— Par Guillaume Fraissard —
Après la pandémie et avec l’évolution des comportements, notamment ceux des jeunes friands de numérique, faire revenir le public au spectacle constitue un défi pour les institutions, souligne Guillaume Fraissard, chef du service Culture du « Monde », dans sa chronique.
Jamais sans doute nous n’aurons autant pris le pouls de la culture que depuis le début de la pandémie de Covid-19, en mars 2020. Secteur parmi les plus touchés par les mesures successives de confinement, de couvre-feu et de mise en place des jauges dans les lieux publics, qualifié de « non essentiel » par Emmanuel Macron, la culture est l’objet de nombreuses attentions. Le gouvernement – après 14 milliards d’euros d’aides publiques déjà versés depuis 2020 – continue de soutenir les structures en perte de recettes et annonce, par la voix de la nouvelle ministre de la culture, Rima Abdul Malak, une campagne de communication, à la rentrée de septembre, pour inciter le public à retourner dans les salles de cinéma.
Pour les professionnels de toutes les filières, l’heure est aussi à l’observation minutieuse d’un patient toujours convalescent. Fréquentation des festivals, taux de remplissage des théâtres, nombre de bénévoles, vente des abonnements pour la saison à venir, nombre d’entrées hebdomadaires pour les films à l’affiche… Chaque indicateur est désormais scruté à la loupe, jour après jour, entre la crainte de voir une situation atone perdurer et l’espoir d’une hibernation culturelle enfin terminée de la part d’un public frileux à l’idée de sortir. Et les études publiques ou privées se multiplient pour tenter de cerner le phénomène.
Pour l’instant, il est bien difficile d’avoir une vue d’ensemble de l’état de santé général de la culture en France. Le cinéma a perdu plus de 30 % de ses spectateurs, mais le Festival d’Avignon a vendu quasiment toutes les places pour Le Moine noir, la nouvelle pièce de Kirill Serebrennikov. L’Opéra de Paris continue à avoir du mal à faire revenir ses abonnés (40 % en moins en 2021), et dans le même temps la reprise du spectacle Cendrillon, de Joël Pommerat, triomphe au Théâtre de la Porte-Saint-Martin. Damon Albarn n’a pas convaincu grand monde avec son Vol du Boli, en avril, au Théâtre du Châtelet, mais a fait pelouse complète, quelques semaines plus tard, au festival We Love Green, avec son groupe Gorillaz… Echecs et succès, tendances lourdes et conjoncturelles s’entremêlent et dessinent une toile impressionniste dont les contours restent bien flous, laissant le « monde d’après », si tant est qu’il y en ait un, dans le brouillard…
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