— Par Lucien Cidalise Montaise —
Les déchirants et sanguinaires événements de ces derniers temps en Europe et surtout en France, nous ont abasourdis par leur cruauté. Existe-il d’autres termes pour qualifier pour l’Histoire, ces dramatiques moments ? Même les présentateurs télé pourtant habitués à présenter les laideurs qui ensanglantent quotidiennement le monde étaient désemparés. Ne sachant que dire, mais surtout comment dire! L’on assiste accablé, confondu de questionnement à un drame qui rapidement s’avérera monstrueux.
On tue, on assassine! La terreur s’empare de tout! Et se met en marche, la technologie de l’information, esclave de l’audimat. Français le chauffeur ? Non! Étranger ? Oui! Enfin un peu. Franco-Tunisien!!! NON Tunisien… ON souffle! Les terroristes ne sont jamais des Français à part entière type FN. La salissure communautariste étouffe tout.
Malgré leur immense douleur, les Français interrogés se sont montrés dignes. Ni allusion tendancieuse à l’origine du tueur, ni condamnation d’une quelconque appartenance à une communauté qui souvent a donné la preuve qu’elle appartenait à la France. Même coloniale. Même colonialiste!
Les parents de ces personnes ont bien souvent donné à la France, attaquée, occupée, vilipendée, la preuve qu’ils la respectaient et l’aimaient. Les Harkis, vous connaissez ? Demandez à l’histoire de vous présenter les conditions de vie de ceux qui ont préféré la France à tout. Leur raison leur appartenait…
Et maintenant comprenez. La haine est un monstre né de l’inculture et de la frustration. Mais elle s’alimente aussi de diastases meurtrières telles la propagande nihiliste religieuse qui n’est pas la propriété de l’islam seul! L’image de la France que les indigènes coloniaux ou ceux qui se considéraient comme tels, était soit obturée pour les premiers, soit délinquante pour les descendants, les enfants, grâce à la fissure des consciences dominantes provoquée par la lutte des forces anticolonialistes. L’artifice de la proximité n’a rien changé. Le Bicot, le Nègre, le Juif, étaient scotchés – le sont-ils toujours – dans l’ordinaire de l’Européen, victimes de la manipulation et de ses tentacules de médisances et de mensonges.
La démocratie française, une des plus éclairées qui soit, depuis sa jeune naissance n’a jamais été une « parfaite démocratie d’opinions » . Ce qui en élimine le caractère éminemment populaire.
Martiniquais, nous sommes quoi?
L’humanisme n’existe pour beaucoup d’Européens, que parce qu’il s’inscrit – le croient-ils! – qu’en Europe!
Les tentatives différentes d’appropriations ont en général échoué ou tardent à conclure. La loi de l’offre est imprégnante. Elle prolifère aujourd’hui, mais expurgée par des consciences immorales, elle maîtrise avec cynisme l’hypocrisie devenue technique humaine, élevée à la hauteur d’un dogme politico-humain. Cette pensée prend la forme de la commisération, du paternalisme, pour finir dans la haine. Ceux dont les noms à consonance « étrange! » provoquent chez l’autre, le réflexe de l’étranger-pas-catholique-du-tout!
Seront-ils contraints de changer de nom, sinon de race ? Les juifs ont subi cet avatar après la guerre par peur des représailles raciales. Qu’ils s’en souviennent!
L’histoire coloniale française a toujours subit l’ire des bonnes consciences. Elle a donc trahi tous ceux qui en ont été les victimes forcées. Des élucubrations orientées font toujours les dimanches culturels et bourgeois d’une partie bien pensante de ceux qui ont fait de la France, leur France… et de la Martinique, leur Martinique! Pour beaucoup, cette histoire était une sorte de conquête « fleur au fusil! » et s’affirmait comme étant un droit, celui qui au nom d’un Dieu, mais hors de l’Europe, apportait avec condescendance les « bienfaits » de la civilisation!
La terre tournant, les consciences suivent, assimilent ou rejettent dans la violence, souvent dans le crime. Mais aujourd’hui, il s’agit pour nous d’analyser et de consentir à œuvrer pour une plus grande reconnaissance de l’autre, qui a les yeux bleus, la peau foncée ou un patronyme singulier. Le terrorisme est le criminel débris de ce qu’il ne fallait pas laisser grandir et essaimer. Colonialisme, racisme, esclavagisme de tout acabit, exploitation éhontée, mépris, religiosité imposée. Tout au contraire de ce qu’il fallait proposer ; et pour finir, absence cruelle de solidarité humaine entre les habitants de cette Terre.
Nous Martiniquais, n’avons rien eu à proposer, sinon notre infinie inexistence. Nous n’avons déjà rien à envisager pour l’amélioration du fonctionnement sociétal de notre île! Nous sommes quoi ?
Mais enfin, le terrorisme devra-t-il être le moteur de la reconnaissance de notre pays ? C’est-à dire qu’on fera l’actualité dans le sang et dans la terreur ? Avons-nous besoin de saigner pour exister ?
Ces réflexions n’appellent ni la rupture, ni l’appel au secours. Seulement la pleine et juste reconnaissance d’une jeune conscience, certes difficile à fixer, parce que diverse, mais qui bouge, entretenue par notre culture, notre patrimoine et notre histoire, qui sont loin d’être des secrets d’État!
Cessons de nous vêtir de confettis. Soyons les auteurs de notre survie.
Lucien Cidalise Montaise