La triste histoire du Président John-Fitz Ken

— Par Gary Klang —
Après le passage tumultueux à la Maison dite Blanche du président Blondinet, dont le patronyme trompeur fait penser à un gamin folâtre, l’Américanistan en eut assez de l’entendre vociférer contre le monde entier, le menaçant sans cesse de lui infliger des droits de douane exorbitants, ou encore d’accaparer le Canada, Gaza, le Groenland et le canal de Panama. Et c’est ainsi que tout sembla changer avec la venue d’un certain John Fitz-Ken, marchand de cacahuètes de son état et dont le discours d’investiture fit l’effet d’une brise fraîche :

Mes Chers Compatriotes,

J’ai honte de Blondinet et de ses conneries; j’ai honte chaque fois que je repense à la scène de la fiole à l’ONU où un général indigne sacrifia son honneur pour une guerre absurde qui fit plus d’un million de morts en un soir à Bagdad; j’ai honte de notre façon d’agir, de tout ce que nous faisons et cela doit changer.

Le monde entier nous hait. Mais comment en serait-il autrement ? Serions-nous le préfet de discipline d’une école appelée monde ? Jamais un geste venant du cœur! Seuls comptent nos intérêts et nous pensons qu’un pays ne peut pas avoir d’amis. Mais pourquoi donc n’aurait-il pas d’amis ?

Nos présidents, républicains ou démocrates, n’hésitent pas à fomenter des coups d’État partout dans le monde et à assassiner les gouvernements qui leur déplaisent. Record jamais battu : ils ont tenté d’assassiner Fidel Castro plus de 500 fois, par les moyens les plus abracadabrantesques, parce qu’il ferma les casinos mafieux, mit fin au préjugé de couleur et donna à son peuple éducation et soins gratuits. Au lieu de suivre son exemple, nous l’avons diabolisé, tout en soutenant les pires crapules de la planète, les Duvalier, Somoza ou Trujillo. Et pour punir l’île encore plus, nous maintenons un embargo criminel depuis plus de 60 ans tout en gardant Guantanamo, qui pourtant lui appartient.

Ainsi, par notre volonté morbide d’annihiler tous les gouvernements de gauche, nous avons vidé de leur contenu les mots liberté, démocratie, égalité. Quant à la fraternité, elle n’a aucun sens à nos yeux. Nous nous gavons pourtant du terme free speech, alors qu’en réalité je défie quiconque de tenir certains propos chez nous, sous peine d’être démoli socialement ou physiquement. Allez donc parler de révolution, de Fidel ou du Che à Miami, par exemple.

Qui est vraiment libre dans notre pays ? Que signifie pour nous la liberté ?
Plus rien, sinon le droit d’exploiter les plus faibles et de permettre à certains de posséder encore plus de milliards, alors que d’autres dorment à même les rues ou dans leur voiture, à la merci des meurtriers.

Gandhi, Tolstoï, le pasteur King et Nelson Mandela m’indiquent le chemin à suivre. Notre comportement barbare est la cause de la haine que nous suscitons de par le monde; car enfin, comment définir autrement la destruction de l’Irak, le gaz orange au Vietnam, l’assassinat d’Allende et le soutien apporté aux tyrans ?

Pour toutes ces raisons là, j’ai décidé de mettre fin au mal que nous commettons et aux petits calculs sordides ! La paix est possible et ne dépend que de nous. J’annonce donc haut et fort qu’il y a autre chose sur la terre que les armes et la guerre, les tueurs en série, le deuxième amendement, la CIA, la NRA, le ressentiment, la haine et la violence dans lesquels nous baignons.

A partir d’aujourd’hui, tout va changer.
Il n’y aura jamais plus de Blondinet…

Un mois plus tard, John Fitz-Ken était assassiné d’une balle dans la tête.

Gary Klang