Nantes dans la traite atlantique et l’esclavage colonial, 1707-1830. Jusqu’au 19 juin 2022.
Aujourd’hui encore, les historiens ne parviennent pas à se mettre d’accord sur le nombre de victimes de la traite atlantique. Les documents manquent, bien évidemment, pour qu’une comptabilité exacte soit réalisée, cependant les écarts des estimations ne s’évaluent pas en dizaines ou en centaines de milliers, mais en millions. Comment est-il possible qu’un phénomène aussi tragique et fondamental puisse partager à ce point ceux qui se sont consacrés à son étude ? Il s’avère que le nombre, aussi vertigineux qu’il soit, ne suffit pas à dire.
Qui plus est, que saurions-nous vraiment si ce nombre était définitivement arrêté ? Saurions-nous combien d’hommes, de femmes et d’enfants périrent au moment des guerres, des raids et des razzias qui furent à l’origine de leur captivité ? Saurions-nous comment, à des milliers de kilomètres de là, une ville entière et son territoire ont pu trouver dans le système colonial et esclavagiste les raisons et les moyens d’un enrichissement sans précédent ? Comprendrions-nous la place que ces acteurs ont tenue dans un monde globalisé, à l’aube du capitalisme moderne ? Imaginerions-nous le lien étroit entre la Traite atlantique et les prémices de la révolution industrielle ? Comprendrions-nous, ne serait-ce que l’espace d’un instant, ce que fut l’horreur de ne plus s’appartenir, de quitter le monde des hommes pour celui des biens matériels, de disparaître sans laisser de trace ni même de souvenir ?
Le musée d’histoire de Nantes propose d’interroger ses collections sous un nouvel angle, afin de révéler les traces invisibles au premier abord mais bien présentes, du destin de celles et ceux qui furent victimes du système colonial. Au-delà de la vision économique et commerciale habituelle, l’exposition lèvera le voile sur la complexité du réel d’une ville qui fut négrière et esclavagiste.
Volontairement immersive, suggestive et sensible, L’abîme rend compte de la complexité du réel et sera l’occasion de découvrir les noms de celles et ceux, qui inscrits dans les documents officiels, vécurent à Nantes en subissant le statut de personnes captives mises en esclavage, entre 1692 et 1792.
Le multimédia y tient une place importante : introduction sonore, lecture de documents historiques en écoute individuelle, diffusion de musiques, vidéomapping sonore sur deux tableaux, projections de noms de personnes esclavagisées sur une cimaise et de documents en grands formats dans l’espace de traversée, rythmeront la visite. La modélisation du navire La Marie-Séraphique est présentée au public à travers un film.
L’exposition se fait également l’écho de grands débats et sujets qui font notre actualité : migrations, réseaux de l’esclavage contemporain, développement de nouvelles formes de racisme, mouvements pour l’égalité des droits…