Yʼ a de la rumba dans lʼair ! La rumba cubaine vient dʼêtre ajoutée par lʼUnesco à liste prestigieuse du patrimoine culturel de lʼhumanité, parmi dʼautres manifestations du génie humain tels la bière belge ou le carnaval de Granville (Manche). Est-ce une répercussion de la disparition du Lider maximo qui vient de casser son cigare ?
En tout cas, cette inscription au tableau dʼhonneur de lʼUnesco est une bonne nouvelle qui donne lʼoccasion de découvrir cette forme musicale riche et authentique, incarnation de la culture cubaine que lʼon associe à tort aux roucoulades à la Dario Moréno et aux clichés folkloriques à la noix de coco.
Née de la rue
Pour faire simple, on dira que la rumba est en quelque sorte le blues ou le rap des Cubains. Comme dans le Deep South américain, cʼest une musique ultra populaire, née de la rue et des bas-fonds, inventée par les esclaves qui ont réussi à préserver et perpétuer la spiritualité et les richesses musicales de lʼAfrique perdue, au même titre que la santeria, la religion afro-cubaine, à laquelle est est souvent liée.
Ainsi que lʼexplique le site de lʼUnesco :“la rumba a constitué un symbole majeur pour une couche marginalisée de la société cubaine et pour lʼidentité cubaine ; elle permet dʼexprimer lʼestime de soi et la résistance et contribue au rayonnement social en enrichissant la vie des communautés qui la pratiquent”.
La rumba rythme le quotidien des Cubains, elle est un élément du lien social, transcendant les classes, les groupes ethniques et les âges – il existe même une forme de rumba pour les vieux. Comme aux temps anciens, les musiciens utilisent toujours en guise dʼinstruments leurs ustensiles de cuisine et leurs outils de travail : les cajons, ces cageots utilisés par les dockers, de simples cuillères, et des bouts de bois frappés lʼun contre lʼautre, les claves, (les “clefs”) deux morceaux de bois frappés lʼun contre lʼautre, qui forment la base rythmique indispensable de la rumba, sur laquelle les congas (les tambours) vont improviser avec une virtuosité époustouflante, les chanteurs improviser avec les chœurs et les danseurs mimer la séduction et lʼamour avec humour et sensualité.
Multiples influences
La rumba a ses stars et ses groupes mythiques comme les Munequitos de Matanza, ou Yoruba Andabo. La diva de la salsa, exilée de Cuba Celia Cruz a chanté longtemps un titre phare de ce style Quimbara, dont on peut entendre une époustouflante version lors dʼune célèbre tournée à Kinshasa, au cœur de lʼAfrique, avec la Fania all Stars, comme le symbole dʼun retour au pays natal.
A la manière de Celia Cruz avec les musiciens porto-ricains de New York, la rumba a su sʼenrichir de multiples influences qui ont traversé et traversent toujours lʼîle des Caraïbes : espagnoles, puisquʼil existe une rumba flamenca, et quʼon peut entendre les Muñequitos de Matanzas sur le dernier disque du chanteur Diego El Cigala. américaines avec le jazz et les
innombrables musiciens des Caraïbes qui se sont installés aux Etats-Unis, tels Cachao ou Paquito DʼRivera.
La rumba est toujours vivante et elle est jouée avec passion par les jeunes Cubains, comme le prouvent la série documentaire Havana Cultura du DJ Gilles Peterson, ou les innombrables groupes qui enflamment les rues de La Havane ou de Santiago.
LA HAVANE, 5 Dec.
Article des Inrocks repris du site Cubacoop.org