite à certains ….sous forme de cadeaux !
Depuis des années, les différents gouvernements ont pris l’habitude d’arroser les capitalistes avec l’argent public. Hollande, qui avait déclaré en janvier 2012 être l’adversaire du monde de la finance, a poursuivi en mettant en place deux dispositifs supposés permettre de lutter contre le chômage. Le Crédit Impôt Compétitivité Emploi (CICE) est censé rendre les entreprises compétitives par des baisses de charges via le versement de subventions. Pour financer ces aides, le montant des dotations allouées aux collectivités a diminué de 1,5 milliard en 2014 et d’autant en 2015, soit 3 milliards au total. Et puis, il y a eu le « Pacte de responsabilité » dont Pierre Gattaz le patron du Medef parlait en ces termes en janvier 2014 : « Nous avons salué le pacte de responsabilité que nous a servi le président de la République le 31 décembre (2013) et qui était inspiré, je ne le dis pas trop fort, du pacte de confiance que nous lui avons apporté sur un plateau».
Ces cadeaux, supposés rendre les entreprises compétitives et permettre la création d’emplois, ont coûté au bas mot pas moins de … 45 milliards d’euros au budget de l’Etat. Et pour quel résultat ? Un chômage de plus en plus élevé, des collectivités exsangues, des services publics de plus en plus délabrés, et les bénéfices des entreprises du CAC 40 qui flambent. Autrement dit, de l’argent public a afflué dans les caisses d’entreprises privées et a servi à améliorer les marges et les dividendes.
Aujourd’hui, certains élus et des maires de Martinique font mine de monter au créneau. Mais, combien de ces élus ont alerté la population sur les conséquences de cette politique des différents gouvernements ? Pas un seul. Soucieux de se montrer bons gestionnaires, ils ont accepté de fonctionner avec moins de moyens, en augmentant les prélèvements (taxes, etc.), plutôt que d’exiger de l’Etat les moyens financiers nécessaires pour disposer d’emplois pérennes afin d’assurer le fonctionnement correct du service public, et en ayant recours notamment aux contrats aidés qui permettaient de répondre à de vrais besoins à moindre frais. Tous, ils ont appelé à voter au second tour de la présidentielle Macron qui avait très clairement annoncé que voter pour lui, c’est voter pour la « baisse de 60 milliards des dépenses publiques » et la « simplification drastique du Code du travail ».
L’argent public doit financer les services publics
La diminution du nombre de contrats aidés frappera de façon intolérable les milliers de jeunes et moins jeunes qui parviennent ainsi à vivoter, même dans la précarité. Elle rendra aussi plus difficile le fonctionnement correct des services publics. De nombreux élus l’ont dit et ils ont donné des exemples.
Si tous le disent, et en sont arrivés, (comme les travailleurs en lutte) à manifester publiquement leur inquiétude, c’est surtout qu’ils craignent d’avoir à gérer les problèmes qui découleront nécessairement de la suppression de ces emplois aidés qui correspondent à des besoins utiles à la population.
Aujourd’hui, une partie des élus monte au créneau, contre la suppression des moyens qui leur permettraient de pérenniser les contrats aidés. Mais, de quel type d’emploi s’agit-il ? Les travailleurs en contrats aidés, avec généralement une durée de six mois, renouvelables sous certaines conditions, touchent des bas salaires, subissent de fortes pressions, sont taillables et corvéables à merci.
Les collectivités, les associations, ont besoin de moyens pour faire fonctionner correctement les établissements scolaires, les crèches, les hôpitaux, bref les services ou aides à la personne.
Alors, face à la politique méprisante et scélérate du gouvernement Macron–Philippe, les revendications doivent être claires : la gabegie consistant à verser à fonds perdus de l’argent public à des entreprises privées doit cesser.
Il faut exiger que les emplois aidés soient transformés en emplois pérennes, occupés par des salariés payés correctement et en fonction de leur activité. Il faut exiger que le gouvernement change sa politique antisociale! Et ce ne sont pas les lamentations de quelques élus mettant en avant, qui sa qualité de député, qui sa qualité de sénateur ou encore de maire, qui feront le gouvernement changer cette politique au service des riches. D’autant que ces notables sont responsables des ravages que font chômage et précarité, car qu’ils soient de gauche ou de droite, ils ont toujours soutenu les gouvernements qui tous veulent faire payer la crise aux classes populaires, pour servir les riches possédants, les capitalistes. Ces élus là ne sont ni plus ni moins que des serviteurs politiques de la bourgeoisie.
Il faut occuper massivement la rue pour exiger que l’argent public soit affecté au service public pour la création d’emplois pérennes. Et déjà, tous ceux qui veulent se battre pour de tels objectifs peuvent se saisir du 12 septembre, journée choisie par les syndicats et organisations ouvrières pour crier leur opposition aux politiques anti-ouvrières et anti-sociales du gouvernement Macron-Phillipe
28 août 2017