—Par Romain Ligneul* —
Dans quelle mesure l’intelligence des électeurs a-t-elle déterminé l’issue des présidentielles américaines ? Une étude scientifique parue le 3 novembre s’est penchée sur la question.
Intitulé «Capacité cognitive et autoritarisme : comprendre le soutien pour Trump et Clinton», l’article de Becky Choma et Yaniv Hanoch décrit le rapport complexe existant entre capacité cognitive et soutien au nouveau président américain, Donald Trump.
Concrètement, les chercheurs ont invité 400 électeurs américains à remplir un test de quotient intellectuel (très abrégé, d’où l’emploi du terme vague de «capacité cognitive») et une série de questionnaires. Parmi ces derniers, des questions sur les intentions de vote et les opinions pro-Trump, mais également deux échelles de personnalité connues sous le nom de SDO (pour Social Dominance Orientation) et RWA (pour Right-Wing Authoritarism).
Le SDO est très fréquemment utilisé en psychologie pour évaluer la tendance à légitimer les rapports hiérarchiques au sein des sociétés (ex : hommes-femmes, blancs-minorités, etc.). Le RWA est quant à lui utilisé pour évaluer la tendance à désirer un gouvernement autoritaire, conservateur et faisant respecter les traditions, notamment religieuses.
Le lien indirect entre Trumpisme et intelligence
Si les résultats indiquent qu’il n’existe pas de lien direct entre intelligence et vote Trump, ils soulignent en revanche l’existence d’un lien indirect.
En effet, une analyse par «pistes causales» (path analysis en anglais, PDF) a révélé qu’une capacité cognitive plus faible est associée, en moyenne, à une légitimation plus forte des rapports de domination en place (SDO) ainsi qu’à une attraction plus forte pour les politiques autoritaires et traditionalistes (RWA). Or, comme ces deux échelles ont un puissant impact sur l’adhésion aux thèses de Donald Trump (et plus généralement, aux thèses conservatrices), l’intelligence a sans doute bel et bien joué un rôle indirect sur l’issue des présidentielles américaines.
Pour résumer, les individus ayant un QI plus faible auraient en moyenne voté un peu plus souvent pour Trump, en raison d’une sensibilité accrue aux discours qui proposent de renforcer la domination de certains groupes sociaux sur d’autres, à partir de distinction religieuses ou raciales. Il aurait été intéressant de savoir si ces mêmes électeurs valident aussi volontiers les rapports d’autorité fondés sur des distinctions d’ordre intellectuel ou académique, mais les chercheurs n’ont pas abordé cette question…
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*Romain Ligneul est chercheur post-doctorant en neurosciences. Après des études de biologie, philosophie et sciences cognitives, il a effectué son doctorat au CNRS et à l’université Lyon 1, où il a également enseigné. Il travaille actuellement aux Pays-Bas.